Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Déconstruction européenne et divergences franco-allemandes

par Abdelhak Benelhadj

« En France on n'a ni hiver, ni été, ni principes ; mais exception faite de ces trois inconvénients, c'est un beau pays. » Mark Twain

Le paysage politique occidental (Amérique du nord et Europe de l'Ouest) ne cesse de surprendre et d'étonner. Et même d'inquiéter. Les instruments d'information, d'anticipation et de contrôle semblent pris au dépourvu. Du moins ceux dont le public a connaissance.

Pourtant, les principaux lobbys de l'industrie, des services et des finances ont mis au point des protocoles dynamiques, réactifs qui les mettent à l'abri des caprices populaires et des surprises que réservent quelques fois les impromptus de la démocratie représentative. Tout est à peu près entrepris au nom de libertés dont chacun mesure de plus en plus l'exiguïté de l'espace dans lequel réellement elles s'exercent, quelques fois au nom de la sécurité. Qu'on en juge.

- Personne n'avait sérieusement envisagé un Brexit. B. Obama s'était déplacé exprès en avril 2016 avertir les Britanniques de ce qu'il en leur coûterait de rompre avec le Continent : le rôle qui leur était dévolu depuis la fin de la Grande Guerre -dont on commémore le centenaire- et surtout depuis le début des années 1940. Le Brexit (Ô ironie et paradoxe !) est aujourd'hui administré par un Premier Ministre qui défendait le maintient du Royaume Uni dans l'Union.

- Personne n'avait vu venir au Bureau Ovale un cow-boy milliardaire facétieux, usant de Twitter comme d'une mitrailleuse qui « flingue » à tout va, court-circuitant les convenances ritualisées des primaires et des présidentielles américaines, empreintes de cette religiosité surchargée qui compense pour les jeunes nations l'absence de racines millénaires dans lesquelles se trouvent coincées celles qui prétendent s'en magnifier depuis la fondation du monde.1

- Tous les observateurs avertis (et les armées d'experts en météorologie électorale qui pullulent dans les rédactions et sur les plateaux de télévision français), prévoyaient un Juppé au premier tour, un Juppé au second et un autre Juppé au troisième, avec de nombreuses victimes collatérales et une multitude de fossoyeurs en chef. A telle enseigne que les gardiens autoproclamés de la Constitution redoutaient que la mode des Primaires ne remette en cause le principe même de l'élection au suffrage universel direct.

- Personne n'a vu venir un Fillon (copieusement « Canardé »), ni un Macron (que les « experts » traitaient de « baudruche »). La consécration d'une Le Pen commence à devenir une hypothèse vraisemblable. Tous les vendeurs de papiers et d'encarts publicitaires en mal de chalands applaudissent et espèrent de nouvelles « surprises »?

D'abord parce qu'à la jonction des cycles la situation appelle aux récapitulations. Les chiffres tombent les uns après et les autres, l'on peut se faire une idée de l'exercice écoulé et tirer des conclusions.

À la croisée des mandatures, les Etats et les entreprises en viennent aux bilans et aux projets, sous le poids d'une incertitude croissante sur la fiabilité des hommes et des institutions. Elu en novembre 2016, le président américain se saisit des leviers de commande de son pays et l'on demeure interrogatif à propos des axes politiques qu'il entend mettre en œuvre.

En Europe, des échéances électorales majeures rendent les unes après les autres leur verdict : Aux Pays-Bas à la mi-mars, en France au printemps, en Allemagne en ce mois de septembre.

Notons au passage que les élections législatives et présidentielles organisées au cours de cette année au Libéria, en Equateur, en Iran, en Hongrie, en Somalie, en Inde, en Algérie... n'intéressent que les tâcherons anonymes des cabinets ministériels et des centres de recherche plus ou moins officiels des think-tank publics et privés.

Un mythe : le « couple franco-allemand »

On a beaucoup abusé du « Traité de l'Elysée » (janvier 1963). Le « couple », le « moteur franco-allemand », « la clé de voûte »? ces expressions présument à tort d'une symétrie convenue et d'une lexicologie partagée de part et d'autre du Rhin. Elles sont à l'honneur dans la sphères politiques et médiatiques en France. Pas en Allemagne ! Ce malentendu vient de loin.

Additionnées, l'Allemagne et la France produisent globalement 50% du PIB de la zone euro et représentent 43% de sa population. Le reste se répartit entre les 17 autres membres de l'Euroland. Mais ces chiffres sont trompeurs. Et le deviennent de plus en plus. Ils suggèrent un partenariat équilibré qui n'est plus de mise. Les principaux indicateurs du tableau de bord de l'économie française sont au rouge. Et pas seulement en 2016.

Une part du malentendu vient de ce que les Français, prisonniers de l'histoire, en sont restés à 1945, confortés par la politique gaullienne face à la présence américaine en Europe. Le chancelier Adenauer et son homologue français y trouvaient chacun son compte. Mais aucun d'entre eux ne se faisaient d'illusions sur le poids d'une Europe réellement européenne. L'Amérique et ses alliés locaux y veillaient.

Le général de Gaulle connaissait ses marges de manœuvre. Jamais la France n'aurait pu constituer ni même initier une alternative à l'Otan. Seulement un contrepoids politique mineur mais suffisant pour ménager à Paris une certaine autonomie face à une Amérique empêtrée dans ses confrontations au Viêt-Nam, à Cuba, à la Chine et à l'Union Soviétique.

La bombe française visait le même objectif : doter Paris d'un crédit diplomatique et d'une « présence médiatique » que le contexte international plutôt hostile aux campagnes militaires US créditait d'une autorité dont les pays otanisés étaient dépourvus2. Si on ajoutait l'éloquence à la geste gaullienne, la « grandeur » française compensait largement la modestie objective de sa taille.

