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Sarkozy étale son «szar» à Tunis

par Omar Chaalal *

Je commence mes idées par un passage du livre le «Suicide français» d'Éric Zemmour, sorti en 2014. « La France est l'homme malade de l'Europe. Les économistes évaluent sa perte de compétitivité. Les essayistes dissertent sur son déclin.

Les diplomates et les soldats se plaignent, en silence, de son déclassement stratégique. Les psychologues s'alarment de son pessimisme. Les sondeurs mesurent son désespoir. Les belles âmes dénoncent son repli sur soi. Les jeunes diplômés s'exilent. Les étrangers les plus francophiles s'inquiètent de la dégradation de son école, de sa culture, de sa langue, de ses paysages, de sa cuisine même. La France fait peur ; la France se fait peur. La France est, de moins en moins, aimable ; la France ne s'aime plus. La douce France vire à la France amère ; malheureux comme Dieu en France »

Rien de plus mauvais qu'une situation laissée au point mort. Une situation resplendit par le reflet du tableau suicide français. Le point mort politique signale l'absence d'énergie, sur la scène politique internationale et notre incapacité de répondre, à temps, à une critique destructive. Le silence fait apparaître la faiblesse et l'énergie insuffisante, dans la diplomatie. Se défendre rapidement, en remettant les choses à leurs places, empêche, les comédiens de la politique, de monter les pressions inutiles chez nous. Rappeler à l'ordre est le meilleur moyen d'empêcher les acolytes de Saïd (Saïd était président du FAF ?Front Algérie française'. Monsieur Saïd est de Souk Ahras, connu sous le nom de Bachagha Boualam), d'accrocher le tableau peint par Éric Zemmour, chez nous.

Les connaisseurs qui contemplent ce tableau constatent qu'il n'y a pas de diplomatie, sans exercice de la raison. Outre ses usages conceptuel et pratique, la raison diplomatique a, également, une fonction critique.

C'est, cet effet critique de la diplomatie qu'il s'agit de restituer, dans une atmosphère claire, chez nous. La clarté permet, à nos diplomates, de prendre une position sur des questions d'actualité qui se jouent dans le monde. Inutile de dire que les Algériens aiment voir une classe de diplomates, respectueuse, dont la vision est claire. Une classe de diplomates de métier qui sait dire non quand les objectifs politiques sont flous et mal définis ou, tout simplement, quand les intérêts de la Nation sont touchés.

Peu importe les provenances des personnes qui constituent la classe politique qui décide, le plus important est l'alternance dans la gouvernance. L'alternance va mettre fin à la politique boiteuse et pas assez intelligente qui ne représente point la bravoure du peuple algérien. L'alternance mettra en place une classe de diplomates forts et dégourdis. Cette classe de diplomates déterminera une position claire vis-à-vis de cette France qui essaye d'accrocher son tableau suicide chez nous. Hélas ! Notre tableau politique représente un paysage décevant : quand Sellal prend un ton sérieux vis-à-vis de l'Education, Benghebrit rigole.

Si Benghebrit est à la recherche du sérieux, nous avons des exemples concrets, dans notre histoire politique. Je me réfère au ?Monde' du 18.04.2014 ; ce journal donne un exemple vivant du sérieux : « Un dirigeant capable d'exercer un commandement éclairé, qui jouirait de la confiance de la population et qui, caractéristique essentielle, disposerait d'une autorité morale avérée sur l'Armée et les Services de renseignement.

Cet homme qui existe a pour nom Liamine Zeroual. Homme moral plutôt qu'homme politique, il est habité par l'amour de la Patrie. Réfractaire aux honneurs officiels, il s'éloigne de tout ce qui peut l'en rapprocher.

Il faut espérer que le soldat qui sommeille en lui, se réveille. Le destin de l'Algérie est entre les mains de cet officier général, en retraite, dont le peuple algérien attend un sacrifice ultime».

L'homme de la rue se rappelle de cet homme. Il sait que cet homme a refusé de serrer la main au Président Jacques Chirac quand ce dernier voulait lui donner conseil, concernant la gestion de la Nation, pendant la décennie rouge. A cette époque les caisses de l'Etat étaient vides et le terrorisme coupait les têtes, comme des choux-fleurs.

