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Collapsologie pandémique: Atmosphère de fin du monde

par Abdelhak Benelhadj*

La catastrophe sanitaire que la planète vit depuis fin décembre et qui s'aggrave depuis quelques semaines en Europe, devenue le foyer (« cluster ») principal de l'épidémie, renvoie à des événements tragiques similaires que l'on retrouve dans les livres d'histoire ou de science-fiction1. Hier, spectacle divertissant, aujourd'hui réalité.

Les crises pandémique, financière, économique, pétrolière, politique... convergent et se combinent, actions et rétroactions se succèdent au point qu'on perd le sens de la causalité. Il serait trop facile de croire à l'antériorité causative du coronavirus. Il ne fut que le détonateur, la pichenette mortifère d'une multitude de crises qui attendaient leur heure pour révéler les mécanismes profondément instables d'un monde qui a perdu le sens des réalités.

Places, avenues, villes désertées, rayons des magasins vidés, queues interminables devant les pharmacies et les commerces...2 Le monde se ferme et s'enferme dans un étrange et pesant silence. Les pays réduisent leurs échanges et dans chacun d'entre eux on invite les populations à se calfeutrer chez elles et à ne plus en sortir sous peine de contraventions.3

Le verrouillage des frontières et les mesures de confinement découlant de l'extension de l'épidémie plongent l'Europe dans une crise d'une ampleur inconnue depuis la fin de la dernière guerre mondiale.

La crise en cours, dont on redoute ne pas entrevoir la fin, ouvre sur un abîme de questions et, dors et déjà, remet en cause des certitudes ancrées depuis le début des années 1990.

La « grippe espagnole » (entre mars 1918 et juillet 1921)4 a laissé des traces durables dans l'imaginaire européen. Après la guerre qui y a puisé beaucoup de ses victimes, contrairement à l'épidémie actuelle, elle s'attaqua surtout la tranche d'âge des 20-40 ans. C'était une souche (H1N1) 25 fois plus virulente qu'une grippe ordinaire, elle fit (faute de statistiques fiables) entre 50 et 100 millions de morts.

Plus loin dans le temps, les images de la « grande peste » bubonique, la « peste noire » qui a dévasté l'Europe au milieu du XIVème siècle, reviennent en mémoire.

Elle a tué de 30 à 50% du continent en cinq ans à peine (1347-1352) faisant environ 25 millions de victimes. Un chiffre terrifiant rapporté à la démographie européenne de l'époque. Ce qui explique ses conséquences profondes et longues.

Elle dura, de façon plus sporadique, jusqu'au début du XIXème siècle. Selon certains historiens, elle a affaibli ce qui restait de l'Empire romain moribond depuis le IVème-Vème siècle et expliquerait la capitulation de l'Europe face à l'Empire Ottoman symbolisée par la chute de Byzance en 1453.

Il n'est pas difficile de spéculer, à partir de ces renvois historiques, sur le crédit opportun que pourraient en tirer les « lanceurs d'alerte » xénophobes qui peuplent les plateaux de télévision européens, jamais en mal d'envahisseurs ourdissant de « Grands remplacements ». Les brutales polémiques suscitées par le flot de réfugiés fuyant la guerre, la misère et l'environnement stérilisé par la folie d'une mondialisation effrénée, sont encore fraîches dans les mémoires.

Evidemment, l'épidémie en cours n'a que peu à voir, si l'on s'en tenait au seul nombre de victimes, avec les calamités médiévales.

La Chine, point de départ de l'épidémie, reste le pays ayant enregistré le plus grand nombre de morts (3.199), mais c'est en Europe que l'épidémie progresse rapidement, avec 2.291 décès, la majeure partie en Italie et en Espagne, où le nombre de contaminations recensées a fait un bond, avec 2.000 cas supplémentaires en 24 heures.

Mais ces statistiques se périment au moment même où elles sont délivrées, tant l'épidémie s'étant vite, ne laissant aucun répit aux techniciens de la santé et aux observateurs.

