Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

PARIS SUR LA LIGNE DU LIKOUD

par M. Saadoune

Il n'y a pas eu d'accord à Genève sur le nucléaire entre l'Iran et les Occidentaux. Paris y est pour beaucoup. Et il n'y a pas qu'à Téhéran où l'on accuse la France, représentée par Laurent Fabius, d'être venue à Genève avec pour mission d'empêcher un accord sur le dossier du nucléaire iranien. Les Occidentaux, également, ont constaté une volonté de blocage chez la partie française. La délégation iranienne s'y attendait en indiquant que le camp occidental devait surmonter ses propres divergences.

Les néoconservateurs américains qui veulent bombarder tout ce qui n'est pas en orbite US apprécient fortement le blocage et retrouvent du charme aux frites françaises devenues «non grata» du temps de Dominique de Villepin et de George W. Bush. Les socialistes français au pouvoir n'ont pas fait d'inflexion sur la politique étrangère «bushienne» de Sarkozy, ils l'ont accentuée. Au point de surprendre, agréablement, les néoconservateurs américains. Paris incarnant la «ligne dure» et non Washington, cela méritait en effet d'être relevé. Les socialistes français au pouvoir sont sur la ligne du Likoud et ils se font applaudir par la droite en Israël. Les cris guerriers de Netanyahu ont trouvé un écho fort chez la diplomatie française. Ce ne sont pas les arguties selon lesquelles ils prendraient en charge des «soucis saoudiens» qui masqueraient cette réalité.

La délégation française aura constamment œuvré à agir au niveau médiatique - et en supplantant la chef de la diplomatie européenne - pour faire état de divergences insurmontables. Et pour refuser un «mauvais accord». Comme si les autres Etats occidentaux n'avaient pas la capacité d'apprécier réellement la portée de la percée possible dans des négociations qui patinent depuis des années. Des diplomates occidentaux sous couvert de l'anonymat ont marqué leur agacement à l'égard d'une «tentative de Fabius de se donner une importance tardivement». Il est en effet invraisemblable de croire que la délégation européenne n'avait pas tous les éléments du dossier et qu'il faille attendre des «rappels» de Paris à ce sujet.

Il y a sans doute une volonté de se mettre en avant chez le ministre français des Affaires qui a constamment joué au rabat-joie à Genève. Pas forcément pour de bonnes raisons. Javier Solana, ancien négociateur européen avec l'Iran sur le dossier nucléaire, l'a constaté de manière caustique sur Twitter : «Surprenante France. Chaque moment peut être utile pour lever brièvement la tête». Laurent Fabius a eu son grand quart d'heure médiatique dans la posture de l'intransigeant qui ne veut pas se laisser «duper» par l'Iran. Mais qui laisse aussi entendre que les autres diplomates occidentaux sont des niais.

LA PORTE NE S'EST PAS REFERMEE DEFINITIVEMENT SUR LES NEGOCIATIONS. LE TROISIEME ROUND DEPUIS L'ELECTION DE HASSAN ROUHANI DOIT SE TENIR LE 20 NOVEMBRE PROCHAIN. LE PRESIDENT IRANIEN A APPELE LE GROUPE DES 5+1 A NE PAS MANQUER «CETTE OCCASION EXCEPTIONNELLE» POUR PARVENIR «A UN RESULTAT POSITIF EN UN TEMPS RAISONNABLE». MAIS IL EST CLAIR QUE SI UN DES NEGOCIATEURS, EN L'OCCURRENCE PARIS, CHERCHE A IMPOSER LE POINT DE VUE ISRAELIEN, IL NE SERA PAS POSSIBLE D'AVANCER.