Le 3 juillet est le jour d'anniversaire de Liamine Zéroual. En ce jour, Liamine reçoit une délégation d'enfants de chouhada. Cette délégation, s'est dirigée vers Liamine pour lui demander de se porter candidat, à la présidentielle de 2014. Après une discussion qui a duré trois heures, Liamine Zéroual fond en larmes et dit : « en me proposant de faire un nouveau mandat, vous me faites honneur. Je devrais, en principe, sauter de joie. Mais je suis triste, très triste pour l'Algérie que vous me proposiez de revenir au pouvoir après que je l'ai quitté, en 1999. Mes enfants, j'ai 72 ans. Même avec toutes les bonnes volontés du monde, un président âgé et malade ne peut accomplir, convenablement, ses missions. L'Algérie a des jeunes, il faut qu'on leur donne l'occasion de prendre le pouvoir, comme l'a fait Barack Obama.»

Malgré ses cadres compétents, aujourd'hui, le navire de la diplomatie algérienne est conduit par deux matelots. La chaloupe diplomatique ne reconnaît plus sa direction, dans cette mer agitée et ne sait plus sur quel port doit-elle accoster. D'un côté, un matelot, reste des restes, un pécheur d'opportunités qui voit les choses à la manière d'un mignon Soudanais. De l'autre côté, Lamamra avec son expérience de diplomate solide et son sourire de sympathie permanente, ne sachant quoi faire, dans un ermitage diplomatique détruit par les fantômes et le Fantômas qui rôdent autour du grand château d'El Mouradia.

C'est malheureux de dire la vérité. La diplomatie algérienne tend vers la perte de son respect et sa crédibilité. Je me réfère aux paroles du politologue Mohamed Chafik Mesbah. Il décrit bien la diplomatie algérienne. Chafik Mesbah disait, en juillet 2013, quand Mourad Medelci était ministre des AE « J'ai, parmi, mes amis des diplomates chevronnés mais je sais, malheureusement, qu'ils ont les mains liées?

Cette situation qui fait que l'Algérie, impuissante, n'arrive plus à faire valoir ses positions sur des processus qui se déroulent à ses frontières est, tout à fait, inédite. Boumediene était, certes, autoritaire mais, en son temps, il y avait un consensus. Boumediene n'aurait jamais été pris au dépourvu par la crise libyenne ou malienne. Le président défunt adoptait, toujours, une position conforme aux intérêts du pays»

Les cris de Nicolas Sarkozy sur les toits tunisiens ont provoqué le doute, la confusion et la rage, dans la rue algérienne. Comme un professeur de géographie qui ignore ou fait semblant de méconnaître l'histoire du Maghreb, Sarkozy accompagne ses grimaces par une phrase « La Tunisie est frontalière avec l'Algérie (et) avec la Libye. Ce n'est pas nouveau... Vous n'avez pas choisi votre emplacement ». Dans son cours géopolitique, plein de dérives langagières, Nicolas nous rappelle les pieds noirs qui ont colonisé notre pays. Ses grimaces nous laissent lire une mémoire coloniale, bien enfoncée dans la boue libyenne. Je vous informe que ce professeur mercenaire est payé à l'heure, pour crier haut, ce que M6 lui souffle, tout bas, dans la résidence sarkozienne, à Marrakech. Sans doute, les mains de Sarkozy, de BHL et leur ami le roi, sont derrière les mains qui remuent les cendres, à Ghardaïa.

Regardons un peu en arrière et essayons de comprendre les propos de Sarkozy.

Le 11 septembre 2011 Sarkozy expliquait sa politique, vis-à-vis du ?printemps arabe', lors des commémorations des attentats du ?World Trade Center' : « La plus belle réponse à ces assassinats, en masse, et à ces assassins, c'est la libération des peuples arabes autour des valeurs qu'ont toujours incarnées, l'Amérique et la France : la démocratie. » Derrière ses paroles se cachent d'autres paroles prononcées le 1er septembre 2011, après la réception à l'Elysée, des représentants de soixante pays pour organiser le soutien à la rébellion, la décision de dégeler des avoirs du régime déchu, pour les mettre à la disposition du CNT.