Ce qui en revanche préoccupe peut être davantage que son expansion rapide, c'est la vitesse à laquelle les pays s'empressent de s'enclore, d'édifier des murs et de lever des barrières. De le containment des foyers infectieux, on est passé à celle des personnes fragiles, postulant que l'épidémie s'est déjà largement étendue, et enfin à l'enfermement généralisé de toute la population.

Pour la première fois on anticipe la crise (Chine, Italie, France, Espagne rejointes par tous les autres), pour espérer mieux la contrôler. La provoquer au lieu de la subir.

Les hommes, les pays sont mis à l'épreuve, testant leurs capacités à faire face scientifiquement, techniquement, médicalement, économiquement, socialement à la crise que cette épidémie produit.

La crise éprouve aussi leurs valeurs, le sens qu'ils donnent aux fondements de leurs institutions, leurs aptitudes politiques, au sens fort, à administrer les contraintes engendrées par une telle calamité.

En un mot, il s'agit d'estimer aux limites de leur valeur ce que représentent les mots comme «fraternité», «solidarité», «démocratie», «république», «civilisation»...

N'est-ce pas aux limites qu'on éprouve la valeur, la solidité d'un système, quelle que soit sa nature, quelle que soit sa fonction ? Le bord à partir duquel on mesure les différences.

Le retour de la peur

Le « discours de vérité » des chefs d'Etat peut rassurer. Il peut aussi accroître le sentiment d'insécurité des citoyens. Le ton dramatique et les mesures à la hâte qui rappellent les périodes de guerre provoquent ce qu'ils sont supposés prévenir et éviter.

Jeudi 12 mars, « ... Avec beaucoup de gravité et de lucidité... », « confiance dans la science », dans son allocution télévisée E. Macron parlait de la « plus grave crise sanitaire qu'ait connue la France depuis un siècle ».

« Nous ne sommes qu'au début de cette épidémie, et partout en Europe, elle s'accélère », a prévenu le président. « Malgré nos efforts pour le freiner, le virus continue de se propager ».

« Les plus grands spécialistes européens (...) les meilleurs virologues, les meilleurs épidémiologistes, des spécialistes de grand renom, des cliniciens aussi, des gens qui sont sur le terrain (...) tous nous ont dit que malgré nos efforts pour le freiner, le virus continue de se propager et est en train de s'accélérer. Nous le savions, nous le redoutions. »

24,8 millions de téléspectateurs ont suivi le discours du chef de l'Etat. Un record historique (aussi bien en termes de téléspectateurs, qu'en termes de diffuseurs) à double tranchant...

Ce record a été battu lors de son intervention du lundi 16 mars suivie par 35.3 millions de téléspectateurs.

«Nous sommes en guerre»5

La proclamation sentencieuse de cette guerre est une métaphore et cela pour deux raisons :

1.- On ne fait la guerre qu'à d'autres hommes et d'autres pays. On ne fait pas la guerre aux virus, au réchauffement climatique ou à la pollution.

2.- L'état de guerre auquel fait allusion de président Macron n'a qu'un seul objet : la mobilisation dramatisée des Français contre l'extension de la pandémie virale.

Incidemment, il n'est pas interdit (bien que nul ne songerait à en faire part publiquement, étant données les circonstances), de penser que le président veut créer un consensus autour de sa personne en vue des prochaines échéances électorales, proches et lointaines. Car, en période de crise, les citoyens légalistes se rassemblent autour de leurs dirigeants.

Et cela, E. Macron, dont la popularité chancelle depuis de nombreux mois, le sait parfaitement.

A partir du moment où personne ne voit le virus et que l'ennemi reste invisible, tout relève de la confiance placée (ou non) dans les dirigeants et dans les scientifiques.

