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Du non-sens et du manque de confiance !

par Slemnia Bendaoud

Pour une gouvernance qui manque de lumière dans ses idées, il ne sert à rien de chercher après de faux-semblants pour faire porter la responsabilité à la faible lueur de la bougie dans l'éclairage à apporter à la déjà très sombre atmosphère où baigne la communauté.

Lorsque le bon sens fuit l'esprit, gambade dans son éperdue balade, c'est le manque de confiance qui s'installe avec armes et bagages dans la conscience de ceux à qui échappe la gestion de la chose publique.

On ne peut donc raisonnablement ? et contre la logique de la nature - privilégier dans sa stratégie le principe du statu quo et sur un autre plan miroiter au peuple un semblant d'agir dans le sens d'un contexte dynamique qu'impose la science et le cours de l'histoire.

On ne peut forcément que tomber dans le phénomène de la triche, du mensonge, de la combine, de la ruse, du clientélisme, de la fraude, du compagnonnage, du clanisme et autres maux sociaux qui rongent à présent la société algérienne.

On fera inéluctablement, sans remords, dans ce non-sens qui suscitera le manque de confiance à tous les niveaux et strates de la société algérienne. On se condamnera à montrer aux autres une voie et à en choisir pour soi une tout autre !

Voilà plus de trois décennies qu'Ahmed Ouyahia est posté - à intervalles réguliers, sinon à répétition - aux plus hautes fonctions du pouvoir. Il aura fait dans cet atermoiement si cher une affaire qui lui fera dire et surtout faire une chose et son contraire !

Pour soutenir tantôt une idée tantôt son opposée, ou même tenter de nous convaincre plutôt de ce choix que de celui-là, pour finalement nous fausser compagnie et totalement après changer de raisonnement.

Arriver à changer aussi vite, et à répétition, de vision, d'opinion et de position implique un manque flagrant dans la stratégie du pouvoir en place. Le délitement de la responsabilité justifie lui aussi cette mauvaise foi pour laisser les choses en l'état. Mettre deux fers au feu est cette ruse de guerre qui a déjà montré ses limites.

Et la vie continue? ! Toute chute n'annonce forcément ou bien évidemment guère la fin du monde. Pourvu que celui qui tombe de si haut sache soigneusement s'épousseter le derrière et aussitôt après ou très rapidement se relever de sa déconvenue.

La pluie qui nous tombe si irrégulièrement du ciel ne nous annonce-t-elle pas le meilleur des commencements qui puissent exister à travers le monde ? Sans le moindre détour ou encore possible renoncement !

A nous donc de croire après en cet espoir de réaliser les grandes moissons projetées ou celles très attendues, et d'engranger la contrepartie de l'effort fourni comme tribut à la vie au quotidien, afin de persévérer dans cette voie du progrès et du travail fécond et bénéfique au profit de la société.

Croire en nos forces et potentialités constitue déjà un véritable gage de réussite.

Dans ce grand chapitre des vrais téméraires et autres potentiels clients des ascenseurs sociaux ou même très naturels escaliers de la vie en société, l'exemple parfait nous est fourni - et à répétition, s'il vous plaît ! - par le Phénix dans son génie assez singulier de se remettre en cause, de se reconsidérer ou de se repositionner.

Savoir si promptement se relever après avoir été voué aux gémonies de la géhenne est déjà en soi une vraie force de caractère chez l'individu qui lutte de tous ses efforts pour la survie et résiste courageusement face aux grandes difficultés qu'il rencontre sur son chemin et affronte avec cette grande détermination d'un vrai guerrier.

Agir de la sorte conduit inévitablement l'être humain à parfois forcer le destin sans jamais renoncer à son projet ou même succomber devant les vicissitudes qu'il rencontre au quotidien, à l'effet de se forger une grande personnalité.

Et si telle est la nature des grands héros de ce monde contemporain, nul ne peut leur dénier l'effort qu'ils auront fourni dans le seul but de s'approprier avec mérite cette grande stature qui les distingue du reste de l'humanité.

