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BDS

par Bouchan Hadj-Chikh

13 septembre 1993, Yasser Arafat et Yitzhak Rabin signent les accords de Washington. Rabin déclare dans son discours : «Laissez-moi vous dire, Palestiniens, nous sommes destinés à vivre ensemble sur le même sol de la même terre».

Je pensais à cette déclaration en visionnant les scènes, toutes récentes, de l'occupation de la Palestine par l'armée d'occupation. Les provocations, les exactions délibérées de soldats contre les palestiniens.

Femmes ou hommes, jeunes garçons ou jeunes filles. Les brutalités qu'ils ne cachent plus. Comme hier les nazis contre ceux qui portaient l'étoile jaune sur leur poitrine. Leurs parents.

Il y a aussi ces photos de jeunes, à peine sorti de l'adolescence, «abattus», comme ils disent. En Palestine, on ne tire pas dans les jambes pour blesser. On ne vise pas la poitrine. On vise la tête ou le coeur pour tuer. Dans leurs photos, vivants, ces jeunes sont souriants. Leurs photos d'après les montre gisant dans une mare de sang. Il se pourrait que le père du soldat meurtrier était au nombre des deux cents mille personnes qui étaient présentes pour saluer le discours de paix d'Yitzhak Rabin, le 4 Novembre 1995. Et assisté, à 21:50, au meurtre commis par Ygal Amir qui tira sur l'orateur par trois fois. Rabin venait de lancer, du haut de la tribune : «Moi qui ai fait la guerre, je sais qu'il y a aujourd'hui une chance pour la voie pacifique, et nous sommes tenus de l'exploiter».

La Paix ? Le blocage plutôt. L'asphyxie. Tous les présidents US qui s'en gargarisaient s'en sont lavés les mains devant les exigences sionistes.

 «Une année avant le terme de son mandat, le Président Obama ne fera certainement pas un pas en avant pour engager le processus de paix ou même mettre la pression sur» l'entité sioniste « pour stopper la colonisation. Tragiquement, il semble qu'il est déjà trop tard pour mettre en pratique la formule qui aurait eu la meilleure chance d'aboutir à une paix durable : deux Etats indépendant vivant l'un à coté de l'autre» écrit le New York Times dans son éditorial publié le 22 Janvier dernier.

Cette conclusion, c'est celle à laquelle a abouti l'ancien correspondant de la deuxième chaine de Télévision française, M. Charles Enderlin, en conclusion de trente années de couverture de la Palestine. Dans un entretien publié le 25 Juillet 2015 il déclarait : « Il n'y aura pas deux Etats. Les 400.000 colons israéliens ne seront pas évacués de Cisjordanie. Les Israéliens ne sont pas prêts à renoncer à Jérusalem-Est et au Mont du Temple (Esplanade des Mosquées pour les musulmans) et la direction palestinienne non plus ».

Tout leur est permis, tous les viols des règles et des conventions.

Il déplaisait à M. Natanayhu. Le chef de la commission d'enquête de l'ONU sur la dernière guerre à Gaza, le juge Canadien William Schabas, a été contraint à la démission fin janvier 2015. Il avait affirmé, après enquête, «que le dirigeant qu'il préférerait voir devant la Cour pénale internationale (CPI) était Benyamin Netanyahou». On attendra, sans illusion, les conclusions du rapport que les trois experts, qu'il dirigeait, doivent produire le 23 mars sur les 50 jours de conflit qui ont fait en juillet et août près de 2 200 morts côté palestinien, en grande majorité des civils, et plus de 70 côté israélien, tous des soldats. Si la juge américain, Mme Mc Gowan, qui a remplacé M. Schabas, les y autorise.

Cette démission a suivi celle du rapporteur spécial de l'ONU sur les territoires palestiniens. Lui aussi, enquêtant sur la situation des droits de l'Homme dans les territoires palestiniens occupés, a présenté lundi sa démission. Il ne fut jamais autorisé à pénétrer dans ces territoires, a annoncé l'ONU. Il quittera ses fonctions le 31 mars, à la fin de la prochaine session du Conseil des droits de l'Homme (29 février au 24 mars), devant lequel l'expert présentera son dernier rapport. Il avait pris ses fonctions en juin 2014, succédant à l'américain Richard Falk qui n'avait pas non plus été autorisé à se rendre dans les territoires palestiniens.

En juin 2015, Emmanuel Nahshon, porte-parole du «ministère» des Affaires étrangères des forces d'occupation avait expliqué à l'AFP que son pays n'avait pas permis la visite de M. Wibisono dans les territoires occupés. Celle-ci est possible «avec toutes les commissions internationales et tous les rapporteurs sauf quand le mandat qui leur est confié est d'avance anti-israélien et qu'Israël n'a aucune chance d'être entendu».

Deux crans au dessus. Puisque tout est permis.

Mardi 26 janvier, M. Netanyahu accuse carrément le pourtant bien terne secrétaire général des Nations Unis, M. Ben Ki Moon, de partialité. Ce délire collectif a conduit à l'appel au meurtre du ministre suédois des affaires étrangères, Mme Margot Walllström. M. ZviZameret la désignait en victime expiatoire, dans le journal Makor Rishon (« De bonne source ») parce qu'elle est coupable d'avoir dénoncé les exécutions extra-judiciaires de Palestiniens. L'organe, si on peut l'appeler ainsi, est financé par Sheldon Adelson, le magnat américain des casinos, parrain de Netanyahou. Et la maffia US, comme il va de soi. Elle est, écrit-il, une « antisémite, tout comme l'était Bernadotte. Et je suis convaincu qu'elle connaîtra le même sort». C'est dit.

