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Le déclin sociétal s'amorce par la perte des valeurs

par Benallal Mohamed

« Le désordre du pouvoir public nourrit le désordre » Benallal

L'Algérie vit, actuellement, le début d'une véritable et profonde crise économique, elle risque par la métastase des effets de cette crise néfaste d'être socialement douloureuse ; elle a, aussi, toutes les chances de persister dans le temps et dans son espace social. En pleine crise financière alors que les dirigeants de ce pays, sous les injonctions du FMI et des forces politico-économiques externes, et après avoir créé toutes les conditions de la déroute de l'Economie nationale par ses spéculations insensées de l'import-import et le bradage du patrimoine public, au profit du privé, se retourne contre le peuple pour imposer des programmes d'austérité draconien.

Cette crise multidimensionnelle d'ordre économique par manque de ressources, sociale par manque de discipline et culturelle par manque de vitalité, cette crise ronge profondément, notre société, elle est due principalement à la constitution d'une société inéquitable et injuste puisqu'on s'aperçoit, de jour en jour, que les riches sont de plus en plus riches et ont plus de droits et les pauvres sont toujours aussi pauvres avec moins de droits et sont de plus en plus nombreux suivis par une perte des valeurs morales où l'ordre, la hiérarchie et la primauté du collectif sur l'individuel, la responsabilité familiale, le goût du travail, le collectivisme ne sont plus respectés, un déclin de l'art de la littérature de la philosophie, de la technologie st des savoir-faire économiques militaires et politiques.

La chute de l'ordre et de la société civile crée des vides qui sont remplis par des « baltajyas- m'hargas », des fondamentalistes et des affairistes, sans foi ni loi.

« Il ne peut y avoir ni vraie liberté ni justice dans une société, si l'égalité n'est pas réelle.» Condorcet

Nos dirigeants ont conçu par le biais d'une très mauvaise politique une société entraînée dans une course passionnée à la consommation tous azimuts, au lieu de la créativité de valeurs ajoutées avec comme création de nouveaux besoins qui ont permis avec tous les désavantages que cela puisse engendrer comme problèmes, liés à notre unique ressource épuisable et dont le prix du pétrole dépend de la fluctuation du marché extérieur.

L'Algérie vit, actuellement, avec un système politique démuni de tout « projet de société » et de « projet économique », ce système algérien, centré sur la rente et l'impunité dont la vision stratégique ne dépasse pas le court terme et en l'absence de la citoyenneté, dans le sens le plus large possible où la cité est gérée, en hors normes, par « El ghachi » ce qui suscite, par voie d'action, le pourrissement et la perversion de la société et de réaction au mal de cette déliquescence dont les valeurs , les normes et la morale représentent un mauvais usage devenu injuste et pernicieux.

Cet état de fait exceptionnel où les politiciens et les responsables outrepassent bien des droits, se permettent d'aller, au-delà des normes d'une règle ou d'une loi, d'une habitude?

C'est un abus qualifié qu'il soit d'autorité, d'abus de biens sociaux, d'abus de confiance, d'abus de position dominante, enfin d'abus de pouvoir tout court, pour se permettre d'acquérir des droits tout en contournant les règles de droit les plus élémentaires (transfert de capitaux par des moyens commerciaux), cet état de fait n'est que la conséquence de plusieurs crises de valeur (sociales, politiques, morales, communautaires, nation, nature...).

«L'éducation est l'arme la plus puissante pour changer le monde ». » Nelson Mandela

Par conséquent, le contexte politique, économique, social et culturel, en Algérie, a besoin, non pas d'une réforme au sens propre du terme mais d'une véritable révolution, portant sur de nouveaux concepts de la vie sociale, économique, culturelle et politique à savoir, pour commencer : procéder à la mise en place d'une institution garantissant la moralisation de la vie politique, tout en éliminant les effets de la déchéance et de la perversion. Elle serait faite sur la base d'une nouvelle connexion, normée pour la consolidation de la cohésion sociale. Cette cohésion sociale devrait être bâtie sur une assise de la justice sociale où seul le droit et les valeurs, normes et morale, priment, c'est-à-dire une nouvelle culture normative représentant l'état de la société où la solidarité serait très forte et les liens sociaux très solides. Elle permet, à cet effet, d?avantager l'intégration plus humaine des individus, par leur attachement à la société et leur participation active à la vie sociale pour mieux respecter et sauvegarder le bien et la règle sociale. Cette cohésion sociale n'est qu'une dimension de la société permettant d'assurer le bien-être, tout en réduisant dans le même temps, les disparités et en évitant, par ailleurs, la marginalisation qui provoque la désintégration de la société par ses effets néfastes.