Sarkozy pensait que sa politique de guerre placera la France, en bonne position, sur le marché libyen. Sarkozy voulait mener une politique globale dans l'espace du Maghreb, du Maroc à la Libye? même si l'Histoire pèse sur les relations avec l'Algérie. La politique globale de Sarkozy a transformé ce CNT en TNT.

En 2011, Nicolas Sarkozy était impatient, brouillon et pressé d'en finir avec son sponsor. Sarkozy transforma le désert libyen, en poudrière, en parachutant des dizaines de tonnes d'armes, à destination des rebelles combattants Kadhafi.

Cette année, le 22 juin 2015, Sarkozy déclare, à partir du Maroc ; «Le roi conduit son pays vers la modernité, tout en préservant son identité. C'est l'intérêt de tout le monde, qu'il réussisse, et il est, absolument, stratégique que le Maroc et la France entretiennent des relations de confiance?». Un mois après cette visite, Sarkozy se trouve en Tunisie. Dans ses cris il disait « L'Algérie, qu'en sera-t-il dans l'avenir, de son développement, de sa situation ? C'est un sujet qui, me semble-t-il, doit être traité dans le cadre de l'Union pour la Méditerranée ». Les grimaces forcées de Sarkozy agrémentent son projet de déstabilisation de notre pays. Sarkozy oublie que les enjeux des grimaces politiques dans un endroit trop fragile peuvent provoquer la disparition de la Tunisie, dans la nouvelle carte géopolitique du nouveau monde arabe.

Le ton ironique et moqueur de Sarkozy dérange les jeunes étudiants de Sciences politiques, à l'Université algérienne. Pour éviter le pire, certains Algériens demandent à nos responsables de définir les conditions d'une réponse ferme et claire. D'autres pensent qu'il faut suivre l'exemple de la Grèce et demander, au peuple algérien, de trancher, une fois pour toutes, sur les relations entre l'Algérie et la France.

A défaut d'un Boumediene ou d'un Zéroual, les jeunes cherchent une Hatshepsout. Hatshepsout était une « pharaonne » qui se faisait représenter en pharaon. Pour renforcer son pouvoir et ne pas heurter les traditions égyptiennes Hatshepsout se représentait, sous l'allure d'un homme, habillée en costume d'homme avec des moustaches artificielles, traditionnellement, portées par les pharaons. Les jeunes demandent à Louisa Hannoune de cesser de critiquer Ouyahia et de faire comme la reine Hatshepsout. Elle doit tirer ses moustaches vers le haut et répondre à Sarkozy.

En conclusion : Désespérés par l'impuissance de nos élus, les jeunes pensent aux hommes qui ont libéré l'Algérie et disent «Les élus ont tout oublié. Certains ont rasé les moustaches, la barbe, le corps et l'honneur. Les autres ne font rien, mais pensent que le roi du Maroc est «Sarkozy» jusqu'au cou». Pour comprendre le sens du mot « Sarkozy » chez nos jeunes, je me réfère à un passage de ?Charlie hebdo' intitulé « Sarkozy fait se marrer les Hongrois ».

Les journalistes de l'Hebdo sont allés voir les ressortissants hongrois, vivant en France, afin de trouver la réponse à cette question : que signifie « Sarkozy », notre héros étant, comme chacun sait, d'origine magyare. On apprend que son nom se prononce « char-köz-y » en hongrois et signifie « un lieu entouré de boue ». Il proviendrait de la ville hongroise de Sarköze, bâtie, effectivement sur des marécages. Mais ce qui fait le plus marrer les Hongrois c'est la prononciation de son nom, à la française : « Sar-koz-y ». En effet, le phonème « Sar » signifie « merde », en hongrois (qui s'écrit en fait « szar »). Et l'on apprend que « Sarkozy », prononcé à la française, signifie, littéralement « dans la merde ! »

*Ancien Censeur