Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Chaque main étrangère

par El-Guellil

C'est quand même drôle, chaque fois que ça chlingue, on sort la fameuse «yed ajnabia». Ghardaïa, c'est la main étrangère. Les Chaouis c'est une main étrangère au bon sens. L'opposition, c'est la main étrangère qui lui souffle ses prises de position. Barakat c'est une main de femme étrangère à l'hypocrisie. Chaque fois, c'est la main étrangère qui est montrée du doigt. Mais personne, ouetgoul une, ne s'est demandé comment une main, une seule main, peut faire autant de dégâts à des millions de mains. Si l'on considère que les millions de nassama ont chacune deux mains. C'est que, ya mes frères, les mains sont occupées à autre chose.

Il se trouve des mains qui, depuis l'indépendance, n'arrêtent pas leur corvée de chita. Ça applaudit, ça brosse dur et ça caresse, dans le sens du poil, pour une place au chaud, au moment où des mains transportent, à longueur de journée, des jerrycans pour étancher une soif, de bien-être, jamais assouvie. Des millions de mains n'arrêtent pas de griffonner, qui, des demandes de travail, qui, des demandes de logement, des demandes d'intervention, des lettres ouvertes pour dénoncer les portes fermées, qui, qui...

Vous avez aussi les mains qui n'arrêtent pas de faire de l'auto-stop sur les mers de l'immigration clandestine, à la recherche d'un Eden qu'elles trouvent, quelques fois, au fond de l'océan. Des mains, en quête de travail, qui veulent traverser la Méditerranée à la brasse. D'autres mains brassent des milliards pas très clairs. Khmissa et khmouss. Des mains trop occupées à ramasser le «bakchich». Chiche, va les dénoncer, chiche ! Tu te retrouveras en taule, car ces mains, ça travaille la main dans la main. Haut les mains! braquage en plein jour. On a volé les archives de la Révolution. Des mains qui font la tire et des mains qui tirent les ficelles. Des mains qui votent, qui votent... quand elles ne sont pas levées au ciel pour prier le Tout-Puissant de nous sortir de ce pétrin. Des mains propres qui dénoncent les mains sales... mais là, il y a, sûrement, une main étrangère qui les actionne. Elle est vite montrée du doigt. Elle est isolée, seule contre tous. Et comme on sait qu'une seule main «ma tsaffag», l'embellie, c'est pas pour demain...