« Le respect de l'être, du bien, du milieu et de la loi n'est plus une norme, dans la société » Benallal

Notre propos portera sur la moralisation de la vie politique, cette thématique est bien trop large par ses dimensions, afin de cerner l'ensemble des concepts se rapportant à ce problème sociétal. Nous disons que la morale, en politique, dans un régime dit démocratique, nous fait penser, en premier lieu, à l'intégrité des représentants élus des peuples auxquels celui-ci a délégué le soin d'exercer, en son nom, le pouvoir de régenter la vie publique. Le constat réel, je ne vous citerai pas d'exemples, tellement les incohérences, les anomalies citées par les médias et en font leurs unes quotidiennement, car ceux qui détiennent le pouvoir, aujourd'hui, nous montrent qu'ils ont un déficit flagrant d'honnêteté, de droiture, de vertu, de sincérité, de foi et de conscience ne permettant guère d'être à la hauteur de la mission qui leur a été assignée. La morale de la vie politique et les valeurs universelles devront se synchroniser « synergiquement » avec l'état de droit de la République, la démocratie, la transparence et la souveraineté du peuple. Par ailleurs, la morale universelle celle des droits de l'Homme, de la justice naturelle renforce encore plus, le caractère républicain.

« Que la morale fasse partie d'une éducation publique commune à toutes les classes de citoyens. Que l'on écarte avec soin de cette éducation toute influence sacerdotale. » Condorcet.

La moralisation de la vie politique est une action de grande envergure (révolution, à long terme, entrant dans le cadre d'un projet de société, tout en permettant de rendre plus conforme à la morale, à l'éthique, à la déontologie et à la probité). La moralisation de façon générale correspond à un processus d'apprentissage et d'inculcation de normes, de règles et de valeurs morales, associant toutes les notions dites de bien et de mal, dans tous les segments de la société.

Les différentes affaires mettant en cause des hommes politiques ( affaire Khalifa, Sonatrach, Autoroute Est-Ouest et bien d'autres, portant sur les marchés publics ?.) ont relancé un débat informel quotidien, dans la rue, dans les médias, dans les réseaux sociaux? sur la moralisation de la vie politique pour prévenir les conflits d'intérêts, le contrôle de déclaration de patrimoine des principaux responsables des pouvoirs publics, le népotisme et le favoritisme politique (octroi de contrats ou nomination à des postes de responsabilité, un ministre ou un wali qui ramène avec lui sa propre équipe dirigeante) l'indépendance de la justice et la séparation des pouvoirs et enfin, mettre en place une charte déontologique de la vie politique, afin de faire respecter les règles de neutralité et d'impartialité par le biais de lois relatives à la transparence de la vie publique, mettant en œuvre plusieurs mesures

Les premiers dirigeants de ce pays sont, à ce jour, incapables de mettre en œuvre des mécanismes réglementaires pratiques se rapportant aux dispositions contenues dans la Constitution algérienne, pour mieux régenter le contexte social et politique car les manifestations de conflits d'intérêts empêchent cette action d'assainissement et creusent l'écart entre la théorie constitutionnelle et la pratique des actions quotidiennes.

« Ouvrir une école, c'est fermer une prison » Victor Hugo

Par idée première de la morale, en général, il faut entendre les mœurs d'une société (mode de société) désignant les comportements, les usages et la conduite morale qui lui sont propres et qui devront être normalisés à travers nos coutumes, notre religion par des règles de civilité et de droit. Les bonnes mœurs sont des attitudes et comportements conformes à la norme sociale. Cette dernière représente l'ensemble des règles de bonne conduite qu'il convient de suivre dans un contexte social, elle peut être formelle, représentée par des lois et règlements ou informelle par le « tag ala men tag ! » Celle qui a pour but de garantir le bien- être, le bien-vivre, le bien-faire, pour le bien social dans un cadre où travail, la discipline et l'ordre social permettent de faire actionner le système social, de façon harmonieuse et de ce fait, ne font que consolider la cohésion sociale.