Malheureusement, les successeurs ont confondu les moyens et les fins. D'où les réveils douloureux quelques décennies plus loin. C'est d'autant plus ardu qu'ils ne disposent désormais plus ni des uns ni des autres. Avec des élites culturellement disposées à la subordination.3

- Commerce extérieur

FRANCE. Depuis 2003, la balance commerciale est continûment déficitaire. En 2016, le déficit s'est aggravé de l'ordre de 48 Mds euros. En 2012, Nicole Bricq, la ministre du Commerce extérieur, visait l'équilibre de la balance commerciale des produits manufacturés en 2017. Cet objectif est à l'évidence à oublier : La vétusté de l'industrie française est si dégradée qu'elle s'avère incapable de répondre à la hausse de la demande intérieure. Là où les importations ne comptaient que pour 21% en 1990, elles représentaient quelques 33% de la consommation au premier trimestre 2017, selon des chiffres de l'Insee. Cette contrainte limite considérablement toute amélioration du pouvoir d'achat global en France, si elle n'était pas accompagnée de mesures stratégiques fondamentales.

ALLEMAGNE. De l'autre côté du Rhin, la situation s'inverse. Quand la France bat des records de déficits, l'Allemagne bat des records d'excédents, et pas seulement dans le domaine du commerce. L'excédent des comptes courants allemands (solde commercial et des services) inscrit un nouveau record en 2016 à 297 Mds$ (278 Mds euros), dépassant ainsi celui de la Chine pour devenir le plus élevé au monde, selon Ifo, l'institut d'études économiques munichois. Il dépasse aussi le solde de 2015 : 271 Mds$.

Un tel montant équivaut à 8,7% du produit intérieur brut (PIB) en 2016 contre 8,5% en 2015 et dépasse donc largement le plafond de 6% recommandé par une Commission européenne, tourmentée par des soucis d'équilibre.

Les réserves d'or allemandes, évaluées à environ 130 milliards de dollars, sont les deuxièmes plus importantes au monde, après les Etats-Unis. L'Allemagne détient à peu près deux fois plus d'or que la Chine, selon le Conseil mondial de l'or (World Gold Council).4

Contrairement aux slogans faciles, politiquement rentables, régulièrement rapportés dans les médias, ce n'est pas avec les pays émergents et la concurrence de leurs bas salaires qu'il faudra en rechercher les causes des déficits hexagonaux. Le commerce français est centré sur l'Europe vers laquelle vont 60% de ses exportations et avec laquelle il réalise l'essentiel de son déficit. Le problème de la France est en Europe, ni en Chine, ni en Inde, ni en Afrique. Même si la France vient d'être remplacée par les Etats-Unis comme premier importateur de produits allemands.

De la compétitivité-coût à la compétitivité-prix

A écouter les patrons français préoccupés par le « coût élevé » du travail et la fiscalité, on en arriverait à penser que les salaires, les « charges » sociales et fiscales brident leurs créativité, dégradent leurs résultats, réduisent leurs investissements et détériorent les comptes extérieurs du pays. En un mot, ces conditions les pousserait, à leurs corps défendant, à la délocalisation et à la fuite des compétences.

C'est vrai que ces plaintes sont perpétuelles, invariables et universelles, sous toutes les latitudes. Le problème est que toutes ces contraintes sont très relatives.

La France connaît pourtant un taux de chômage structurellement élevé5. Tandis que la législation du travail sans cesse assouplie n'est pas favorable aux salariés ainsi limités dans leurs capacités de négociation. Le partage de la valeur ajoutée, ces trente dernières années, est plutôt en faveur des taux de marge. Et c'est surtout sous régime socialiste que les taux de salaire ont le plus souvent baissé.

Pour preuve : De tous les Etats de l'Union européenne, la France est le pays (le second mondial après les Etats-Unis, 111,6 Mds$ au second semestre 2017) où l'on distribue de plus gros montants de dividendes aux actionnaires (40,6 Mds$, +6.1%). « Seulement » 32,5 Mds$ en Grande-Bretagne et 34,1 Mds$ en Allemagne.

La compétitivité-coût de la France s'est améliorée ces dernières années grâce à la mise en place du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) et des baisses de charge des entreprises, généreusement octroyées sans contreparties ni conditions. Comme à l'époque de Yvon Gattaz (président du CNPF entre 1981 et 1986, père du président actuel du MEDEF) qui avait exigé et obtenu la disparition de l'autorisation préalable administrative de licenciement, contre la promesse de création de 400 000 emplois dont personne n'a vu la couleur?

Sur la seule année 2016, le coût salarial unitaire a augmenté en France de 0,9%, contre 1,3% en moyenne dans la zone euro et 1,9% en Allemagne. Les écarts sont encore plus marqués sur la période 2012-2016 : +0,8% en France contre +3,7 % en moyenne dans la zone euro et +9,1 % en Allemagne).

Comme on peut le constater dans le tableau joint ci-après, le coût différentiel du travail entre l'Allemagne et la France n'empêche pas la première économie européenne d'avoir un taux de chômage inférieur de moitié à celui de sa voisine.

L'écart n'a cessé de se creuser depuis 24 ans entre les économies française et allemande (©Oddo).

Il est vrai que la structure de l'économie allemande est bien différente. Les services à l'industrie, (notamment - grâce ou à cause - des lois Hartz, directeur du personnel de Volkswagen, entre 2003 et 2005, sous le mandat du chancelier Gerhard Schröder, SPD), ont été plutôt sacrifiés. Le statut et le travail des femmes, dans une certaine mesure aussi.