Autant dire que pour l'homme ordinaire, il s'agit d'un acte de foi, celle que jadis on accordait (que certains accordent toujours) aux hommes de culte.6

Le « Nous sommes en guerre » de E. Macron fait écho au « Il y a de quoi avoir peur » de F. Hollande du 13 novembre 2015. « Mais il y a face à l'effroi une Nation qui sait se défendre, qui sait mobiliser ses forces, et qui une fois encore saura vaincre ».

Sur deux siècles, au moins, combien cette voix transhistorique ne s'est-elle pas levée pour appeler à la résistance et à la mobilisation contre l'adversité ?

«Solidarité européenne»

L'Union Européenne a mis en oeuvre depuis le début des années 1950 les institutions et traités qu'il fallait pour construire un espace économique et financier à peu près cohérent.

Il manquait naturellement l'essentiel : un mode d'emploi pour la conduite d'une politique sociale, fiscale, diplomatique et de sécurité commune qui aurait pu donner tout son sens à l'économie, à la monnaie et aux finances. Et c'est justement cette défaillance qui a été observée en Europe à la faveur de cette crise épidémique. Face à une épidémie d'une singulière gravité, on retourne par réflexe au «chacun pour soi» et aux tractations entre capitales.

A la veille de la décision française du passage à la phase III épidémique, c'est vers ses partenaires italiens et allemands que le président français se tourne pour leur faire part de ses projets, pas vers Bruxelles qui a été totalement ignoré et formellement informé par la suite.

Allons plus loin... et doutons un peu.

Un des piliers de la doctrine française de défense, plus précisément dans sa composante nucléaire, est de mettre sa « force de dissuasion » (« force de frappe ») à la disposition de ses partenaires européens.

Ce serait un des apports de la France à la construction de l'Union. Certes, la fin du conflit est-ouest et le retour des forces françaises au sein du commandement intégré de l'OTAN (c'est-à-dire sous commandement américain) relativisent singulièrement cette contribution.

Cependant, au regard de l'expression de la « solidarité » européenne à la faveur de la crise actuelle, qui ne s'interrogerait sur la réalité du secours effectif que s'apporteraient les membres d'une Union si prompts à se replier sur leurs stricts intérêts nationaux ?

Cette question n'est pas nouvelle : elle a été aussi posée à propos de la valeur réellement opérationnelle de l'article 5 du Traité Atlantique.

La solidarité des réprouvés

Dans le désordre, les Européens s'isolent les uns des autres et se barricadent derrières leurs intérêts. Avant cela, associés dans une réclusion identique, Chinois et Italiens, les deux premiers et principaux foyers de la pandémie, ont été mis à l'index.

Les Français ont observé avec quelque dédain comment les Italiens se dépêtraient avec la contamination et certains d'entre eux s'en étaient gaussés. Très tôt, avant même D. Trump, l'épidémie a porté le nom de son responsable : « le virus chinois ».

Les clichés ont la vie dure : « Les Italiens, comme tous les peuples méditerranéens, sont souvent représentés par ceux qui ont des préjugés et nourrissent des stéréotypes comme désorganisés, indisciplinés, peu fiables. »7

Mieux, l'appel au secours lancé par les Transalpins à leurs partenaires européens avait été ignoré : l'Allemagne et la France, ne tenant compte que de leurs seuls intérêts nationaux, oubliant la solidarité européenne, ont interdit toute exportation des masques respiratoires demandés. C'est la Chine, elle même sévèrement aux prises avec le virus, qui leur est venue en aide. Un cargo en provenance de Shanghaï est arrivé avec à son bord neuf médecins, des techniciens, trois tonnes de fournitures, des combinaisons, des appareils pour diagnostiquer le virus et plus un millier de masques respiratoires. Ce dernier chiffre est important puisque l'Italie n'en possédait alors que 3.000.

« Le peuple chinois n'oubliera jamais le soutien précieux apporté par l'Italie quand la Chine traversait les moments les plus difficiles dans la lutte contre le virus», explique le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi.8

Certes, l'Italie est l'un des partenaires commerciaux les plus importants de Pékin. Rome n'a pas caché son intérêt pour l'idée des «Nouvelles routes de la soie» porté par le Président chinois Xi Jinping.