C'est donc à ce seul prix que l'on acquiert l'étoffe des hommes très respectés de notre vaste univers. Tout le reste n'est que littérature de mauvais goût dès lors que la cérémonie officielle des médiocres élevés au rang des grands seigneurs prend fin.

Dans notre conscience, nous sommes tous appelés quelque part à en faire une très sévère critique pour, à la limite, se dédouaner de lui accorder toute cette importance imméritée, spoliée, conquise par la triche et la ruse politique.

Ce retour nécessaire à la noble sagesse nous remet si souvent sur les rails pour constamment nous remettre en cause. Cependant, dans un monde miné par un opportunisme sans bornes et une hypocrisie politique sans limites, pareille chose n'est guère possible.

Car l'acquis de conscience en est totalement absent. Tout comme d'ailleurs ce projet de société la plupart du temps défendu sans grande conviction.

Dans ce grand décalage entre le sens de la parole et la notion de l'acte accompli, l'intention donnée et l'action contraire entreprise, le projet envisagé et la finalité aussitôt dégagée, l'objectif visé et le résultat réalisé, les apprentis-politiciens, en vieux guerriers d'une gouvernance qui refuse par des moyens détournés, indexés à la grande ruse, le principe même de l'alternance au pouvoir, montrent des signes inquiétants quant à la grande difficulté de la donne politique algérienne à s'inscrire en droite ligne avec les règles en la matière du monde politique contemporain.

En vieux briscards d'une époque politique surannée, ils savent malicieusement se placer dans la bonne direction du souffle du vent pour de nouveau monter les vagues qu'il suscite et pousse vers l'avant, devenant par miracle des acteurs politiques encore et toujours d'actualité ou, plus grave encore, désormais plus utiles à la société.

Les deux béquilles du pouvoir - en se trémoussant et gesticulant à l'envi - jouent à l'orée de chaque consultation électorale à ce vilain jeu de l'utile à la communauté ou encore du chouchou des gouvernants du pays, dans le seul but de grignoter chez l'acolyte ou sur son dos quelques pans supplémentaires et miettes additionnelles, ou espace de connivence et de convenance, à engranger dans leur besace, à l'approche de tout sérieux test démocratique si savamment dévoyé et malicieusement déjoué.

Comme des voisines de palier ou de la cité, tout le temps hantées par cette jalousie très ancienne et bien pérenne qui les oppose et divise, ils jouent à leur numéro dans cette arène de théâtre de la vie à ciel ouvert, dans la seule optique de davantage berner leur monde en recourant à ces toutes vieilles méthodes et très anciens procédés dont se détourne la société.

Et lorsqu'un très haut cadre de l'Etat algérien, redresseur de son état ou sur le point d'être lui aussi redressé, plutôt en réelle perte de vitesse ou en manque flagrant d'argumentaire politique, arrive à confondre si aveuglément et aussi bassement les trois lettres dorées du sigle qui a eu le mérite de libérer le pays du joug colonial avec l'étiquette se rapportant au nom d'un banal voisin de palier du grand palais du pouvoir, qui dissimule astucieusement son lien de sang, l'on ne peut que vraiment se désoler à propos de ce qui se passe au niveau de la plus haute sphère politique nationale.

Les raisons sont multiples et les dérives ne se comptent désormais plus. Tant le désastre y est grand et l'éthique politique y est complètement bafouée et vraiment piétinée. Dans cette foire-fouille de mots auxquels on tord volontairement le cou pour leur donner le sens ou le contour qui ne leur sied jamais, on est comme emporté de force dans le mouvement continu d'une agitation fortuite dont on ignore les menus gestes.

Dans pareille alternative de toute « République du mensonge », tout « futé apprenti-homme politique » s'improvise un solide statut de « Savant menteur » et surtout celui de « très grand dribbleur », sachant tout juste slalomer entre le verbe peu correct et le sens péjoratif à lui attribuer, entre l'épithète contre-nature collé au mot usité et le très juste attribut qui va avec.