Ce qui n'arrange pas un vieillissement de la population qui ne saurait être entièrement compensé par une « généreuse » ouverture des frontières allemandes à l'émigration.

Autre comparaison, le nombre d'entreprises françaises exportatrices : 120.000 en France, le double en Italie et le triple en Allemagne.

Déjà en 2013, la France reculait dans le classement de la compétitivité du Forum économique mondial (WEF), passée à la 144e place mondiale pour ses pratiques d'embauche et de licenciement, à la 135e sur les relations sociales dans l'entreprise et à la 127e sur l'effet de la fiscalité sur les incitations à travailler. (Reuters le mercredi 04/09/2013 à 19:43)

Cette situation a une conséquence paradoxale : en l'état actuel de l'industrie et des règles commerciales en vigueur, l'hypothèse d'une (bien improbable et pourtant nécessaire) augmentation significative des salaires des Français ne peut être envisageable sous peine d'induire un creusement du déficit extérieur par l'importation aussi bien de biens de production que de biens de consommation que les entreprises françaises ne produisent plus (tout au moins pas en France).

Désindustrialisation

Cette situation est le reflet comptable de la détérioration des parts de marché. Selon l'Insee, la part de marché des entreprises pour les biens est tombée de 5,1% des échanges mondiaux en 2000 à 3,1% en 2015.

Selon COE-Rexecode, la baisse des parts de marché est fortement corrélée avec le recul du poids de la valeur ajoutée française dans la valeur ajoutée manufacturière de la zone euro. Celui-ci a encore légèrement diminué en 2016, pour s'établir à 13,4%, un nouveau plus bas jugé « inquiétant » (contre 17,3% en 2000 et 15,1% fin 2012). Un niveau qui, s'il s'était maintenu, les exportations de la France seraient supérieures de 170 Mds euros à leur montant actuel. (La Tribune, mercredi 21/12/2016, 15:06).

A contrario, portée par ses exportations l'Allemagne connaît une croissance de son PIB en 2016 en hausse de 1,9%. 1.1% seulement en France.

Compte tenu des taux de croissance de la productivité, en dehors d'une politique sociale (limitée par des déficits et un endettement sévèrement bloqué par Berlin via Bruxelles) et d'une savante présentation des statistiques, le taux de chômage restera durablement élevé en France.

Déficit et endettement

Alors que la France peine à réduire sous les 3% ses déficits budgétaires (Etat, collectivités territoriales, sécurité sociale) le gouvernement allemand, sous le contrôle de la cour de Karlsruhe, a constitutionnalisé la « Règle d'or » et s'interroge sur l'affectation de ses surplus budgétaires. A huit mois des élections, les politiques hésitent : réduire l'endettement et/ou les impôts (CDU) ou accroître l'investissement public. « Nous montrons que l'on peut faire les deux » déclare un membre du gouvernement.

Pendant que le gouvernement français se réjouissait que le déficit budgétaire 2016 prévu à 72,3 Mds euros, n'avait été « que » de 69,9 Mds euros, l'Allemagne annonçait un excédent budgétaire de 6,2 milliards d' euros l'an passé, après 12.1 Mds euros en 2015 (0.7% du PIB).

La capitalisation totale des Bourses américaines rapportée au Produit intérieur brut du pays retrouve le sommet atteint en 1999 (©BofA Merrill Lynch, Le Revenu, S. 03/06/2017).

F. Fillon, empêtré alors dans son étrange campagne présidentielle, faisait à son tour des promesses : « Mon objectif est de corriger cela et d'être aussi proches que possible de 3% en 2018 avec un objectif de zéro déficit en 2022 » soit dans 5 ans? (AFP le L. 23/01/2017, 19:44)

Ce qui est vrai du déficit l'est tout autant de l'endettement, près de 100% du PIB français. L'un fabrique l'autre. Et le tableau ci-dessus ne plaide pas pour la France. Le spread franco-allemand (entre Bund allemand autour de 0.5 et AOT français autour de 1.2) se tend au détriment de Paris où les élections présidentielles tournent au vaudeville et inquiètent ses partenaires et les marchés.

L'endettement des sociétés françaises non financières est passé en 10 ans de l'équivalent de 50% à 70% du produit intérieur brut (PIB), observait lundi 03 juillet l'Autorité des marchés financiers inquiète - après celle du subprime en 2007 - qu'une prochaine crise dans une économie mondiale dérégulée, entre déflation et « reflation », vienne aggraver la situation française. « Une exception en Europe » qui pourrait se traduire par des « problèmes de solvabilité » en cas de remontée des taux ou de « choc sur l'économie ».6

Image internationale abîmée, prestige international dégradé

La multiplication d'actes terroristes sur le territoire français pèse. Il en réduit l'attractivité - notamment touristique - pour les investisseurs étrangers.

« Aux Etats-Unis, le concept de guerre a été introduit pour les actes de terrorisme », tout comme en France, estime Christian Tuschhoff, expert des questions de terrorisme international à l'Université Libre de Berlin. Rien de tel en Allemagne. D'une part il s'agit de ne pas attiser les peurs, souligne le président du gouvernement de Saxe-Anhalt, Reiner Haseloff. « Nous ne sommes pas en guerre (...) et nous ne laissons pas les salafistes amener une guerre dans notre pays », a-t-il dit au journal Mitteldeutsche Zeitung. (AFP le V. 23/12/2016, 10:26)

La discrétion allemande est souvent confondue à Paris avec l'inaction. C'est vrai que Berlin a refusé d'intervenir dans les conflits où se précipitent Français et Britanniques (sous le discret - « leadership from behind » américain). Refus d'attaquer la Libye ou la Syrie. C'est vrai aussi que l'Allemagne a beau jeu d'évoquer l'abominable passé guerrier et mortifère pour se soustraire aux campagnes auxquelles ses partenaires la pressent de participer.