Les normes sociales et les règles de conduite qu'il convient de suivre, au sein de la société, l'individu les acquiert par un processus de socialisation, c'est-à-dire, par un apprentissage progressif, en premier lieu, dans la famille, suivie de l'école et enfin dans la vie d'adulte. Ces trois ensembles devront être suivis, minutieusement, pour assurer le véritable « homme social » et non de faire de l'école une coquille vide pour le gardiennage. Le respect de la norme sociale contribue fortement, à la cohésion sociale où les synergies de par ses composantes, s'harmonisent et ont pour but et effet de produire le véritable « citoyen » de la cité. Cette cohésion favorise l'intégration des individus, leur attachement à la société et leur participation à la vie sociale , le non-respect de la norme sociale fait de l'individu et non du citoyen, un « anormal » qualifié par « l'Algérien » de : « c'est normal » ( sens péjoratif) puisque le système social démuni de normes conceptuelles ( intégration, attachement, participation?), refuse de le placer à la marge de la société pour être, enfin, sanctionner.

« L'homme de bien naît en lui le sens de la loi, l'homme du mal ne pense qu'au privilège » Citation

Les règles morales visent au perfectionnement de l'homme, tout en lui suggérant la justesse des choses, des actions, des faits et des événements, ces règles de morale doivent être distinguées des règles de droit. Ces derniers ont pour objectif l'ordre social et ont un caractère obligatoire assorti de sanctions par une puissance publique impartiale. Par contre la morale n'est pas suffisante pour empêcher l'infraction et obliger l'auteur à réparer les conséquences.

« Le droit tente l'organisation de la société et contribue à assurer l'ordre et la discipline du cadre social de la cité ». Benallal

Par ailleurs nous pourront ; éventuellement ; confirmer qu'une société , dite civilisée, dans le sens où elle est équipée, balisée et armée par des étalons sociaux économiques et politiques lui permettant de fonctionner, harmonieusement et efficacement, grâce à une bonne gouvernance et à travers une transparence de verre, par des actions conformes à la règle de droit, à la morale, à l'éthique et à la charte déontologique.

Devant cet état sociétal, le mérite revient à l'effort des individus qui arrivent à surmonter les difficultés de la vie courante, par un sens du « devoir », toujours positif (sens économique, social, politique, culturel, et sportif.), et par une aspiration au mieux-être et au bien-être de la société, c'est un bien pour l'intérêt général de la société ou le pays en général qui fait partie intégrante du « projet de société ».

Le mérite du latin « meritum » veut dire « gain, salaire » ce dont est digne, le mérite est ce qui rend un individu en récompense de sa conduite, face aux obstacles surmontés, digne d'estime de considération et d'éloge. Le mérite résulte aussi, de diverses qualités morales, intellectuelles ou physiques, il implique un effort pour franchir les obstacles et les difficultés. De façon générale, le mérite d'une personne désigne l'ensemble de ses qualités.

«L'évanescence de la pensée politique et déliquescence du système économique n'ont pas de place dans le système méritocratique» Benallal

Ce système de bonne gestion, de la bonne gouvernance est appelé la « méritocratie », il met en valeur les individus méritants par classe, par leur grandeur, leur probité, leur honneur, leur talent? Ce sont des qualités qui distinguent l'organisation des sociétés dites civilisées ou modernes. Les gens utiles sont reconnus, en fonction de l'effort intellectuel et physique, de leur créativité, de leur intelligence, de leur aptitude scientifique et technique. Dans les sociétés où la référence en valeur morale et mérite et les étalons sociaux, ne sont pas tenus en référentiel, le clientélisme, le clanisme, le ?bniaamisme'? pourrissent la société, par effet, de malversation, perversion et déliquescence. La mise en application impartiale des références, aux étalons sociaux , font la différence entre les sociétés qui avancent et celles qui reculent. Les pays avancés fonctionnent suivant un système référentiel qu'il soit politique, social et économique où les privilèges et le pouvoir sont obtenus par le mérite de la qualité du travail et de l'effort ; ce système est appelé la « méritocratie ». Ce système est fondé sur la reconnaissance de la valeur par les diplômes, l'expérience, les qualités et les vertus?. En effet la « méritocratie » a pour assise l'égalité des chances où la corruption, le clanisme et le clientélisme ne trouvent pas place et sont ostracisés; la liberté individuelle et la reconnaissance de la réussite sont les piliers de la « méritocratie ». Dans ce système, le pouvoir est exercé par les meilleurs, les plus méritants et les plus aptes où la médiocrité et l'incompétence ne trouvent pas place.

-http://www.liberation.fr/elections-presidentielle-legislatives-moralisation-de-la-vie-politique-les-trois-piliers-d-une-reforme-d-envergureLe

-Choc des civilisations Samuel P. Huntington