Le 23 mars 2019, l'Italie signait un protocole d'accord qui scellait son entrée au sein de ce vaste projet d'infrastructures terrestres et maritimes lancé par Pékin en 2013. Une décision qui avait été très mal accueillie à l'époque par Bruxelles... et Washington.

Ceci expliquerait-il cela ?

En réalité, derrière l'absence apparente de solidarité, sourd, entre autres griefs, l'absence de confiance traditionnelle entre les pays, et précisément entre les pays composant l'Euroland : les pays excédentaires de l'ancienne zone mark n'ont aucune confiance envers les pays déficitaires, excessivement endettés, qui trahissent régulièrement leurs engagements et qui pourraient prendre prétexte de la pandémie pour non seulement ne pas réduire leurs déficits, mais au contraire les accroître.

L'Allemagne serait alors placée en mauvaise posture, car ne pouvant décemment refuser un geste d'assouplissement des règles de Maastricht sous peine d'être traitée d'inhumanité, un compte en banque à la place du coeur, et renvoyée à ses forfaits du passé, toujours là pour la culpabiliser.

Cela n'empêche pas Olaf Scholz, le ministre allemand des finances de tenir pour prématuré le recours au Mécanisme Européen de Stabilité (MES), créé au début des années 2010, afin de libérer pour les pays de la zone euro qui le demandent des moyens importants pour soulager leurs dettes souveraines.

Inversion des images et confusion des repères

Lundi 16 mars tout change. La Chine, d'abord traitée d'affreuse dictature qui enferme ses concitoyens, devient ensuite un modèle de réponse à la pandémie. Il faudrait relire ce qui a été écrit sur la construction d'un hôpital en quelques jours près du foyer épidémique, entre admiration et répulsion.

Depuis, certains s'interrogent sur les vertus des « démocratures »...

De pestiférés infréquentables les Italiens deviennent un laboratoire novateur à imiter. Le Conseil scientifique français installé par le gouvernement recommande des mesures de confinement « à l'italienne » contre le coronavirus, lors de la visioconférence réunissant Edouard Philippe, les chefs de partis et les associations d'élus.

Darwinisme insulaire britannique

Forfanterie anglaise : « Brouillard sur la Manche. Le continent est coupé du monde »

Boris Johnson joue à W. Churchill :

virus, nazi même combat.

Johnson a annoncé sur un ton solennel que le pays traversait « la plus grave crise sanitaire d'une génération » et qu'il ne comptait prendre aucune mesure sévère pour tenter de l'enrayer. Le premier ministre s'était refusé à prendre trop vite des mesures de «distanciation sociale», comme fermer les écoles ou interdire les rassemblements.

Il se targue d'une stratégie «basée sur la science», suggérant que celle des autres pays n'est pas aussi rationnelle. Le gouvernement britannique espère favoriser le développement d'une «immunité collective» au sein de la population qui développerait en majorité une forme légère du coronavirus. Selon le conseiller scientifique du gouvernement Patrick Vallance, un tel processus pourrait fonctionner si 60% de la population était atteinte. Les tribulations britanniques complètement illisibles avant et après le Brexit ne devraient pas cacher de vraies questions éthiques posées dans le traitement de l'épidémie du coronavirus.

«Geste barrière» et «efficacité prospective»9

Les valeurs en temps de guerre.

Compte tenu des moyens objectivement limités face aux besoins, de la rareté de la ressource et de l'urgence, des médecins italiens se disent contraints à la hiérarchie des malades et consentent explicitement, publiquement à faire des choix entre les patients à soigner ou à sauver, compte tenu de la différence de leurs espérances de vie, de la gravité de leur situation, de l'urgence de leur affection... privilégiant les plus jeunes et délaissant délibérément les plus âgés, les plus malades...