Deutsche Qualität

Les Allemands contribuent cependant, dans le cadre de l'OTAN, aux dépenses militaires qui lui sont peu ou prou imposées depuis la fin des années 1940. Mais elle en tire parti sur le plan industriel parfois mieux que leurs voisins français.

C'est la France qui abandonne la fabrication du Fusil d'Assaut de la Manufacture d'Armes de Saint-Etienne (Famas), l'arme des troupes de l'armée française depuis le début des années 1980. Il sera remplacé par le HK 416, un modèle fabriqué par Heckler und Koch, une société allemande. Un marché de 400 millions d' euros. « L'idéal aurait été que le nouveau fusil soit français. Mais ce que l'utilisateur veut avant tout, c'est une arme fiable ! » déplore l'ancien ministre socialiste Arnaud Montebourg, chantre du patriotisme économique.

Si on laisse de côté la com' des hommes politiques, la France ne pèse pratiquement plus dans les conflits internationaux. Elle est écartée des tractations dans les conflits syrien (désormais laissé aux Turcs et au Russes) et ukrainien où le format Normandie se réduit à un tête-à-tête entre A. Merkel et V. Poutine qui parlent tous deux allemand et russe.

Il en est de même en Palestine où, déjà sous Bush Jr. et B. Obama, le dossier est devenu une affaire exclusivement israélo-américaine. Quand ils évoquent la France la plupart des Israéliens et des Palestiniens haussent les épaules? par compassion ou par dépit.

Démonstration : qualifiée d'inutile et de contreproductive, Israël a refusé de participer à la « conférence pour la paix » organisée à Paris en grandes pompes le 15 janvier dernier.

Toutes ces questions sont en stand by attendant de voir plus clair dans la politique étrangère du président américain qui s'applique à brouiller les cartes et à se clamer « imprévisible ».

Le poids stratégique des Etats-Unis en Europe, directement et via des pays de l'Union plus étroitement sous son influence (en particulier les ex-PECO), limite les initiatives diplomatiques de la France et d'ailleurs de tout autre pays désirant déployer une stratégie spécifiquement européenne.

- Instabilité politique intérieur : « le pays malade de l'Europe »

A chaque élection depuis 1988, les Français changement de pilote à chaque échéance, à la différence de l'Allemagne où Mme A. Merkel fait partie du club très fermé des chefs d'Etat régulièrement réélue. Elle est aux affaires depuis 2005 et vient d'être reconduite aux commandes de son pays.

Au cours de la même période, la Maison Blanche et Elysée voient défiler les locataires.

Hors micros et caméras, une lutte souterraine, une guerre à fleurets (de moins en moins) mouchetés oppose Français et Allemands.

Des Allemands n'ont plus qu'une confiance très limitée en leurs partenaires qui ne tiennent pas leurs engagements et abusent des dépendances mutuelles intra-européennes. Un peu perfides ils susurrent (assez fort cependant pour être entendus) : « les Français veulent voyager en Première avec un billet de seconde » et avancent que les taux d'intérêt appliqués à la France seraient sans doute plus élevés si la France n'était pas dans l'UE cautionnée par l'Allemagne.

Ils sourient poliment quand ils entendent des Français bomber le torse et menacer de quitter l'Euroland ou l'Union?7

« Il y a deux styles de politique en Europe : l'allemand et le romantique », assène dans un entretien l'économiste Bert Rürup, « nous les Allemands nous aimons les règles, (...) un Français attrape des boutons quand il entend le mot ».

La situation est plus préoccupante qu'il n'y paraît. Les partis extrémistes qui viennent d'accéder au Parlement allemand, expriment tout haut ce que d'autres taisent : « Nous pouvons avoir une monnaie commune avec les Pays-Bas, l'Autriche, la Finlande ou les Etats baltes. Ils ont la même culture de la stabilité que nous. Mais les Français en ont une autre, sans parler des Italiens, Espagnols, Portugais et des Grecs. Ils ne veulent pas entendre parler d'austérité », estime le co-président du parti populiste allemand AfD, Jörg Meuthen, dans une interview au quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung.

« Personne ne veut expulser la France. Mais la France est naturellement un problème politique » dans la zone euro, renchérit le vice-président de l'AfD Alexander Gauland dans le même entretien. (AFP le D. 24/04/2016, 15:41)

Il n'y a qu'un quotidien français qui se pose en référence, pour oser titrer « La grande angoisse de l'industrie allemande » et, faisant mine de s'interroger interprétant à sa manières les conjectures allemandes, il devise : « Et si l'industrie allemande était à l'aube de son déclin ? Et si cette formidable machine à produire et à exporter, enviée et sûre de son modèle, était en perte de vitesse, en train de perdre le contact avec la marche de l'économie mondiale ? » (Le Monde, D. 05/02/2017, 17:54)

Avec un titre similaire en 2014 (« Le chant du cygne de l'économie allemande »8), l'AFP faisait écho aux spéculations pessimistes de l'économiste allemand Marcel Fratzscher. Il n'est pas interdit de rêver... En cette année électorale, à l'adresse de certains pays qui croient résoudre leurs problèmes en sortant de l'euro (suivez son regard?), M. Draghi président de la Banque centrale européenne (BCE) leur a répondu ce 02 février : « Les pays qui ont mis en oeuvre des réformes n'ont pas besoin d'un taux de change flexible pour parvenir à une croissance durable ». « Si la croissance de la productivité d'un pays est faible à cause de problèmes structurels profondément enracinés, le taux de change ne peut pas être la solution. » (Reuters le J. 02/02/2017, 16:14)

La situation est d'autant plus alarmante que l'économie française avait bénéficié d'un certain nombre d'avantages dont elle semble ne pas avoir tiré parti.

