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TEL-AVIV - RYAD: LA CONVERGENCE DES MECONTENTS

par M. Saadoune

Personne n'est surpris de voir Israël, seule puissance nucléaire dans la région, réagir en hurlant au loup après l'accord intérimaire sur le nucléaire iranien conclu à Genève. Dans les commentaires des lecteurs sur les sites des médias internationaux, on rencontre la même formule, à la virgule près : si Israël dénonce l'accord, c'est qu'il a du bon. Même si les médias occidentaux sont très pro-israéliens, les lecteurs, eux, ne sont pas dupes. Israël ne voulait pas d'un accord mais d'une guerre.

Le forcing français du précédent round n'aura pas réussi à entraver l'action diplomatique et la quête d'une solution acceptable. Il y avait - et il y a toujours - un terrain d'entente car l'Iran a constamment affirmé que la bombe n'est pas son objectif. Mais les Iraniens ont constamment répété que les Occidentaux ne peuvent, pour complaire à Israël, exiger d'eux un renoncement aux droits reconnus par le Traité de non-prolifération (TNP). Dans certains médias occidentaux, on a pu lire l'argutie que le TNP ne mentionne pas le «droit à l'enrichissement». C'est un renversement absurde sur lequel s'est fondée la diplomatie occidentale. Absurde car le TNP étant par nature fondé sur un engagement volontaire pour la non-prolifération assorti à un droit reconnu et affirmé au nucléaire civil. Le droit à l'enrichissement de l'uranium en fait partie.

Une interdiction de l'enrichissement ne serait valable que si elle est expressément mentionnée dans le traité. Ce n'est pas le cas. L'Iran a accepté de se limiter à un niveau de 5% mais n'a pas renoncé à continuer à faire de l'enrichissement et sur son territoire. C'est une reconnaissance d'un droit qui était injustement contesté. Et il faut le dire, en refusant d'accepter une interdiction absolue de l'enrichissement, l'Iran sauve la mise pour les autres signataires du TNP. Que les garanties de transparence et de surveillance par l'AEIA soient affirmées est une bonne chose. Mais qu'une interdiction de l'enrichissement soit décrétée en dehors du TNP était exorbitant. L'Iran ne l'a pas accepté et a empêché de créer un fâcheux précédent. Tous les signataires du TNP ne feront pas dans l'enrichissement, cela est certain. Mais l'interdiction, décrétée par un «club» fermé, ne fera pas force de loi.

L'IRAN A PAYE CHER EN TERMES DE SANCTIONS MAIS A SAUVE L'ESPRIT ET LA LETTRE DU TNP. LE COMPROMIS NEGOCIE COMPORTE DE VRAIES CONCESSIONS MAIS IL N'A RIEN D'HUMILIANT. ET SURTOUT IL NE TRANSIGE PAS SUR LE DROIT AU NUCLEAIRE ET AU SAVOIR TECHNOLOGIQUE DONT ON VOULAIT LE PRIVER. LA DIPLOMATIE IRANIENNE - IL EST VRAI DEBARRASSEE DU BOULET DE L'INTEMPESTIF AHMADINEJAD - A REUSSI, MALGRE UNE PROPAGANDE HOSTILE ET FEROCE, A CLARIFIER LES ENJEUX. UN MEMBRE DE LA CHOURA EN ARABIE SAOUDITE, ABDULLAH AL-ASKAR, EST DANS LE MEME ETAT D'ESPRIT QUE NETANYAHU. SELON LUI, LES GENS DU MOYEN-ORIENT VONT «PERDRE LE SOMMEIL» APRES L'ACCORD SUR LE NUCLEAIRE IRANIEN. IL NE SEMBLE POURTANT PAS PARTICULIEREMENT INQUIET SUR LE FAIT QU'ISRAËL DISPOSE «EFFECTIVEMENT» D'AU MOINS DEUX CENTS TETES NUCLEAIRES. LA HAINE ANTI-CHIITE FAIT PERDRE LA RAISON A «L'ANALYSTE» SAOUDIEN. CERTES, IL NE S'AGIT PAS D'UN OFFICIEL, MAIS IL EXPRIME BIEN LA TENDANCE DU REGIME A VOIR DANS L'IRAN UNE MENACE ET DANS ISRAËL UN QUASI-ALLIE. QUI SONT DEJA EN CAMPAGNE CONTRE UN ACCORD DEFINITIF.