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PRENDS 3.000 BALLES ET? GARDONS LE 87 BIS !

par M. Saadoune

Il n'y a pas eu de surprise à la tripartite. Le Salaire minimum national garanti (SNMG) connaît, formellement, un «bond» de 20%. Cela fait 3.000 dinars de plus. Mais très clairement, la tripartite a choisi le «moins-disant», ou, pour être précis, le «moins-demandant» de l'UGTA qui a souhaité une évolution du SNMG qui le situerait entre 18.000 et 20.000.

 En donnant le «choix» entre deux options, il était très clair que les patrons et encore plus le gouvernement opteraient pour la plus faible hausse. La centrale syndicale n'a pas les moyens de demander plus que ce que le gouvernement ne veut céder. On peut d'ailleurs s'interroger sur ce que gagne l'UGTA ? qui savait pertinemment que la hausse n'irait pas au-delà de 18.000 dinars ? à créer l'illusion qu'une augmentation de 5.000 dinars était envisageable.

 Les Algériens payés au «SMIC» - ils existent bel et bien, même si les statistiques algériennes ont de la peine à les chiffrer -, profiteront donc de cette hausse de 3.000 dinars. Le SNMG en Algérie a déjà été augmenté de 3.000 dinars en 2010, en passant de 12.000 à 15.000 dinars. Avec la nouvelle hausse, cela fait donc un plus de 6.000 dinars en deux ans.

 Cela paraît appréciable en «chiffres», mais il faut bien entendu relativiser. Avec seulement 18.000 dinars, on ne vit pas correctement en Algérie si d'autres revenus, y compris en provenance du secteur de l'informel, ne contribuent pas à la popote. Ceux qui «gagnent» le plus à ces augmentations sont les managers des entreprises publiques, dont le salaire est indexé au SNMG. Pour le bas de l'échelle, les évolutions du salaire minimum sont fortement contenues par les effets de l'article 87 bis de la loi relative aux relations de travail. Par cet article, les augmentations du salaire minimum ne concernent pas le seul salaire de base mais incluent les indemnités et les primes. Du coup, la hausse de 3.000 dinars n'a rien de mécanique. Les entreprises qui ont des salariés payés actuellement 17.000 dinars, primes et indemnités comprises, n'auront que 1.000 dinars à ajouter pour «se mettre en règle». L'article 87 bis limite en définitive les effets d'une augmentation du SNMG minimum pour les bas salaires.

 L'UGTA a, comme à chaque tripartite, remis sur le tapis la question de l'abrogation de l'article 87 bis en invoquant au passage, à juste tire, le fait que les revenus de nombreux travailleurs sont en franc décalage avec l'évolution du coût de la vie. La centrale syndicale, toujours instituée unique interlocuteur, n'a obtenu que la mise en place d'un groupe de travail dont la mission sera d'évaluer les incidences financières d'une éventuelle suppression de cet article 87 bis.

 Mais sur le fond, la réponse est contenue de manière quasi franche dans le communiqué officiel de la tripartite. C'est «niet», car ce sera trop lourd à supporter pour le «budget public» et pour les entreprises économiques qui ne «pourraient faire face actuellement et sans de graves conséquences à une abrogation de l'article 87 bis».

 L'autre volant sur lequel souhaitait agir le syndicat «ami», à savoir une baisse de l'IRG (impôt sur le revenu global), est rejeté de manière encore plus ferme. L'UGTA devra se contenter de 3.000 balles à applications variables. Elle devrait éviter de pavoiser.