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Bonjour, fraude

par Mahdi Boukhalfa

La fraude sur la pomme de terre, est-ce possible?

Pourquoi pas, diriez-vous. Et, puisqu'on y est, il y a également la tomate, l'orange ou les radis, les choux et les concombres. C'est comme si toute la sphère du commerce des produits alimentaires s'est immobilisée, instantanément, et s'est vidée de ses contenus, en un éclair. Du jour au lendemain, plus rien, plus de patates, plus de tomates, plus de fruits dans le panier des Algériens. Pourquoi ? Selon les grossistes des fruits et légumes, ils ont été raflés par des extraterrestres.

C'est une histoire, terriblement vraie, que les Algériens endurent depuis le début du mois de mars, ou la fin du mois de février, c'est selon. L'explication est, donc, venue de ceux qui traitent en quantités industrielles, quotidiennement, les produits agricoles, et elle peut être résumée en un mot: fraude.

Il y a eu fraude dans les circuits commerciaux, peu importe les auteurs, ils se reconnaîtront, même si les services du Commerce restent «zen», et tiennent mordicus à la sempiternelle loi du marché, celle de l'offre et la demande. Pour connaître, donc, la vérité sur ce qui se passe, ces derniers jours, sur les marchés des fruits et légumes, dans un contexte de luttes acharnées, pour les listes électorales, en prévision des législatives de mai prochain, il faudrait, peut-être, aller voir le film «Le jour d'après», et attendre. Au mieux dix ans, au pire 20 ans. Comme vient de le faire un ancien chef de gouvernement, au sujet de la fraude qui aurait permis au RND de remporter les législatives de 1997. Cet ancien chef de gouvernement, donc, militant du RND, a affirmé dans des déclarations à la presse que ce parti avait fraudé pour gagner ces législatives. Mais il le dit, aujourd'hui, 20 ans après les faits. Et il va jusqu'à affirmer, toujours 20 ans après, dans des déclarations, à la presse nationale, que les résultats de ces élections, les premières, après l'arrêt du processus électoral en 1992, étaient « un scandale en matière de fraude. Ce ne sont pas des paroles mais des faits que j'ai vécus », affirme-t-il. Bien, il a vécu tout çà, et il a attendu, tout ce temps, pour le dire aux Algériens ?

Et pourquoi maintenant? A n'en pas douter, nos politiques auraient perdu le sens des réalités sociales, peut-être depuis longtemps. Et quand, au sein du petit peuple, on se fait des frayeurs sur des lendemains difficiles avec cette mode du «Takachoff», d'autres osent parler, encore, de fraude électorale, de complots ourdis. Et assimilent toujours leurs lubies personnelles, à des années lumières des préoccupations des Algériens, à l'Etat, celui de tous les Algériens, qu'ils veulent monopoliser.

Sinon, comment ne pas avoir, à l'esprit, cette fraude que tout le monde désigne du doigt, sans jamais la faire disparaître ? Les tenants des « complots ourdis » sortent les griffes ces derniers jours, tirent sur des ombres, d'autres parlent 20 ans après de fraudes massives, mais, pourquoi aujourd'hui ? Parler de fraude en ce moment de disette de tout, n'est vraiment pas indiqué pour mobiliser les électeurs, ni donner de la confiance pour les lendemains qui s'annoncent difficiles, n'est-ce pas?