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IL ÉTAIT UNE FOIS !

par Belkacem Ahcene-Djaballah

Livres

Le serment d'un fils... Roman de Hocine Mezali, Editions Dar El Othmania, Alger 2021, 297 pages, 1.000 dinars



Homme de presse avec, près, plus de 50 ans de journalisme, toujours plus «Grand reporter» et homme d'enquête et d'analyses que simple rédacteur, Hocine Mezali n'est pas, n'est plus à présenter. Il a sévi dans beaucoup de publications et dans tous les genres... Tout particulièrement dans le roman historique, avec une préférence toute compréhensible -il y est né- pour Alger et ses combats permanents contre le colonialisme.

Cette fois-ci, il décrit l'itinéraire de vie d'un jeune Algérois durant les années 40. Aziouez, «bel homme, sportif, bagarreur à ses heures, courageux devant l'adversité», fils d'un taxieur bien introduit, devient, après le décès de son père, cuisinier auprès d'un «Chef» maltais de la Basse Casbah, un grand ami de la famille pas toujours accueillant.

Il s'en sort merveilleusement bien faisant face aux mille et une difficultés dans un milieu pas toujours accueillant et pacifique, datant que la guerre et l'oppression coloniale rendent la vie plus que difficile, favorisant tous les expédients.

Le débarquement des Américains va alors changer sa vie et il se retrouvera assez vite (ayant sauvé la vie à un officier -un espion ?- Américain s'étant perdu dans les ruelles malfamées la Basse Casbah et agressé par des voyous), détenteur d'un passeport américain.

La suite est un interminable voyage à travers le monde : convoyeur dans l'armée américaine et au rendez-vous des fronts les plus chauds, la démobilisation, Paris, Londres, Montréal, Washington, New York, Sydney, Melbourne (et un premier mariage, puis un second, accompagnés d'une affaire de restauration réussie) avec quelques allers-retours à Alger, puis, enfin, fortune faite, San Francisco et une autre affaire de restauration et un autre mariage, suivi d'un autre divorce, car toujours sans enfant. Il était donc écrit qu'il ne pouvait en avoir qu'en épousant, selon les vœux de sa maman, une Algérienne. Un voyage à Alger et l'affaire est vite pliée avec la sœur, bien belle, d'un ami et avec la bénédiction de Goucem, la maman chérie. Peu de temps après, à Frisco, un héritier est annoncé. Fin de l'histoire.

L'Auteur : Né en 1938 à Bordj Ménaïel, journaliste d'abord et avant tout (il est un des doyens de la corporation), essayiste et écrivain, auteur de deux romans (dont «Le seigneur des cinquante» (Enag 2015), et de plusieurs essais dont un sur «Ferhat Abbas : un homme, un visionnaire» (Dar El Othmania 2011) et un autre sur «Alger : 32 siècles d'histoire», collaborateur dans l'équipe qui a réalisé le film «La Bataille d'Alger» et principal assistant littéraire de Yacef Saâdi (dont il était très proche) dans la rédaction des volumes sur «La Bataille d'Alger».

Extraits : «Ville exclusivement diurne par tous les temps d'après ce que les anciens racontent, Alger n'a jamais pu se forger une image attrayante de la nuit comme ces villes européennes dont la vocation consiste à ne dormir ni la nuit ni le jour» (p 64).

Avis : Passionnant comme tout ce qui est (ou a été) écrit par H. Mezali qui, avec son expérience (qui connaît le monde) et ses réflexes de très grand reporter de presse (qui connaît son monde), sait y faire avec le détail des situations les plus complexes. Mais, à mon goût, trop de détails avec le risque de faire oublier l'essentiel ou de s'en éloigner.

Citations : «Une femme au charme réel, à condition de savoir s'y prendre, peut transformer un époux en être aussi obéissant qu'un animal de compagnie, si elle désire» (p 107), «Plus tu t'éloigneras de ton pays, plus l'abîme de l'exil t'attirera dans son miroir trompeur» (p 118).



Le Mythe en héritage. Recueil de chroniques. Ouvrage de Mohammed Abbou. Editions Hikma, Alger 2011, 235 pages, 700 dinars (Fiche de lecture déjà publiée. Pour rappel)



La chronique journalistique est, dans la presse contemporaine (avec le billet) un genre majeur. Texte pas trop long ni trop court. Juste ce qu'il faut pour que le lecteur le lise en allant jusqu'à la fin (morceau le plus savoureux).

N'y réussit pas qui veut !

En général, ce sont les journalistes les plus expérimentés qui s'y versent. Lorsqu'ils sont fins observateurs ou observateurs finauds, ils vont au billet, un genre encore plus difficile, le texte étant assez court.

Il arrive cependant que des collaborateurs extérieurs dominent le genre. Ce sont surtout des universitaires ayant une certaine expérience du terrain. Le savant mélange de savoir, de connaissance de la vie, de pédagogie et pour peu qu'il y en ait, du style ! C'est le cas de Mohammed Abbou. Ancien recteur d'université, ancien ministre, ancien député de l'APN, (ancien) membre du Conseil constitutionnel... Ouf !

Vingt deux (22) chroniques, publiées dans Le Quotidien d'Oran. Ni fables, ni rêveries, ni histoires. Toujours une sentence au début (ex : dans «La foi buissonnière» qui aborde la «bigoterie frénétique» qui a pris la société algérienne : «Je ne servirai pas Dieu comme un laboureur qui attend son salaire» un dit de Rabia El Adawia), et une morale ou un adage à la fin («La prière des Caïds, c'est le vendredi et l'Aïd). Autres bons mots : «Notre pays, nous ne le gérons pas, nous le distribuons», «La mythomanie n'est plus une affaire d'individu, mais se vit en groupe», «De la hiérarchie du hasard ne peut naître qu'une société par défaut», «L'intelligence, brimée, voit sa sphère s'atrophier et l'inconséquence s'engouffre dans tous les domaines où la gouvernance est en faillite».

«La loi n'est pas violée, elle est abandonnée»... Beaucoup trop d'interrogations alors qu'on a besoin de réponses. Mais la Vie, notre vie quotidienne de «marcheur solitaire que nous sommes», racontée en diagonale, de manière ludique, légère.

Avis : A lire. A consommer avec modération. Une chronique chaque matin avant de sortir du domicile. Ceci vous permettra d'être «averti» de ce que vous allez voir ou rencontrer à la sortie de votre domicile, ou sur la route, ou sur les lieux de travail, ou... un homme averti en vaut deux.

Le Conseil constitutionnel a(vait) gagné un bon juriste. La presse a (avait) perdu un grand écrivant. Dommage ! Mon opinion de l'époque : vivement que son mandat se termine et qu'il revienne à l'écriture. On attend donc la suite.