- Taux d'intérêt très faibles, ce qui réduit les coûts de son endettement (premier poste budgétaire après l'enseignement) ;

- Euro très compétitif vis-à-vis du dollar, avantageant la compétitivité-prix des produits français à l'exportation et réduisant d'autant celle des produits importés ;9

- Chute des cours des matières premières entamées à l'été 2014 avec un prix du baril de pétrole très bon marché, dont l'augmentation au second semestre a été très modérée ;

- Taux de croissance plus élevé en Allemagne qu'en France, ce qui aurait permis à la France d'améliorer son solde commercial avec son voisin.

Il est à craindre que ces conditions favorables ne puissent se présenter à nouveau.

- Les taux d'intérêt remontent aux Etats-Unis et poussent tous les autres à la hausse, en Europe comme ailleurs. Les spread franco-allemands se creusent peu à peu au détriment des finances publiques françaises.

En outre, les marchés (contrairement au mythe qui justifie la rémunération du capital au regard du risque de son investissement) répugnent à en prendre le moindre et le font payer à leurs clients par une augmentation de leurs taux et de leurs frais.

- Les Allemands critiquent le QE pratiqué par la BCE (des dizaines de milliards d' euros sont mis sur le marché chaque mois pour aider, via les banques, les pays déficitaires) et les épargnants allemands, plutôt âgés, veulent améliorer la rentabilité de leurs avoirs en vue de leur retraite. Tous les jours ils se plaignent de l'euro faible qui favorise la déflation. Mme Merkel vient de rappeler l'opposition ferme de son pays à toute idée de Euro-obligations ou de mutualisation de dettes entre les 19 pays de l'Euro-zone : « A ce que je vois, il n'y a pas de changement dans notre position, à savoir qu'une mutualisation n'a pas lieu d'être sans d'abord déléguer des compétence à l'Europe. [Or], il n'y a pas que je sache de modification des traités au programme ».

- Le Brexit entraîne la chute de la livre sterling ce qui n'arrange pas un solde franco-britannique, un des rares postes excédentaires du commerce extérieur français.

Paris rêve de récupérer une part importante des activités de la City lorsque l'article 50 aura été activé. Mais tout le monde sait que ce n'est qu'un rêve. Deutsche Börse et London Stock Exchange envisagent de conclure des noces qui excluent les marchés français. Mieux, pour tenter de rassurer Bruxelles et la Commission les deux opérateurs boursiers germano-britannique proposent de vendre leur filiale française LCH.Clearnet SA. L'échec de ce projet de fusion n'est pas un gage de succès pour la place parisienne.

Tout le monde diverge.

En février 1992 a été signé le Traité de Maastricht. Pour l'essentiel, trois critères ont été fixés pour faire converger les économies européennes afin de les doter d'un instrument de compte commun et unique. C'est pourquoi on parla de « critères de convergence ». Ils portaient sur l'inflation, le déficit budgétaire et l'endettement. C'est sur cette base que devait être instituée la BCE (Banque centrale Européenne) pour administrer l'euro.

L'examen ci-dessus de la situation franco-allemande montre que non seulement les économies ne se rapprochent pas mais qu'elles divergent rapidement et gravement.

Le plus alarmant en effet demeure la situation en Europe où derrière la divergence franco-allemande on voit se confirmer une divergence plus grave qui menace l'Union dans son ensemble et risque de remettre en cause une laborieuse construction au moment où les Européens commémorent le 60ème anniversaire du Traité de Rome.

Certains diront que le vers était dès le départ dans le fruit et dans les fondations.10

La France n'est pas seule à souffrir d'une monnaie incompatible avec ses modes traditionnels de régulation. La situation de l'Italie, rongée par l'économie informelle, l'endettement, les déficits, le vieillissement de la population, l'arrivée massive de réfugiés du sud et de l'est de la Méditerranée, fuyant les guerres, le réchauffement climatique et la misère, l'instabilité politique? est encore plus préoccupante. La participation à l'euro la prive d'un des mécanismes fondamentaux dont elle usait pour rétablir régulièrement ses comptes : la dévaluation compétitive de la lire.

Même constat à propos de l'Espagne et sa peseta, du Portugal et son escudo? C'est encore plus flagrant de la Grèce et sa drachme11.

Nous sommes à la veille de ruptures dangereuses. Après la chute de l'ex-URSS, ce n'est pas seulement la stabilité et la continuité de l'UE qui est en cause. Un peu partout en Europe ce sont les nations qui menacent d'éclater. Il faut bien le reconnaître quels qu'aient pu être ses défauts ou ses insuffisances, l'utopie européenne a surmonté via l'échelle continentale l'incapacité des nations à unir les peuples antagonistes qui les composent. Corrélativement, l'effondrement de l'Union Européenne sonnera le glas des nations et réveillera de terribles adversités qui ont endeuillé l'histoire du continent.

Les Européens ironisent souvent sur les pays du Tiers-monde, rappelant à quel point, depuis 1945, la plupart d'entre eux sont des entités politiques composites, hétérogènes, artificielles et circonstancielles dont l'existence est directement liée aux empires coloniaux. Comment comprendre autrement la référence régulière des Etats africains et les institutions continentales aux « frontières héritées de la colonisation » ?