Toute la question revient à s'interroger sur les conditions politiques (toutes les autres conditions en dérivent) qui permettent de contourner habilement la question de l'« efficacité prospective » et de continuer d'affirmer hautement que toutes les vies se valent et méritent d'être sauvées. On touche là à un des principes fondateurs de la « civilisation » européenne et à ses « racines » gréco-romano-chrétienne. Cette question renvoie aux limites des valeurs, abordée plus haut.

La sécurité, entre le primordial et le superflu

Lors d'un point sur la situation, samedi 14 mars, le premier ministre Édouard Philippe a annoncé la fermeture des « lieux non-essentiels à la vie » quotidienne, jusqu'à nouvel ordre. La « civilisation des loisirs » voit se fermer la majeure partie de ses temples : bars, cafés, cinémas, clubs de vacances, stations de ski et de villégiature estivale, théâtres, salles de spectacles, parcs, jardins... avec tous les services qui gravitent autours et qui en conditionnent l'existence : aéroports, gares, hôtels, restaurants, animations, agences de voyages...

Les compétitions sportives sont interrompues en urgence : les Players Championship de Golf (à Ponte Vedra Beach en Floride) s'arrêtent après le premier jour, idem pour le championnat du monde de biathlon en Finlande (à Kontiolahti), report des matchs de la Ligue des Champions de football et de l'Euro de foot... Et certains songent à un sort semblable pour les Jeux Olympiques au Japon.

Le 73ème festival de Cannes, c'est décidé, n'aura pas lieu10. Le plus grand rendez-vous cinématographique du monde qui devait se tenir du 12 au 23 mai n'aura pas d'édition 2020.

Après la fermeture des écoles, des lycées, des universités et des entreprises, même le centre spatial de Kourou se met en congé et suspend ses lancements : les fusées Ariane, Vega, Soyouz devront attendre. Dans la Station Spatiale Internationale, à 400 km de la surface de la Terre, les astronautes, cosmonautes... observent avec perplexité et inquiétude ce qui se passe sous leurs yeux ébahis.

L'Amérique du Nord et l'Europe de l'Ouest, dès la fin des années 1980, ont fait voyager leurs usines et se sont débarrassé de leurs industries polluantes, en les délocalisant dans les pays pressés d'« émerger », là où il n'existe pas de police de l'environnement, là où les transnationales ne souffrent pas de déséconomies qui grèvent leurs coûts de production et leurs profits, là où les poissons et les oiseaux ne déposent pas plainte, là où les réglementations sont accommodantes, les salaires faibles, les cotisations sociales (les « charges ») inexistantes, les syndicats réduits au silence, là où la démocratie est une vue de l'esprit seulement évoquée pour les pays qui résistent aux IDE.11

Les usines au sud et la qualité de l'environnement au nord.

C'est donc de ces activités « non-essentielles » qu'il faudra se priver aujourd'hui pour sa sécurité. Or, ce sont ces lieux et ces activités qui font l'essentiel des activités économiques et sociales et sur eux que repose la puissance du monde occidental.

Toutes ces annulations auront un coût économique, social, financier... et, sans nul doute, politique, impossible à chiffrer.

Par ailleurs, la numérisation qui ne peut que très partiellement compenser cette privation, accentue la séparation des hommes les uns des autres et va dans le sens de la sécurité sanitaire qui prêche l'isolation, le confinement salutaire.

La crise épidémique est loin d'être finie. Les décisions à échelle nationale, régionale et internationale sont prises dans la précipitation et souffrent d'un manque évident de coordination et peut-être d'efficacité, malgré les résultats qui semblent venir de Chine et d'Italie.

Les événements que nous vivons aujourd'hui produisent de l'irréversible dont il est difficile, du fait même de notre situation au coeur de la tornade, de dériver et d'anticiper le monde qu'ils vont engendrer.

