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Fraude ou pas fraude ? Entre le héros et les mathématiques !

par Abdellatif Bousenane *

Dans chaque élection en Algérie ou dans, pratiquement, tous les pays en voie de développement, les partis opposés s'accusent mutuellement de fraude.

D'abord, concentrons-nous, sur ce qui nous intéresse le plus, le cas Algérien en l'occurrence. Ce qui est curieux chez nous, c'est le fait qu'on commence à parler très tôt de la fraude. Avant, pendant et après la campagne électorale. Ce mot magique et très efficace « fraude », qui signifier la falsification des résultats d'une élection, relève t-il d'une réalité tangible et irréfutable ? Est-il utilisé pour masquer l'échec ?et donc garder la face envers les partisans ? Pour délégitimer la victoire de l'adversaire ? Ou pour, éventuellement, faire des pressions sur le régime politique en place afin qu'il partage d'avantage le pouvoir ?

Dans cette perspective, le calcule mathématique pourrait apporter une réponse à nos questionnements. D'autant plus que le peuple algérien est connu par son talent en la matière, c'est un peuple matheux, il est très à l'aise avec les chiffres contrairement à ses difficultés avec les lettres. Dans l'histoire on note qu'au moyen âge on comptait des centaines de grands mathématiciens au Maghreb centrale, l'Algérie actuelle. Aujourd'hui, la qualité des mathématiciens algériens est reconnue dans les grandes universités occidentales. Mais, quel est le lien entre la fraude et les mathématiques ? Le lien est dans le calcule des pourcentages disposés par les 5 candidats qui se plaindront de la fraude, car si on fait ce calcule on peut sortir avec plusieurs conclusions :

Premier cas de figure :

Si le candidat arrivé en deuxième position lors de l'annonce des résultats par le ministère de l'intérieur, obtient entre 35 et 49 % des voix exprimées (en générale, par rapport aux élections présidentielles précédentes, les voix exprimées représentent 60 à 70 % des inscrits sur les listes électorales, ce qu'on appel le taux de participation. C'est-à-dire, environ 12 millions votants. En supprimant les votes blancs et annulés, il nous reste qu'environ 11 millions) ainsi donc, entre 35 et 49% des 11 millions ca fait : entre 4 et 5,4 millions de voix. Le vainqueur dès le premier tour aura plus de 51 % donc plus de 5,6 millions voix et les 4 autres partageront moins d' 1 million qui reste. Dans ce cas là, le candidat malheureux peut éventuellement crier au loup car l'écart est serré. Il ne représente que quelques centaines de milliers de voix, à peine un million voir même pas. Sur les milliers de bureaux de votes lointains, il peut y avoir des dépassements qui peuvent, effectivement, fausser les résultats.

Ainsi, je pense que plus les résultats sont serrés plus le soupçon de fraude existera. Et non pas le contraire. Néanmoins, il faut apporter des preuves et des arguments solides et logiques et ne pas se contenter de dire il y a eu fraude. Dans ce cas de figure, l'arbitrage pour partager les deux adversaires est très difficile au moins dans nos pays dit du tiers monde, car dans les pays dominants l'écart est, souvent, calculé en « zéros virgules ».

Deuxième cas de figure :

Si le candidat classé deuxième obtiendra moins de 30 % du suffrage exprimé. Cela représente moins ou un peu plus de 3 millions de voix. Le premier passerait dès le premier tour, bien évidement, avec plus de 51% c'est-à-dire plus de 5.6 millions votants. Ainsi il reste moins de 2 millions votants entre les 4 autres. Par conséquent, ce deuxième candidat ne peut pas crier à la fraude car l'écart est tellement grand (plus de 2 millions voix qui le sépare du premier). Logiquement, on ne peut pas cacher plus de 2 millions voir plus de 3 ou 4 millions de bulletins de votes. Surtout que chaque candidat a son représentant dans chaque bureau de vote qu'il acquerra automatiquement un procès-verbal du résultat final. Les dépassements, en générale, se font dans des bureaux lointains, aux montagnes ou dans des bureaux situés dans des régions désertiques. Cela ne représente pas, tout de même, plus de 2 millions voix ! C'est quasiment impossible.

Par ailleurs, un candidat qui prétend être le héro du peuple et qu'une grande majorité a voté pour lui, c'est-à-dire plus de 5 millions de votants, ne peut pas expliquer qu'il n'a pas trouver 50 000, 70 000 ou même e 100 000 contrôleurs ou représentants dans les bureaux à travers le territoire nationale. S'il a réussit à susciter une telle ferveur, une majorité de peuple qui adhère à son programme et qui se compte par millions, je pense, que ce peuple va veiller sur les urnes jusqu'à ce qu'il obtient le P.V final de chaque bureau. C'est la moindre des choses ! Pour les 4 autres candidats on est très loin du compte.

Troisième cas de figure :

Le vainqueur de l'élection écrase ses adversaires et gagne avec plus de 60% du scrutin c'est-à-dire plus de 7 million de voix et les 5 autres partageront les 40 % qui restes. Là aussi, et selon ma logique, il ne peut pas y avoir de fraude sauf, si et seulement si, il y a eu complicité de la part d'une grande proportion de la population et toutes les institutions d'état sans exception y compris un grand nombre des magistrats, à ce moment là la fraude sera si visible que tout le monde se rendra compte. Si on arrive à cette situation là, qui est à mon avis peu probable, il faudra, en fait, qu'on se pose la question sur notre psychologie autant qu'algériens, sur notre conscience collective et sur notre capacité à former un état nation.

Quatrième cas de figure :

Il y aura un deuxième tour : Alors là, la question mathématique ne se pose même pas.

* Docteur en sociologie politique.