Les Européens oublient combien la plupart de leurs Etats sont le produit de bricolages géopolitiques à peine moins récents que ceux dont ils se gaussent. En Espagne après l'autonomie des régions, c'est l'indépendance qui est réclamée, notamment en Catalogne ou au Pays basque.

En Grande Bretagne, à la faveur du Brexit, l'Ecosse prépare, malgré l'opposition de T. May, un nouveau référendum qui menace le vénérable Union Jack (1606) et en Irlande les plaies de la guerre civile entre IRA et Orangistes à peine fermées sont sur le point de se rouvrir.

Il est probable que sans l'Union Européenne et l'OTAN (qui ont fait de Bruxelles leur capitale) la Belgique aurait sans doute depuis longtemps éclatée en Flandre et Wallonie. Les souvenirs de la crise des Fourons (2006) sont encore frais dans les mémoires. Jamais l'Italie n'a réussi le rêve de Risorgimento du comte de Cavour, de Verdi et Garibaldi. Entre Piémont, Lombardie, Sardaigne, Sicile, Toscane? les ancestrales principautés italiennes, un temps puissantes mais rivales, ne sont jamais parvenues à fabriquer une unité nationale depuis? Caracalla, Aurélien et Constantin le Pieux au mieux.

La dette italienne atteindrait 133,3% du PIB cette année après 132,8% en 2016. L'état de déficits transalpins, des créances bancaires douteuses, de sa productivité accable ses partenaires. On est surpris par des Français encore sous le charme de la débrouillardise, de la roublardise, de la réactivité italienne. Ils semblent aveugles devant une économie souterraine, délinquante qui menace les fondements mêmes de la société politique et de l'Etat italien.

Un peu plus loin la Moldavie roumaine louche vers l'autre côté de la frontière, les Macédoniens séparés cogitent et s'interrogent encore? L'ex-Yougoslavie du maréchal Tito est en lambeaux : même le dictionnaire serbo-croate fait sécession.

La Tchéquie et la Slovaquie se séparent pour se réunifier à l'ombre de Bruxelles et de l'OTAN. La Georgie a perdu l'Abkhazie et l'Ossétie du sud, l'Ukraine le Donbass et la Crimée? Combien de fois la Pologne a disparu des cartes de géographie européennes ?...

Plus loin encore, en Afghanistan, en Irak, en Libye? les « libérateurs » occidentaux pressés (disent-ils) d'occire les despotes locaux y ont fait disparaître le concept même d'Etat et s'appliquent à achever leur mission dans une Syrie réduite en cendres.

Les Kurdes organisent ce dimanche un scrutin pour l'autodétermination de leur région riche en pétrole, avec un risque d'accroître l'instabilité d'une région qui au bord d'une conflagration généralisée, avec un D. Trump qui remet en cause un traité sur le nucléaire iranien signé par son prédécesseur.

La Somalie vient d'élire un président (09 février), mais depuis 25 ans elle n'a plus d'Etat. En décembre 1992, les Etats-Unis lancent l'opération militaire et humanitaire « Restore Hope » (goûtons le cynisme) qui comptera jusqu'à 38.000 hommes, dont 28.000 Américains. Les Somaliens espèrent toujours?

A la faveur de l'effondrement de l'Union Soviétique, les Européens ont ouvert la boîte de Pandore. Le Traité de Maastricht a fait passer discrètement par Bruxelles ce que les citoyens européens ont disputé dans chacun d'entre eux.

L'échec par le référendum en mai 2005 du Projet de Traité Constitutionnel a été réparé par le Traité de Lisbonne que les gouvernements ont subrepticement ratifié, à l'insu des peuples. Que de promesses trahies?12

L'union et la coopération semblent dédaignées au profit du chacun pour soi, de la compétition et de la concurrence. Affrontements dont l'histoire nous entretient tragiquement. C'est ainsi que l'on passe de la guerre économique à la guerre tout court. J. Schumpeter - et sa « destruction créatrice », outrageusement sollicitée- a bon dos. A ce jeu de rivalité entre Français et Allemands le score est, chacun le voit bien, sans appel. Sous la pression externe de ses partenaires et de ses propres citoyens les gouvernants français font face à un impossible dilemme, dans le cadre des règles actuelles :

- ou bien rompre avec les dogmes maastrichtiens, prendre ses distances avec les prescriptions monétaristes et s'éloigner de facto de son partenaire allemand (qui se repliera alors sur une zone mark élargie aux voisins danois, néerlandais, autrichiens... et les ex-pays de l'Est, preneurs d'ordres de ses industries), quitter l'Euroland et se préparer à de fortes tempêtes locales et globales dont personne ne peut prévoir ni l'ampleur ni l'issue.

- ou bien s'acharner (sans aucune garantie d'amélioration de son industrie et de ses équilibres extérieurs) à réduire ses déficits, ses prélèvements obligatoire et perpétuer une déflation qui finira par déstabiliser gravement l'ordre social et politique et, à terme, entraîner une inévitable sortie de l'Euro.

EPILOGUE

1.- En mai 1898, pour faire pièce à Siemens et à General Electric, déjà, Pierre Azaria et Paul Bizet avec Charles Herbault lancent la CGE qui contribuera au génie de la technologie française.

Mais après 1986, avec E. Balladur et plus tard L. Jospin (1997-2002), conformément aux prescriptions du Traité de Maastricht, les gouvernement français vont s'appliquer à démanteler l'industrie de leur pays : déréglementations, privatisations, délocalisations de la recherche, de l'innovation, des centres de décision et des sièges sociaux se succèderont pour donner le paysage que l'on connaît aujourd'hui.

