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Algérie-France : le temps est-il mûr pour une réconciliation du type franco-allemand ?

par Kharroubi Habib

La réconciliation franco- allemande que l'on cite en exemple pour plaider à l'avènement d'un acte similaire entre l'Algérie et la France n'a été possible que parce que l'Allemagne n'a eu aucune réticence à admettre et assumer les torts historiques dont elle a été coupable durant l'ère nazie à l'égard du monde et du voisin français. Ce qui n'est pas le cas pour la France concernant son histoire coloniale et en particulier la page algérienne de celle-ci. En se refusant à reconnaître la noirceur de celle-ci sans lui trouver d'aspects "bénéfiques", elle ferme la porte de ce fait à une véritable réconciliation algéro-française qui permettrait aux deux nations d'envisager de regarder vers l'avenir et de nouer entre elles des relations apaisées, confiantes et mutuellement profitables.

Il n'est pas utopique de croire que cela arrivera un jour. On peut même avancer que c'est une certitude et que l'Algérie et la France y vont lentement mais sûrement. Des deux côtés de la Méditerranée, ils sont de plus en plus nombreux ceux qui estiment, à juste titre, que la France et l'Algérie ont tout à gagner à apurer leur contentieux historique. François Hollande est l'un d'entre eux qui, en tant que président de la République, peut faire beaucoup pour rendre possible cette perspective. C'est la raison principale de sa visite en Algérie. Les Algériens ne pouvaient que lui réserver un accueil chaleureux, démonstratif de la sympathie qu'ils ont pour sa volonté de regarder avec "lucidité" ce que la présence française en Algérie a eu de traumatisant et de terriblement dommageable pour leur peuple. Il ne dira, ni ne fera, néanmoins, tout ce que des partisans de la réconciliation algéro-française lui ont préconisé à l'occasion de son voyage en Algérie. Son empathie pour l'Algérie et les Algériens ne sera pas à récuser en doute s'il s'abstenait de faire les gestes et à prononcer les paroles définitives qu'ils auront espérées. François Hollande est un homme d'Etat et, à ce titre, il est tenu de composer avec les réalités. Il ne lui échappe pas qu'il y a beaucoup de Français qui sont encore réfractaires à la notion de reconnaissance franchement déclarée par leur Etat des méfaits de la période coloniale en Algérie. Encore moins à celle de "repentance" pour ces méfaits que d'aucuns en France et en Algérie voudraient l'entendre déclamer à Alger. Mais Hollande sait également que sur le problème mémoriel qui empêche la réelle réconciliation des deux nations, il doit faire plus que ses prédécesseurs, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, mais sans aller trop loin, faute de quoi, il se mettrait à dos ces Français nombreux encore à considérer que c'est aller contre "l'honneur" de la France à déclarer que des crimes de guerre et contre l'humanité ont été commis en son nom. La France est une grande puissance même si son statut de la sorte est sorti amoindri du conflit de la Deuxième Guerre mondiale. Elle est un acteur d'importance sur la scène internationale. Tant en termes de poids et d'influence économique, militaire et politique. Le contentieux mémoriel qu'elle a avec l'Algérie, et qu'il faudra bien apurer un jour, ne justifie pas que certains en Algérie avancent l'exigence de n'entretenir avec elle aucune relation et de refuser toute forme de partenariat ou de recherche de terrain d'entente et de convergence sur des dossiers ou problèmes multiformes aussi importants pour les deux pays du point de vue de leur intérêt national. Ce serait un succès de la visite d'Etat de François Hollande en Algérie qu'il se dégage entre les deux pays une plateforme de ce genre qui baliserait le partenariat qui s'impose à eux.