Que dit la communauté internationale ? Elle se débat avec le chaos qu'elle a créé dans le monde arabe qui, lui, se mange les entrailles.

Plus de communauté internationale, de gouvernants arabes, de Nations Unies.

Ces dernières semaines, chaque jour que Dieu a fait, des jeunes filles, des jeunes gens ont attaqué, au couteau, des militaires armés, sachant bien qu'ils allaient au suicide. Le drapeau de l'Etat Palestinien a beau flotter au mât des immeubles des Nations Unies, les reconnaissances officielles se multiplier, rien n'y fait.

Ou rien ne semble y faire.

Le peu d'humanité vient d'ailleurs.

Rescapée des camps nazis, Mme Janina Heschelesdit: «Notre passé tragique ne nous donne pas le droit de confisquer des terres, détruire des maisons, déraciner des oliviers qui ont été cultivés pendant des générations. Ceux qui le font contribuent à minimiser l'holocauste ». Pas seulement le minimiser. Curieusement, il arrive que les torturés d'hier font d'excellents tortionnaires. Les voix pour la paix, de « la paix maintenant » qui ont organisé le rally au cours duquel tombait M. Rabin ne sont plus audibles.

L'ancien ministre des Affaires étrangères et premier ministre de Jacques Chirac, M. Villepin prend la plume pour écrire dans «le Figaro»: «Comment comprendre que la première réaction de la France, par la voix de son président, soit celle du soutien sans réserve à la politique de sécurité d'Israël? Quelle impasse pour la France que cet esprit d'alignement et de soutien au recours à la force». Il ajoute : «Cette stratégie terrifiante» ?»condamne les Palestiniens au sous-développement et à la souffrance, terrifiante parce qu'elle condamne» leurs occupants» peu à peu à devenir un État ségrégationniste, militariste et autoritaire».

«C'est la spirale de l'Afrique du Sud de l'apartheid (?) faite de répression violente, d'iniquité et de bantoustans humiliants».

Il propose :

«Le premier outil pour réveiller la société (...) ce sont les sanctions. Il faut la placer devant ses responsabilités historiques avant qu'il ne soit trop tard (...) cela passe par un vote par le Conseil de sécurité de l'ONU d'une résolution» condamnant «le non-respect des résolutions antérieures et son non-respect du droit humanitaire et du droit de la guerre.».

Illusion. Avec le veto américain au bout ?

Il poursuit : «à défaut de pouvoir négocier une solution, il faut l'imposer par la mise sous mandat de l'ONU de Gaza, de la Cisjordanie et de Jérusalem Est, avec une administration et une force de paix internationales.»

Belles paroles. Mais une bien chimérique utopie.

Au nom de l'holocauste le sionisme peut moudre du palestinien. La politique de la main tendue n'a rien donné. Elle fut coupée par les tenants actuels du pouvoir. Le roi Hussein de Jordanie à parcouru en voiture, aux vitres sombres, le boulevard Jobotinsky à Tel Aviv, dans les années 60, en pleine crise. Le président Sadate y a fait une visite officielle en novembre 1977. Le Président de l'OLP, M. Yasser Arafat a signé des accords d'Oslo le 13 septembre 1993, complétés le 4 mai 1994 de l'Accord de Jéricho-Gazainvestissant l'Autorité nationale palestinienne de pouvoirs limités. Enfin, l'accord intérimaire sur la Cisjordanie et Gaza, cet « Accord de Taba », fut paraphé à Washington le 28 septembre 1995, ouvrant la voie aux premières élections du Conseil Législatif Palestinien.

Des « états » arabes échangent même des ambassadeurs avec l'oppresseur.

Le piège avec, au bout, la Moukataa et Arafat assiégés.

Pieds et poings liés. Rien en retour.

A la suite de chaque effort unilatérale, une réduction du territoire palestinien est imposée par l'ONU. Après 1948. Ligne de cessez le feu déplacée, contre gain de territoire, par la force des armes, en 1956. Comme en 1967. Provocation, guerre, occupation. Rétrocession, certes, du Sinaï à l'Egypte. Mais perpétuation de la colonisation de la Cisjordanie et du Golan.

Aujourd'hui, le partage de 1948personne n'en parle, celui que la communauté internationale a sang-sioné. Parce qu'il ne reste que des confettis de terres ici et là.

Encore moins d'une Palestine démocratique.

Cela explique le suicide d'une génération sans repaires, sans espoir.

Que reste-t-il à faire pour que le peuple palestinien recouvre ses droits ?

Le boycott. Total. Non pas par les Nations Unies. Ca ne prendra jamais. Plutôt en appeler à la communauté humaine, par delà leurs gouvernements, de prêter une main forte aux «prisonniers» de la Palestine éternelle. Comme cela se pratique déjà. Pour qu'un peuple, une terre, un drapeau, une autorité soient enfin reconnus.

Les trois milliards de dollars alloués annuellement à l'entité sioniste par les Etats Unis ne feront pas le poids. Ni les ogives nucléaires produites à Dimona grâce à la contribution scientifique de la France dès 1956.

Des Nations Unies, il n'y a rien à attendre. Créée lors de la conférence de San Francisco, dont le document fut signé 26 Juin 1945 et entrée en vigeur le 24 Octobre de la même année, cette organisation est née dans le péché. C'est elle qui désavoua ses principes trois années plus tard, le 29 Novembre 1947, quand son Assemblée générale adopta la scélérate résolution 181 ouvrant la voie à la création d'un État juif en Palestine.