La CGE et ses filiales (Alcatel, STX, Nexans, Thomson et enfin Alstom) n'y échapperont pas.

Mardi 26 septembre 2017. Le TGV devient allemand

Après avoir cédé la division énergie (pour 9.7 Mds euros) aux Américains en 2015, les Français cèdent ce qui reste d'Alstom, le ferroviaire, aux Allemands. Pourtant, dès 2014, Siemens était disposé à des tractations qui auraient été peut-être plus favorables à la partie française.

Pour sauver les apparences, on présente cette opération à l'avantage d'Alstom, avec une communication très subtile : c'est Alstom, disent les communiqués, qui prendrait le contrôle des activités ferroviaires de Siemens. Un Français qui achète un Allemand, c'est une performance !

Malheureusement, cette opération est une mystification qui confine à l'abus de confiance, un effet de manche dans lequel les politiques français excellent de plus en plus. Cette opération fait deux gagnants : Siemens récupère une entreprise convoitée depuis longtemps et les actionnaires d'Alstom sont gratifiés de 8 euros (4 pour de dividende et 4 de prime exceptionnelle qui bénéficient de plus de la prochaine « flat tax » macronienne).

La contrepartie de cette « prise de guerre économique » est moins gratifiante : les Français offrent à Siemens une participation capitalistique de 50% dans Alstom (52 et plus dans peu de temps).

C'est bien normal, disent les Allemands, les activités ferroviaires de Siemens pèsent autant que la valeur totale en bourse de Alstom.

L'Etat français regarde passer les trains, (comme dans Airbus, par la grâce des « Matraciens » et de feu J.-L. Lagardère). Il est dilué dans un tour de table où il n'a jamais pesé et ne songe du reste qu'à solder ses positions dans les entreprises où il possède encore une participation., sous prétexte d'investissement dans l'avenir...13 Il en est de même de Bouygues qui s'en retirera lui aussi, signifiant la fin de l'actionnariat français dans Alstom.

L'AFP continue de parler « d'égal à égal » et de titrer le 26 septembre : « Le TGV devient franco-allemand avec la fusion d'Alstom et Siemens », mais tous les observateurs sérieux, malgré les engagements des uns et des autres, aussi bien sur l'emploi, l'investissement que sur le maintien des activités en France, savent que les acteurs politiques d'aujourd'hui ne seront plus là pour rendre compte de leurs actes et de leurs promesses, lorsque viendra l'inévitable heure des comptes à rendre.

L'annonce concomitante côté français d'une alliance Commerzbank - BNP Paribas, a semblé servir à « équilibrer » et à compenser la prise de contrôle de Alstom par Siemens, et ainsi donner l'impression d'opérations symétriques, entre égaux.14

Jeudi 21 septembre le gouvernement allemand a immédiatement mis fin à ces rumeurs et démenti les affirmations de la presse selon lesquelles il favoriserait une fusion de Commerzbank avec BNP Paribas.

Cette nouvelle a aussitôt disparu des « unes » des tabloïds et des médias financiers.

2.- Elections allemandes. Madame Merkel : ni tout à fait la même ni tout à fait une autre

Le parti CDU-CSU de la chancelière allemande a obtenu une majorité relative (près de -10 points environ par rapport à la consultation précédente).

Après avoir espéré voir la chancellerie échoir à Martin Schulz (dont le parti SPD a obtenu le score le plus faible depuis la fin de la guerre), les Français se retrouvent face à une chancelière affaiblie et affublée d'un parti libéral (FDP) qui ne lui laissera qu'une très faible marge de liberté quand il s'agira négocier les énièmes reniements de leurs voisins, incapables de mettre de l'ordre dans leurs affaires, incapables de tenir leurs engagements.

Le FDP sera bien plus coriace que ne l'a été Wolfgang Schaüble, (pressenti pour diriger le Bundestag), quand il s'agira de renvoyer Paris à ses déficits15 et surtout à son déficit de fiabilité, tous gouvernements de tous bords confondus.

Les Libéraux allemands, probables partenaires d'Angela Merkel dans le futur gouvernement suite aux élections, ont prévenu dimanche qu'ils s'opposeraient au projet de budget de la zone euro du président français Emmanuel Macron. « Nous ne voulons pas de nouveaux budgets pour des transferts financiers en Europe », a déclaré leur président Christian Lindner à la télévision publique.

Et il ajoute : « Un budget de la zone euro - M. Macron parle de plusieurs points de PIB et cela représenterait plus de 60 milliards d' euros pour l'Allemagne - où l'argent atterrirait en France pour les dépenses publiques ou en Italie pour réparer les erreurs de (Silvio) Berlusconi, serait impensable pour nous et représenterait une ligne rouge ». (AFP le D. 24/09/2017 à 22:15)

En sorte que tous les efforts difficiles demandés aux Français aujourd'hui risquent de s'avérer vains. Les « réformes structurelles » esquissées, le nouveau code du travail, la baisse de la fiscalité sur le capital et sur les catégories aisées, la prise de contrôle par les entreprises allemandes des fleurons de ce qui reste de l'industrie française... ne suffiront à faire de la France un partenaire de destin commun. Tout au plus un preneur d'ordre encombrant, plus compliqué à conduire que les ex-PECO qui ne se font aucune illusion sur leur poids économique et politique et sur le format de leur participation aux décisions à l'échelle régionale ou globale.

L'ancienne appartenance à un bloc dominé par l'Union Soviétique crée des réflexes...