Du coup, le très vieux FLN qui a enfanté malgré lui le très problématique ou énigmatique RND, ce non moins vieil ou moustachu « garnement politique de circonstance », dans la douleur dictée par cette succession réalisée en marge de la véritable donne démocratique, est considéré par la bouche même de celui qui officie encore et toujours à la fois au cœur du pouvoir exécutif et à la tête de cette « organisation pseudo-politique satellitaire », juste comme un cousin germain partageant avec lui le grand palais des « aïeuls politiques » de la tribu de leurs lointains ancêtres.

« En de vrais cousins germains, nous avions, il n'y a pas si longtemps encore, vécu juste en de quelconques voisins » devait depuis une année balancer à la presse Monsieur Ahmed Ouyahia*, comme pour enfin se soulager indirectement de cet encombrant et non moins tonitruant Amar Saâdani, récemment viré d'une manière peu orthodoxe du siège de son statut de vrai rival ou concurrent direct, lequel émarge, cependant, au même bord politique et rive opportuniste qui sait, elle aussi, faire la cour au vrai pouvoir.

Assis sur cette même « branche politique» dérobée au peuple ou indûment soutirée à la société, que scient à l'usure du temps les plutôt sombres jours de la vie politique du pays, ces deux fers de lance ou vraies béquilles des « pirouettes politiques » se sentent par conséquent, au moindre mouvement du vent soufflant sur la région, si solidaires et très complémentaires entre eux.

Ils s'en inquiètent vraiment à la moindre frousse que provoque une gouvernance qui éternue et tousse continuellement, tel un ancien engin grippé qui refuse manifestement de fonctionner ou un vieillard, pris de grande lassitude et atteint par l'âge et la maladie, qui ne peut encore marcher sur ses deux pieds !

Cette pièce de théâtre, se jouant en plusieurs épisodes, sans public et à ciel ouvert, et qui a assez duré, a fini par provoquer une bien réelle lassitude du peuple algérien. Il en est, à vie, absolument dégoûté ! Vraiment blasé !

Et pour conclure ce ras-le-bol généralisé qui se dégage de ce « non-sens politique » ayant enfanté ce « manque de confiance » récurrent des citoyens algériens, le conte qui suit, en situe, à la fois, la bonne morale à retenir, mais aussi les tenants et les aboutissants d'une telle situation :

On raconte qu'autrefois un directeur avait questionné trois de ses plus proches employés sur l'explication à fournir au sujet de l'addition de deux plus deux (2+2) qui donnait le chiffre cinq (05).

Et aussitôt après, les trois réponses fusaient tel un éclair :

- Le premier répondit sans même réfléchir : « Oui, Monsieur le Directeur, c'est exact. Le résultat est très correct : deux et deux font bel et bien cinq (05) ! J'en suis persuadé et je vous le confirme, séance tenante. »

- Le second, lui, ne remet pas totalement en cause le résultat obtenu par le premier employé, mais pose cependant cette condition qui consiste à lui en rajouter le chiffre « un » pour les besoins de l'opération.

- Le troisième, quant à lui, reste plutôt inflexible, catégorique, vraiment impartial, très radical, réfutant tout à la fois : le raisonnement adopté comme le résultat obtenu. Et sans vraiment trembler, il lui affirma tout de go : « Non, Monsieur le Directeur, vous êtes dans l'erreur, deux et deux font tout juste quatre ! »

Aussi, le jour suivant, les deux premiers employés étaient fort étonnés en découvrant l'absence de leur collègue de travail. Renseignement pris, ils furent informés que celui-ci avait été mis en hibernation, remercié indirectement, laissé sur la touche provisoirement et fourré en stand-by accessoirement ou jusqu'à nouvel ordre !

