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Qui va payer ?

par Mimi Massiva

Question stupide, mais elle est la seule à s'imposer à un cerveau reptilien. Les payeurs au berceau honoreront la dette quitte à « dégager » en s'immolant. Qui va payer par exemple le péage de l'autoroute prévu l'année prochaine si Dieu garde en vie une bonne partie des conducteurs usagers de notre célèbre ligne-tombeau au millimètre le plus cher et le plus saboté au monde ? Ces millions de veinards qui font le bonheur de Renault et compagnie afin de rouler à 80 km/h dans l'habitacle en zinc chromé d'Est en Ouest. Avec le rare privilège de ralentir aux vrais barrages qui les protègent des faux qui n'existent plus, selon la version officielle. « Pourquoi c'est les pauvres qui paient ? Parce qu'ils sont les plus nombreux ». N'est-ce pas plutôt à ceux que le génie du goudron a enrichis en millions d'euros ? Ceux qui bronzent sur le sable doré des îles paradisiaques à des milliers de kilomètres d'Alger qui a été blanche de naissance, rouge pour la liberté avant de finir noircie par ses crimes ? Pas rancunière, l'ogresse maboule les accueillera un jour comme leurs aînés avec des youyous, des versets, hymne et drapeau national, avant de les enterrer en héros dans ses entrailles au cimetière d'El-Alia, l'Elevée, la Grande. C'est Chadli qui nous a libérés des sables dorés de la côte surtout celle de Zeralda où niche le palais présidentiel qui a horrifié par son luxe le pauvre Boudiaf. Cité interdite qui a interdit aux Zeraldéens leur unique forêt, saint compris. Pour un vieux saint perdu quelque part, à la baraka douteuse, mille flambants neufs retrouvés sans sortir de chez soi grâce au ronronnement des médias autorisés.

En résumé, les bougnouls qui ont la chance de posséder une voiture vont payer, pas besoin d'une boule de cristal pour l'affirmer. La question reste posée : dans un péage, on paie la construction du chef-d'œuvre ou les services qu'il offre à part le permis de circuler ? Puisque l'autoroute algérienne est vraiment unique à l'image du FLN, du FIS et tous les partis opposés entre eux, assimilés, dilués et flashés par l'Unique et ses sœurettes sous l'œil bienveillant d'un Raïs Highlander. Au point où on se demande si l'arnaque justement ne vient pas du nom. Où sont les aires de détente, les jeux pour les enfants, les toilettes propres non payantes, les téléphones parsemés comme des coquillages et le tapis volant de l'asphalte immaculé ? Comment payer quand on pense au bakchich de 2 % gonflé exceptionnellement jusqu'à 20 % et 25 % pour le bled de la Révolution : l'Algérie. On ne parle plus de morale quand il s'agit de la corruption, le plus vieux vice du monde, mais de calamités sociales économiques et environnementales. Rares sont les pays qui boudent le pot-de-vin. On constate tout de même que moins il est important, mieux se portent les habitants qui en sont victimes. Quand on entend parler de procès « pour-boire » par exemple en France, en Israël?, c'est toujours des sommes qui ne dépassent pas quelques dizaines de milliers d'euros, voire de centaines. Chez nous, la « tchipa » se chiffre en millions pour le Parrain, c'est un code de l'honneur à ne jamais transgresser. Les centaines c'est pour le bras droit et le bras gauche, les dizaines pour le garde du corps, le chauffeur et la bonne à tout faire. Tout un monde de coquins et de coquines à engraisser à tous les étages jusqu'à protéger le sommet pyramidal d'une catastrophe nucléaire. On comprend pourquoi l'autoroute Est-Ouest est un vrai miracle inversé. Non seulement elle tue plus que la normale, mais elle a englouti l'argent qui aurait pu acheter des ambulances, des appareils pour handicapés, pour construire des hôpitaux qui auraient au moins sauvé les blessés légers? On comprend pourquoi il n'y aura jamais de procès en Algérie ni ailleurs pour ces rapaces d'un nouveau genre. Des sommes tellement astronomiques que l'arrosage est garanti même sur le sol martien. Il suffit de scanner leur sourire carnassier chargé de mépris. Leur assurance diabolique quand ils s'adressent à travers les médias à la foule pour leurs leçons de morale, de nationalisme, de religion usant et abusant du ciel tels des prophètes visités la veille par l'Ange Gabriel. Tout en disant sans le dire : « C'est nous les chefs ! C'est votre mektoub. Vous allez payer. Vous n'avez que le choix de baiser nos souliers en étouffant dans votre poussière ».