La Grande Bretagne a choisi depuis longtemps son maître de céans qui lui laisse les illusions du « Grand large » et des « Special Relationship» que les Britanniques sont seuls à partager et à entretenir16. Les Français sont coincés entre une estime de soi démesurée, à l'évidence obsolète, et des conditions objectives de la subordination pour laquelle ils n'ont pas été préparés.

Durs seront les réveils.

Notes

1- Lire : R. Girard (1978) : Des choses cachées depuis la fondation du monde. Grasset, Paris, 492 p.

2- Toutefois, lancée dès décembre 1974, à l'initiative de V. Giscard d'Estaing, l'« Opération Apollon » allait remettre la « bombe française » sur le chemin atlantiste tracé par Macmillan en décembre1962 à Nassau.

3- Lire R. Debray : « Civilisation: Comment nous sommes devenus américains ». Gallimard, Paris, mai 2017. 240p.

4- Un peu plus de la moitié (1 710) de ces 3 378 tonnes de réserve de lingots, constituées après la Seconde Guerre mondiale, est entreposée dans les sous-sols de la Bundesbank à Francfort. 1 236 tonnes sont conservées dans les coffres de la Réserve fédérale (Fed) aux États-Unis et 432 à Londres. Mais plus un seul gramme d'or en France : au cours de l'année 2017, 374 tonnes du précieux métal, soit 11% du total des réserves allemandes, ont quitté les entrepôts de la Banque de France, en une opération commencée en 2013 (Le Point le V. 10/02/2017 à 15:35).

5- Après la forte augmentation de juillet 2017, le nombre de chômeurs a poursuivi sa hausse en août (+22.300, +0,6%), s'établissant en métropole à 3,54 millions de personnes inscrites en catégorie A (sans activité) sur les listes de Pôle emploi, a annoncé mardi le ministère du Travail. Ce chiffre atteint même 3,80 millions de personnes en incluant l'outre-mer. (AFP le mardi 26/09/2017 à 18:43)

6- Mise à jour tirée de : AFP le D. 09/07/2017 à 11:58

7- Lors de la signature de la capitulation allemande le 08 mai 1945 à Berlin, le Generalfeldmarschall Wilhelm Keitel, surpris de voir le général J. De Lattre de Tassigny aux côtés des alliés (alors que ceux-là mêmes n'avaient prévu ni sa présence ni le drapeau tricolore hâtivement improvisé). « Ah ! Il y a aussi des Français ! Il ne manquait plus que cela ! », s'était-il exclamé. Qui ne comprendrait la révérence rendue rétrospectivement par les Français à Ch. de Gaulle? ?

8- AFP le S. 27/09/2014, 14:26

9- Euro faible qui ne convient pas à l'Allemagne : « Si nous avions encore le deutsche mark, il aurait certainement une valeur différente de celle de l'euro en ce moment. » regrette A. Merkel qui explique : « La BCE a une politique monétaire qui n'est pas orientée vers l'Allemagne mais plutôt adaptée au Portugal, à la Slovénie ou à la Slovaquie » « ? et à la France » sous-entendent de nombreux Allemands. (Reuters le S. 18/02/2017, 12:14)

10- Lire : J.-P. Chevènement (2006) : La faute de M. Monnet. La République et l'Europe. Fayard. L'idée républicaine, Paris, 148 p.

11- Cf. A. Benelhadj : « Les enjeux géopolitiques de la dette grecque » (Le Quotidien d'Oran 04 et 05 juillet 2015). « Grèce européenne dans une Europe germanique » (Le Quotidien d'Oran 20, 21 et 22 juillet 15).

12- Il en est de même des Traités TAFTA (avec les Etats-Unis) et CETA (avec le Canada) négociés dans le secret et signés sans consultation des citoyens, par des élites fortement décriées. Le CETA a été validé fin octobre 2016 par Bruxelles et Ottawa et voté le 15 février 2017 par le Parlement européen à Strasbourg. Il ouvrait la voie à l'application provisoire, a priori dès le mois d'avril, d'une grande partie du texte, exception faite de quelques chapitres litigieux, le temps qu'il soit ratifié par l'ensemble des Parlements nationaux et régionaux de l'UE.

13- Elaboré par l'économiste Jean Pisani-Ferry, l'architecte du programme présidentiel d'E. Macron, un plan quinquennal d'investissement de 57 Mds? a été présenté ce lundi 26 septembre par le chef du gouvernement. Nombre de ces mesures a déjà été programmé. A titre de comparaison, pour recadrer cette annonce fracassante, à lui seul VolksWagen investit chaque année 13 Mds?, soit huit milliards de plus que le programme français sur la même période.

14- Il est aussi possible qu'elle ait servi à faire diversion et à couvrir l'annonce de l'ouverture d'une information judiciaire par le parquet de Paris à l'encontre de la banque pour complicité de génocide et de crimes contre l'humanité au Rwanda. L'ouverture de cette information fait suite à une plainte déposée fin juin, avec constitution de partie civile, par les associations Sherpa et Ibuka France et le Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), pour ces mêmes chefs mais aussi pour complicité de crimes de guerre. (Cf. Reuters, V. 25/09/2017 à 12:21).

15- Le déficit budgétaire 2018 s'annonce déjà aggravé par la générosité fiscale concédé par le gouvernement Macron aux catégories sociales les plus aisées, et cela malgré l'augmentation des contraintes sur les plus faibles.

16- Bien avant la signature du United Kingdom - United States Communications Intelligence Agreement, souvent appelé traité UKUSA, signé le 5 mars 1946, le Royaume-Uni avait, dès août 1941, remis son destin entre les mains de l'Amérique (rencontre secrète au large de Terre-Neuve, entre Churchill et Roosevelt).