Intervint alors l'Adjoint du Directeur auprès du chef de l'établissement pour enfin connaître les réelles causes à l'origine de la mise à l'écart du troisième employé. Et c'est à ce dernier de se justifier de la manière qui suit :

« Le premier est ce parfait menteur, se sachant lui-même expert en la matière, dont a vraiment besoin notre administration. Tandis que le second est plutôt fort intelligent, qualité dont il en est très conscient, mais qui demeure utile à la politique de notre groupe et institution. Par contre le troisième est, au contraire, plus juste, très franc, bien sincère envers sa conscience, ne pouvant s'y soustraire ou même se déjuger, dont le profil ne convient pas justement à nos besoins du moment ; condition qui nous pousse à s'en séparer, sans remords et sans avoir à nous justifier, car il est en mesure de nous compliquer la vie. »

Voulant sans doute faire le tour du propriétaire, et pour avoir le cœur net sinon rassuré quant à la possible ou prétendue succession de son adjoint au poste de Directeur, il lui posa cette question, en rapport avec l'équation analysée plus haut, bien autrement cette fois-ci, dans sa formule inversée pour mieux le détourner ou le débusquer, en l'apostrophant très vicieusement : « Et pour vous, Monsieur l'Adjoint, le chiffre cinq (05) est-il vraiment le résultat auquel aboutit l'addition de deux (02) avec deux (02) ? »

En vieux singe et très rodé personnage à ce genre d'exercice fastidieux, l'adjoint ne cherchait à jamais s'aventurer sur ce terrain miné. Il lui répondit avec beaucoup de tact et une grande prudence par : «Monsieur le Directeur, j'ai très attentivement écouté votre « savante question » à laquelle je n'ai malheureusement pu lui trouver la moindre réponse. Mes semblables doivent complètement s'effacer devant le génie affiché par leur supérieur, vous comprenez ! »

Revenant à lui-même, le Directeur lui confia avec beaucoup de Savoir et non moins d'amertume : « Vos propos témoignent justement de la « fibre hypocrite » qui écume notre administration en contrepartie de quelques prébendes et autres dividendes. Vous faites partie de ce genre de personnage très prisé au sein de nos institutions publiques. Vous symbolisez cet Art de vous défaire sans grande peine de tous vos potentiels concurrents, de supplanter tous les prétendants à vous déloger de votre tour d'où vous contrôlez tout ce qui se déroule au sein de la Maison. »

Tel est aussi vu notre vécu tragique et terrifiant du moment. A l'heure où le beau s'éclipse devant ces laideurs sans pudeur d'une société en perte de ses vrais repères et autres bonnes valeurs. Au point où l'apparat du charnel défie la sagesse de l'esprit et où le pilleur des richesses de la communauté est porté en triomphe pour mettre à trépas les êtres doués, sincères et très honnêtes.

Ainsi jour après jour, la dérive de la société algérienne ne fait que s'empirer ! Que s'aggraver ! Le psychanalyste Freud, s'il était encore en vie, aurait certainement trouvé beaucoup de difficultés à pouvoir diagnostiquer ce mal algérien, né de ses comportements incompréhensibles ou très opportunistes du moment.

Notre système de gouvernance, vu sous l'angle très réduit de cette administration objet du conte évoqué et l'esprit de ses dirigeants qui y officient, en est devenu, à cause de la ruse politique et de l'enrichissement sans cause, le vrai pourvoyeur, cette machine qui produit ce monstre qui mettra à genoux le pays.

Quel est donc ce futé Algérien en mesure de cataloguer Bahaeddine Tliba, lorsque celui-ci s'empresse de brandir à coups de pognon ce choix risqué du 5ème Mandat présidentiel au moment où l'intéressé lui-même n'en dit le moindre mot ?

Le fait-il à la place du premier employé ou du second, du Directeur ou de son adjoint ? Sinon est-il le plus culotté de tous pour le faire en portant l'habit de toutes ces personnes réunies ?

Une chose est sûre : il n'aimerait jamais s'identifier à ce troisième employé, viré par son employeur pour avoir dit juste et vrai, et parlé bien haut ! Lui, comme tant d'autres personnes, exerçant de très hautes fonctions étatiques !

(*) - Quotidien arabophone EL KHABAR de la première décade du mois de Novembre 2016.