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Toile gazière israélienne à l’est de la Méditerranée

par Akram Belkaïd, Paris

Avec régularité, fort de ses découvertes de gisements en offshore, Israël tisse un véritable entrelacs gazier dans l’est de la Méditerranée. On sait depuis quelques années que les grands fonds orientaux méditerranéens abritent d’importantes quantités de gaz naturel. L’évolution de la technologie qui permet d’excellents taux de récupération mais aussi les relations diplomatiques nouées par l’État hébreu dans la région lui permettent de développer des gisements qui sont susceptibles de refaçonner la géopolitique du Proche-Orient mais aussi de l’Europe du Sud.

Quatre pays clients ou partenaires

Quatre pays, au moins, sont désormais liés à Israël et à son gaz naturel. Le premier d’entre eux est la Jordanie. Le royaume hachémite est l’un des deux seuls pays arabes à avoir signé un accord de paix avec Tel-Aviv. En 2016, les deux parties ont conclu un accord de 10 milliards de dollars pour la livraison de 45 milliards de mètres cubes de gaz naturel sur une période de 10 ans. La livraison se fera via un gazoduc dont la construction est en phase d’être lancée et qui passera par le nord de la Jordanie.

Cette année, en février, Israël a aussi annoncé la conclusion d’un accord entre la société israélienne Delek, l’égyptien Dolphines et l’américain Noble Energy (déjà impliqué dans l’accord gazier jordano-israélien) pour la fourniture de 64 milliards de mètres cubes de gaz naturel sur 10 ans.

Pour mémoire, l’Égypte est l’autre pays arabe à entretenir des relations officielles avec Israël. Dans les deux cas, jordanien et égyptien, l’objectif est de permettre aux deux pays acheteurs de répondre à l’augmentation de leur demande énergétique, notamment la consommation d’électricité. Plusieurs observateurs ont relevé aussi que les opérations sont confirmées par les États concernés même si les opinions publiques jordanienne et égyptienne sont très réticentes à l’idée de s’éclairer ou de se chauffer grâce à du gaz exporté par Israël.

Les deux autres pays avec lesquels Israël effectue un rapprochement sur le plan gazier sont Chypre et la Grèce. Tous les trois sont liés depuis 2017 par un projet de construction d’un gazoduc qui alimenterait la Grèce à partir des gisements méditerranéens contrôlés par Nicosie et Tel-Aviv. La capacité concernant ce projet est de 5,8 milliards de mètres cubes.

Trois pays sous pression

Dans cette recomposition du paysage énergétique en Méditerranée orientale, certains pays font office de perdants ou, tout du moins, semblent marginalisés. Le premier est le Liban qui a pris beaucoup de retard pour se lancer, à son tour, dans l’exploitation des gisements offshore. De plus, Beyrouth devra tôt ou tard se confronter à la question des disputes territoriales avec Israël, les deux pays revendiquant chacun une zone maritime où, justement, existent des gisements gaziers. Le second est la Syrie. Dans l’état actuel des choses dans ce pays, Damas a d’autres urgences à régler même si les entreprises russes et chinoises se disent prêtes à exploiter les gisements au large de la ville de Lattaquié. Enfin, la Turquie n’est plus le partenaire «naturel» d’Israël dans la région. Conséquence des tensions politiques récurrentes entre les deux pays, Tel-Aviv n’envisage plus de vendre son gaz à Ankara et a gelé le projet d’un gazoduc reliant les deux pays.