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Autorisation impériale

par K. Selim

A Barack Obama les envolées humanistes, les appels au dialogue, à Joe Biden la menace et les avertissements. A la «main tendue» vers l'Iran du premier, succède désormais l'autorisation impériale accordée par le second à Israël pour bombarder l'Iran. Le vice-président américain maquille cette autorisation par le discours, peu crédible, du «droit souverain» d'Israël de décider. Il prend le soin, totalement inutile, de préciser que si Israël décidait d'agir, «ce sera son droit souverain. Ce n'est pas notre choix».

En réalité, ce sera bien un choix américain, et ce ne sont pas seulement les Iraniens qui le pensent. Il n'est pas fortuit que ce discours menaçant des Etats-Unis, qui se cache faussement derrière la souveraineté d'Israël, vienne après la formidable campagne orchestrée par les Occidentaux à la suite de la crise post-électorale en Iran. Cette crise, reflet d'une division sociologique et culturelle profonde au sein de la société et du système politique iraniens, a donné lieu à une surexploitation occidentale, souvent grossière, suggérant que les «durs» l'ont emporté à Téhéran sur les «modérés».

L'étiquetage n'a aucun sens pour ceux qui connaissent le fonctionnement du système iranien, mais il sert la propagande destinée à faire accroire qu'il n'y pas d'autre choix que de bombarder les Iraniens. On suggère qu'à Téhéran, les gens au pouvoir sont des fous et des messianistes qu'il faut arrêter par «n'importe quel moyen». La ligne est désormais de banaliser l'option guerrière.

Un journal britannique, The Sunday Times, citant une «source diplomatique» anonyme, a affirmé que l'Arabie Saoudite aurait fait savoir qu'elle fermerait les yeux devant le passage de bombardiers israéliens par son espace aérien. On est devant un exercice de propagande à effet multiple : accentuer les menaces contre l'Iran, discréditer les Saoudiens, jouer les chiites contre les sunnites... La nouvelle a été démentie officiellement par les Saoudiens mais le matraquage fonctionne. Il est vrai également que les Arabes dit «modérés» - encore un étiquetage facile - prêtent facilement le flanc à ce genre de manipulation en discourant de manière débile sur la «menace iranienne».

Mais pour revenir à la presse occidentale, on sait - c'est un constat et non un jugement - qu'elle a une conscience aiguë des «intérêts suprêmes» à préserver, elle l'a démontré de multiples façons. L'information sur un passage d'avions israéliens par l'espace aérien saoudien, si elle était avérée, n'aurait pas été publiée par le Sunday Times et elle n'aurait pas été relayée par les autres médias. L'«information» - les guillemets s'imposent - était bien destinée d'emblée à la publication, et sa fonction, propagandiste et manipulatrice, paraît évidente.

Le président du Comité de sécurité nationale et de politique extérieure au Parlement iranien a répondu immédiatement à Joe Biden en faisant savoir que l'Iran ripostera de manière «décisive et massive» à toute attaque contre ses installations nucléaires.

Le discours de Biden et des médias occidentaux n'est pas destiné aux Iraniens, chez lesquels un consensus existe entre les supposés «modérés» et «radicaux» au sujet du programme nucléaire. Ce matraquage, qui devrait monter en cadence, est destiné à l'opinion occidentale. C'est à cette opinion qu'il s'agit de faire peur - ce fut le cas avant la guerre contre l'Irak - pour justifier une nouvelle aventure guerrière.