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POUDRE AUX YEUX

par K. Selim

L'internationale néoconservatrice fait des heures supplémentaires et n'hésite pas à assumer le rôle le plus ingrat pour continuer à sonner le tocsin au Moyen-Orient. Le chef de la représentation syrienne à Washington a été convoqué lundi au département d'Etat pour répondre des «actes de provocation» liés à un éventuel transfert par Damas de missiles Scud au Hezbollah.

 L'allégation serait risible si elle n'entrait dans le scénario d'une montée des tensions régionales dans le cadre de la préparation de la guerre «finale» destinée à débarrasser le Moyen-Orient de toute opposition à l'hégémonie israélienne. En l'occurrence, de quoi la superpuissance impériale a-t-elle peur et quel message cherche-t-elle à faire passer ? Les fusées Scud - dont on a pu évaluer le potentiel destructeur à peine supérieur à un gros pétard du Mouloud lors de son utilisation par l'ex-quatrième armée du monde, selon la propagande américano-israélienne - sont des antiquités sans valeur tactique. En quoi le Hezbollah, qui a démontré ses capacités technologiques autonomes, aurait-il besoin d'armements obsolètes ?

 Les missiles développés par la résistance libanaise, quoi que puissent en dire les superstratèges de Washington, sont plus opératoires qu'une quincaillerie dépassée par tous les standards actuels. La convocation du diplomate syrien le jour du soixante-deuxième anniversaire de la création de l'entité sioniste est un signal actualisé de l'alignement américain sur un Etat raciste fondé sur l'appartenance religieuse.

 Ce signal israélien, initialement lancé par Shimon Peres, est destiné aux Etats arabes dont la vacuité est égale à leur illégitimité démocratique. Les citoyens arabo-musulmans et tous les peuples épris de paix et de justice ne sont en rien concernés par des gesticulations destinées à donner à la force la souveraineté du droit et au mensonge l'apparence de vérité.

 Il est vrai qu'aucun Etat arabe n'oserait convoquer un quelconque proconsul américain pour signifier sa colère et sa désapprobation devant le soutien éhonté de la première puissance démocratique à une politique d'apartheid en bonne et due forme. Personne ne se risquerait à condamner les fournitures massives d'armement à un régime qui bombarde des innocents sans défense, et aucun n'irait à rappeler la robe rouge que Condoleezza Rice, en concertiste distinguée, portait le soir de la mort des enfants de Cana, écrasés sous les bombes américaines larguées par des avions américains.

 Les néoconservateurs restent convaincus que la résistance des peuples peut être annihilée par la suprématie militaire ou par la sujétion. Cette conviction est ancrée au-delà de la lecture de leur propre histoire et nous autres Algériens en connaissons bien toutes les déclinaisons. La représentation du Hezbollah comme organisation terroriste voisine d'un Etat dont les forfaits ne se comptent plus, est une manœuvre grotesque.

 Les diplomates américains, qui s'alarment de la soi-disant fourniture de missiles antédiluviens, n'ont pas vu les très modernes bombes au phosphore ? made in USA - pleuvoir sur Ghaza sans défense. Les protestations pacifiques de ceux-là mêmes qui arment des tueurs n'ont aucune crédibilité. De quelle dignité, de quelle légitimité les bureaucrates de la spoliation peuvent-ils se prévaloir ? La paix ne se construit pas sur le mensonge et encore moins sur les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité. Au Moyen-Orient et ailleurs.