Dans son livre « Corruption et démocratie en Algérie », Djillali Hadjadj écrit : « un industriel français a confié à Eric Laurent qu'il n'a jamais vu « une nomenklatura si avide et si peu soucieuse des intérêts de son pays. À un moment, le responsable de l'Office algérien des céréales, et le cas n'est pas isolé, réclamait 25 % de commission à ses négociateurs occidentaux, au lieu des 2 % traditionnels. C'était un véritable pillage ». Mais le couple est indissociable du corrupteur avec le corrompu : qui a appris quoi de qui, dans ces bonnes vieilles relations franco-algériennes ? » Erreur, le couple corrupteur-corrompu est bien dissociable. C'est élémentaire : l'un travaille pour son profit et celui de son pays, l'autre pour son profit et contre son pays. Si la France pouvait se confondre avec l'Algérie, les demandeurs de visas et les harraga seront les premiers avertis. Prenons l'exemple du blé, l'Egypte est le premier importateur, l'Algérie le second. Est-ce qu'on peut affirmer sans rire que le pain vendu au Caire a la même qualité que celui vendu à Alger ? Par quelle magie peut-on multiplier par 10 le bakchich sans magouiller à fond le mécanisme, sans nuire gravement à la santé des consommateurs ? Où s'arrêtent les dégâts quand le mektoub a ses propres statistiques et ses tribunaux spéciaux ? Tout a été fait pour ne rien savoir ou ne savoir que ce que distille le canal des arrosés et arroseurs. Il ne reste au petit peuple que la rumeur comme au temps des grottes. On a le choix entre le blé irradié, celui coloré en jaune sans oublier le périmé à vue, grouillant d'insectes cancérigènes que le Souk el Fellah du Parti imposait aux parasites pour qu'ils se goinfrent de leur aliment chéri, le pain.?On n'attend plus que la farine au ciment blanc vitaminée à l'arsenic. Le seul lien qui existe entre la France et l'Algérie est la circulation des « mécontents » de tous bords avec le maximum de valises. C'est l'autoroute d'Air Algérie à sens unique et prix conséquent, c'est la barque du passeur de 10 à 20 fois le billet de la « Couscoussière ». Pour le restant, les malchanceux, les rêveurs paralysés qui se vengent en émeutiers, en grévistes, en indicateurs toutes directions avant de finir par se lasser et rallier la majorité des zombies. C'est sans doute pour cela que les millions d'Algériens qui se trouvent en France ont plus de mal que les autres exilés à aimer la République bleu-blanc-rouge.

Ce n'est pas la pauvreté qui les a déracinés de leur sol natal c'est le jeu des politicards où ils se découvrent pions bien tardivement. Objectif : détruire une patrie en plombant l'autre. Ce n'est pas la théorie du complot, c'est la théorie du grand biologiste Ernst Mayr qui affirme grosso modo que plus l'intelligence est inférieure plus on a de chance de survivre et surtout de détruire. Combien de destructions de De Gaule à Hollande, de Ben Bella à Bouteflika dans les deux Républiques ? La France et l'Algérie gâtées par le pedigree paternel baignant dans les passions mafieuses, les névroses chroniques et les secrets d'Histoire cadenassés. Pour occuper le trône des deux côtés de la Méditerranée, on s'offre en prostituée au plus offrant sauf que dans l'Hexagone, la populace a échappé au coma à l'aide des antidépresseurs ?On ne connaît que trop l'histoire-blague du ministre africain ébloui par les tableaux de son homologue français. L'ex-colonisé ne peut s'empêcher de demander « comment ?». L'élu de France ouvre la fenêtre de son luxueux appartement, un sourire mystérieux flottant sur les lèvres. D'un doigt tremblant d'excitation, il désigne une splendide autoroute plongée dans un océan d'étoiles en lançant « comme ça ! ». Traduction : il a choisi le constructeur qui lui a offert un pourboire lui permettant de boire son champagne en admirant les murs richement décorés de son salon. Plusieurs mois plus tard, l'Africain exhibe un véritable palais des Mille et une Nuits à son compère abasourdi qui peine à murmurer à son tour « comment ? ». Le sultan ouvre la fenêtre et désigne en guise d'autoroute, le désert infini?On comprend pourquoi les potentats africains risquent plus d'être balayés, jugés par la Cour internationale de justice que leurs homologues algériens. Accaparer l'argent du projet pour se construire un château répertorié sur la carte nationale et visible par n'importe quel satellite, c'est fort risqué. Même le diable se perdrait dans la profusion des détails et leurres, spécialité des roitelets d'Alger. Un brouillage parfait qui a permis au Trésor algérien de perdre trois à quatre fois plus de milliards pour une œuvre inutile, meurtrière et condamnée aux travaux à perpétuité, bel héritage pour les générations à venir. Rien de visible à dénoncer, encore moins un palace au nom de la canaille. Pire, ce dernier est l'inventeur de la question assassine : « où est la preuve ? » On peut répliquer idiotement : « on n'a pas filmé la scène parce que le coupable, frappé d'amnésie, a oublié d'emmener les témoins... ». On peut jurer par contre qu'il n'y a aucune trace de palais de Tamanrasset à Alger, d'Oran à Annaba à moins que le génie de la bouteille soit impliqué dans le phénomène. Comparé au ministre africain, n'importe quel ministre algérien est un SDF hébergé au foyer-dortoir du Club des Pins. Ce qui explique pourquoi nos nababs fascinent tant leurs homologues africains jusqu'à leur offrir le poste de sages, nouvelle version sans doute de sorciers?

