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Gaza, Le Caire, lectures et conjonctures

par Salim Metref

Pendant que le cabinet israélien est en réunion non stop pour déterminer, sans doute, quelles réponses apporter aux exigences palestiniennes notamment celles liées à la levée d'un blocus injuste, inhumain, contraire au droit international et qui n'aura que trop duré, pour ne pas revenir bredouille des négociations du Caire, pour arrêter l'attitude à adopter pour s'exfiltrer sans trop de dégâts du bourbier de Gaza et pour essayer de trouver un compromis à une lutte féroce qui oppose, parait-il, vrais faucons et fausses colombes, ceux qui veulent laver l'affront subi face au Hamas et au Djihad Islamique palestiniens et en finir une fois pour toutes avec cette petite enclave quitte à y larguer une petite ogive nucléaire, puisque l'armement classique n'aura pas suffi et a lamentablement échoué, et la raser une fois pour toute de la carte en y exterminant tous ceux qui y vivent à ceux qui préfèrent limiter la casse et ramener troupes et matériel à la maison avant que ne s'accomplisse l'inacceptable, l'inconcevable et l'inimaginable pour l'opinion israélienne mais qui est déjà bien là et s'est bel et bien produit, une défaite historique de Tsahal face à la résistance palestinienne qu'aucune armée arabe n'a pu réaliser, la seconde depuis celle concédée face au Hezboallah libanais, les conséquences internationales, régionales et inter palestinienne de cette tragique séquence méritent d'être, dans la mesure du possible, explorées.

Sur le plan international, la guerre de Gaza et les crimes de guerre qui y ont été commis précipiteront inéluctablement les nouveaux rapports de force qui se profilent dans le monde avec comme toile de fond les événements qui s'aggravent en Ukraine, qui constituent un remake incontestable de la guerre froide et qui opposent en filigrane la Russie aux Etats-Unis avec comme sous-traitants de ces derniers l'Otan et la communauté européenne. L'insinuation prêtée à Poutine relative à une probable guerre en Europe qui pourrait se déclencher du fait de l'arrogance des Etats-Unis et de leur propension à vouloir réduire à sa plus faible expression l'influence de la Russie et le déploiement récent et intense de la diplomatie russe dans certaines ex républiques de l'URSS qui n'en est que l'un des signes précurseurs démontrent que l'heure est grave et que les relations internationales sont sérieusement affectées. Les Etats-Unis qui fournissent armement le plus moderne et financements à Israël qui n'a pourtant aucune proximité géographique avec eux, refusent paradoxalement à ce que d'autres pays comme la Russie et la Chine le fassent avec des pays qui leur sont frontaliers.

Les Etats-Unis qui une économie gloutonne et insatiable et des habitudes de consommation de leurs habitants qui le sont aussi veulent maintenir leur niveau de vie et leur croissance en puisant dans les ressources d'autrui. Ce pays composé à l'origine d'anciennes colonies de peuplement venues d'Europe, notamment de Grande-Bretagne, d'Irlande et de Scandinavie qui n'ont pas hésité à exterminer les peuples autochtones et à maintenir très longtemps un système esclavagiste de populations noires ramenées de force d'Afrique dans des conditions épouvantables, n'hésitera pas à commettre l'inimaginable pour continuer de «croître». Sa nouvelle croisade contre le monde à pour principal objectif de conquérir de nouvelles terres et de nouveaux pays pour maintenir sa sécurité énergétique et sa stratégie consiste à déployer les pires scénarios qui provoquent chaos, dislocation et désolation. Le démantèlement et l'appauvrissement de l'Irak et de l'Afghanistan, la guère en Syrte, l'affaiblissement et peut-être le démembrement de la Libye sont quelques uns des crimes commis ces dernières années sans oublier que d'autres séquences sont seulement mises en veille comme le sursis accordé à l'Egypte du fait de la caution apportée par la chute sanglante provoquée d'un régime légitime et démocratiquement élu. D'autres pays sont également au menu de ce nouveau conflit mondial qui ne dit pas encore son nom. Et le rôle conféré à Israël et les moyens militaires et financiers qui sont mis à sa disposition participent de la conviction des Etats-Unis et de ses stratèges, inspirés d'un cocktail détonant de messianisme évangilo-sioniste, que ce pays qu'il faut soutenir doit être l'épicentre de ce séisme dévastateur qui doit anéantir l'ordre établi pour bâtir le nouvel ordre mondial cher aux stratèges Etatsuniens.

D'autres pays s'affirment aussi dans ce nouvel axe du bien qui refuse l'hégémonie des Etats-Unis comme ceux d'Amérique latine qui à l'occasion de cette sauvage agression contre Gaza, l'ont condamnée et se sont exprimés d'une seule et unique voix.

Le monde musulman, les peuples mais pas les gouvernants qui sont souvent illégitimes et qui deviennent de ce fait les obligés des Etats-Unis et se plient à leurs injonctions, résiste aussi à ce déferlement et s'y oppose et Gaza est paradoxalement devenu le grain de sable qui enraye cette mécanique infernale d'anéantissement des peuples, de leur histoire, de leur culture et qui hypothèque leur avenir et leur devenir. Mais beaucoup plus que Gaza, l'Islam est devenu aujourd'hui l'un des derniers remparts contre cette entreprise de dépossession et d'aliénation de l'humanité toute entière qu'il faut abattre. Mais cela est déjà une autre histoire...

Les événements de Gaza redonnent aussi une nouvelle visibilité aux Islamistes dans la région qui mènent, qu'on le veuille ou pas, seuls et notamment en Palestine, le combat contre l'occupation Israélienne, pour l'édification d'un Etat et pour la préservation d'ElQods. Mais les événements de Gaza ont aussi leur inéluctables conséquences régionales. Ils signifient clairement aux peuples musulmans de la région que la politique du renoncement est celle du pire et effraient les dirigeants de ces pays qui constatent de visu que le courage, la bravoure et la conviction de mener un combat juste et légitime sont payants et peuvent avec peu de moyens réaliser de véritables prouesses notamment militaires. Et les peuples sont ainsi inviter à se battre pour se développer et s'affranchir de l'occident, préserver leurs existence, leurs particularités face à l'insidieuse uniformisation menée par les politiques des normes et des réglementations qui leur sont imposées par l'occident et protéger leurs pays et leurs richesses naturelles que ces nouveaux cavaliers de l'apocalypse veulent accaparer.

Sur le plan interne à Israël, les effets de cette agression contre Gaza sont immenses et ce sur tous les plans. Si l'opinion israélienne est largement acquise à l'idée d'une opération militaire massive d'anéantissement de Gaza, contredite cependant par les réalités et les résultats du terrain, le chemin d'une «paix des braves» fera inéluctablement son chemin dans l'opinion car la politique qui consiste à rendre impossible toute perspective de création d'un état palestinien, notamment par la polyfragmentation de son territoire et l'implantation massive de nouvelles colonies, est un échec et l'aspiration du peuple palestinien à un véritable état est plus vive que jamais.

Sur le plan inter palestinien, la séquence de Gaza permettra non pas d'affirmer un leadership contre un autre, bien que le Hamas sort de cette épreuve plus fort et plus populaire que jamais, mais de démontrer que l'union du peuple palestinien et l'unité de ses représentants légitimes est plus que nécessaire et vitale. Une direction réunifiée et unie autour d'objectifs communs, inspirée de la résistance à Gaza, est le meilleur attelage pour la concrétisation des droits inaliénables du peuple palestinien à un état avec pour capitale ElQods et au retour des millions de réfugiés dans leurs foyers !