Notes :

1- La littérature de science fiction est abondante. Pour la fiction médiévale, lire le roman brillant (Prix Hugo 1993) de Connie Willis, « Le Grand livre ». J'ai lu, 1994, 703 p. Pour une dramaturgie plus contemporaine et très proche de celle que connaît le monde aujourd'hui, je recommande le récit de Frank Herbert, « La mort blanche », Robert Laffont, 575 p. Les films catastrophes sont nés avec le cinéma, mais pour le cinéma actuel, c'est le début des années soixante-dix qui en fixe les principaux traits, en particulier avec « Tremblement de terre », sorti en 1974, réalisé par Mark Robson dont la sémiologie sera reprise dans les superproductions ultérieures.

2- Depuis plus d'une semaine, les magasins alimentaires sont envahis un peu partout en Europe par des clients qui s'arrachent papier toilette et autres produits tels les pâtes et boîtes de conserve, laissant ces rayons vides dans nombre de magasins. Dans certains cas la police a été obligée d'intervenir.

3- Même les « maisons closes » sont fermées en Allemagne. On sourirait en songeant au « pléonasme » d'Arletty si la situation n'invitait pas à la réserve.

4- L'Espagne, neutre pendant la Première guerre mondiale, n'avait pas de censure. La presse espagnole en a révélé l'existence la première. C'était ainsi que la grippe devint « espagnole ».

5- Formule trois fois scandée par E. Macron lors de son allocution, lundi 16 mars au soir.

6- Les orthodoxes russes continuent d'embrasser leurs icônes. En Inde, des membres et partisans du groupe All India Hindu Mahasabha, ont célébré un rituel du feu, chanté des hymnes et bu de l'urine de vache dans des tasses en argile lors de ce rassemblement, persuadés que ce breuvage les protègerait du coronavirus. De très nombreux hindous considèrent la vache comme un animal sacré et ont répandu au cours des dernières années des assertions selon lesquels l'urine de ce ruminant aurait des vertus thérapeutiques. La semaine dernière, un député du Bharatiya Janata Party (BJP) de M. Modi a suggéré que l'urine et les bouses de vache pouvaient soigner la maladie due au coronavirus. Certains membres du parti nationaliste hindou du Premier ministre Narendra Modi ont également affirmé que l'urine de vache avait des vertus thérapeutiques et qu'elle pouvait même soigner des cancers. (AFP, S. 14/03/2020). Pour la première fois de son histoire, le sanctuaire de Lourdes à fermé ses portes.

7- Lettre de remerciements aux Algériens, de Pasquale Ferrara ambassadeur d'Italie en Algérie (El Watan, L. 16 mars 2020). Il rappelle : « Le système de santé italien est parmi les meilleurs dans le monde : (...) nous sommes à la pointe du diagnostic de haute technologie, nous avons l'un des meilleurs réseaux nationaux pour les transplantations d'organes et nous sommes le premier fabricant de médicaments de l'UE. »

8- Mercredi 05 février un avion d'Air Algérie avait transporté un don de l'Algérie à la Chine : 500 000 masques à trois couches, 20 000 lunettes de protection et 300 000 gants. Pékin a officiellement remercié Alger pour cette aide médicale. Au retour, le vol spécial d'Air Algérie a récupéré 48 personnes rapatriées de Wuhan (31 ressortissants algériens, majoritairement des étudiants, 10 Tunisiens, 3 Libyens et 4 Mauritaniens, à la demande leurs pays respectifs) ont été placées en quarantaine durant quatorze jours (la durée de l'incubation du virus) à l'hôtel Marsa, à l'ouest d'Alger. (Le Point, mercredi 05/02/2020)

9- Cette efficacité est approchée sous un nombre élevé de critères qui détermineraient la chance de survie qu'aurait tel ou tel patient choisi plutôt qu'un autre. Arbitrage du seul ressort du ou des médecins.

10- Officiellement, la décision sera prise le 16 avril.

11- Lire. Judet Pierre (1981) : Les nouveaux pays industriels. Les éditions ouvrières. Paris, 168 p. Wisner Alain (1985) : Quand voyagent les usines. Syros, Paris, 196 p.

*Professeur associé à la retraite. Université de Strasbourg.