Qui va payer ? Ce n'est pas eux. Pourtant, les chiffres sont là, implacables, regroupant la plupart des sources disponibles. Pourquoi ne se contentent-ils pas comme tout le monde des 2 % de bakchich, pourquoi leur faut-il 18 à 23 % plus ? Cette différence a détruit le pays, a rempli ses cimetières, a éliminé toutes ses résistances, a atteint ses cerveaux, a bloqué la fuite vers d'autres horizons pour la nationalité devenue la plus détestable, la plus ridiculisée au monde : l'algérienne. L'économie se résume aux chiffres. Les chiffres se traduisent en argent et sans argent, on tend la main ou on se laisse mourir. Il n'y a plus d'animaux à chasser, plus de poissons à pêcher, plus de forêt aux fruits sauvages, plantes comestibles et surtout plus d'eau douce gratuitement. Maintenant, les plus en danger sont les enfants qui se bousculent pour naître dans cet enfer créé par ceux qui se donnent de l'excellence à tout va. Petits innocents à peine venus au monde et déjà suicidaires comme ces baleines qui s'échouent volontairement sur le rivage afin de peser sur les consciences ou lancer un cri d'alarme, qui sait ? 2 % suffisent à tous les corrompus sauf aux nôtres. Pourquoi ? Quel projet fabuleux sont-ils en train de concocter en douce pour sauver l'humanité qui aborde en écervelée des virages de plus en plus dangereux ? Néant. Sans doute espèrent-ils par le fruit de leur immonde razzia faire de leurs descendants des rois fainéants jusqu'à l'an 4000 au minimum. Pourtant, avec le 1 plus 1, le parachute dorée est assuré jusqu'à l'an 3000 ; 85 ans nous en séparent seulement, mais c'est la durée d'une vie confortable. 1000 ans ce n'est pas 1000 euros, il ne manquerait plus que des deys s'accaparent le millénaire, eux qui ne peuvent figurer dans l'Histoire que grâce à la piraterie, l'esclavage et les turpitudes du harem.

Aujourd'hui, ils sont bien protégés par un Occident trop désargenté pour éviter la pollution et tenus en laisse par l'Arabie des Ibn Saoud, la nouvelle Sublime Porte du chaos arabe? Les ogres d'Alger continuent à s'engraisser alors que les lendemains s'annoncent de plus en plus sombres pour des millions de parias. Ce n'est pas en écrasant en catimini les indigènes de la Nation d'impôts, de procès, d'amendes, de surfacturations, hausse des prix, de pénuries, de services brusquement payants sans avoir jamais été tout à fait gratuits?etc. Ces balles, tous les jours sans honte depuis la chute du prix du pétrole, perforent la tête des plus vulnérables des « déjà-morts ». Ce n'est pas avec cette indigne méthode qu'on va récupérer les milliards envolés définitivement. L'obésité en lingots d'or momifie la nomenklatura, l'empêche de fuir, de danser léger en Zadig de Voltaire. Quelque chose se trame, les eaux troubles sont toujours propices aux longs couteaux et au maléfice de la pleine lune. C'est dans l' « eldorado serein » de l'Algérie année 1994 qu'on a classé l'affaire : le Trésor du FLN. La devise du dessin animé français, les Shadoks, créatures non identifiables d'après Wikipédia dit : « pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? ».