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L'affaire Benghebrit et le néo moyen-âge

par Kamel Daoud

Il y a bien désormais une affaire Benghebrit Remaoun, du nom l'actuelle ministre de l'Education algérienne. Laquelle ? Celle de cette répugnante réaction qui parle de complot juif, de complot francophone, de sexisme et d'insultes. S'il fallait à la ministre nouvelle une preuve du sinistre de l'école algérienne et de la mauvaise haleine des conservateurs, la réaction à sa nomination en est une illustration. Voici ce que l'école algérienne a fabriqué et voilà ceux par qui elle est défendue depuis des décennies malheureusement : un ancien ministre de l'époque du premier scandale sur le bac, inquisiteur par vocation, fervent de l'arabisation alimentaire et idéologique, vantard et inutile ; des journaux d'insultes et de diffamation ; des populations crédules et le peuple Belahmar. Du nom de ce sorcier rusé de Relizane, exorciste de son métier et que l'on hisse aux altitudes d'un guru pour peuplades sauvages. Car personne n'ira s'offusquer de ce Belahmar et de son moyen-âge, mais on trouvera à dire sur le nom de famille d'une femme algérienne instruite devenue ministre.

L'affaire Benghebrit illustre le désastre national à trois niveaux : celui des jeunes générations désormais formatées à la détestation, la haine, la méfiance, l'antisémitisme primaire et le doute sur soi et les siens. Celui de quelques ex-cadres nés de cette pépinière maléfique qui a parasité le pays au nom de l'arabisation et qui fut à l'origine de ses névroses, de ses crises d'âmes et de son sous-développement. Et celui de ce peuple « Belahmar » bigot, idiot, prompt à voir un diable dans une acné et pas lire une notice de médicament correctement. Et c'est avec ces trois armées que l'Algérie va affronter l'avenir, assistée par le projet de la plus grande mosquée d'Afrique, quelques zaouïas, un président impotent, des manuels scolaires d'une hideur invraisemblance (ô les beaux manuels d'autrefois !), deux colonnes Benbouzid et une armée d'enseignant kaboulisés souvent.

Et c'est avec cette affaire que l'on prend encore, plus profondément, conscience de ce qu'a perdu ce pays comme élites et occasions qu'il n'a pas su reproduire et qu'il a su chasser, exiler et stigmatiser. L'Algérie est malade, otage entre un Benmohamed et ses croisières et un Belahmar et ses exorcismes en plastique fondu. Que faire ? Défendre ceux qui luttent. Défendre une école algérienne libre, efficace et libérée des idéologies malsaines. Il ne s'agit pas de cette dame et de son nom ou de ce qu'elle représente, mais de nos enfants déjà otages de la génération des Benmohamed, de la chouroukisation, kaboulisation et arabisation par lobotomie. Car, si d'autres ont Londres et les USA pour sauver leurs enfants, nous, nous n'avons que cette école à défendre et à protéger contre ce néo moyen-âge venu du désert.