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Pour une écologie urbaine

par El Yazid Dib

L'été a été toujours synonyme de détente, de loisirs et de villégiature. Qu'en est-il de l'état des lieux de nos contrées, villes et bourgades ?

Un accident domestique handicapant, réduisant sa mobilité a permis au chroniqueur d'oublier ses vacances publiques pour songer un peu à la salubrité publique. J'ai vu des immondices jonchant le sol à l'extérieur des plus belles demeures. J'ai vu des gens dans des cités huppées lançant des balcons du sachet noir ou des bouteilles vides. J'ai vu des estivants ou des auto-constructeurs faire du rivage une benne à ordures ou un dépotoir libre et ouvert. J'ai vu se faire mettre du tabac à chiquer sous le revêtement de sol tapissé des mosquées. Ces agissements qui se font en toute clandestinité, parfois avec audace ne font pas rougir ceux qui les exercent et les font débiter sur les tares des autres. C'est dire que la propreté en fait n'est pas l'affaire de tous, c'est une affaire personnelle, intime et éducationnelle.

L'homme est une entité capable de vivre sous toute contrainte. Son intelligence fait de lui une espèce privilégiée par rapport à celles autour desquelles il gravite. Il évolue donc dans tout un environnement. L'environnement qui est « l'ensemble des éléments biotiques ou abiotiques qui entourent un individu et qui s'intéressent à la nature au regard des activités humaines, et aux interactions entre l'homme et la nature » n'est pas un vain mot.

Toute la stratégie environnementale nécessite l'étude des milieux naturels, pour mieux cerner l'impact humain ainsi que la démarche à adopter afin de provoquer les éléments réducteurs à cet impact dans son volet négatif.

Ici ou ailleurs la nature est une autre nature dans le comportement quotidien du citadin. Depuis peu, l'on s'initie à des actions d'envergure, se disant ayant une étroite relation avec les notions de l'environnement. Planter des arbres, prévoir des bacs à ordures, semer et tailler des pelouses n'est pas en fait une fin en soi. C'est ce vieillard rencontré dans une nouvelle cité de logements sociaux qui voulant me renseigner sur un passé où la propreté était plus qu'une croyance, me renseignait sur la dégradation de son environnement. « Si nos agneaux broutent du plastique et de déchets aviaires, l'on ne doit pas s'attendre à une bonne santé » m'interloquait-il. Le monsieur semble avoir sa tête plongé dans le sacrifice du mouton de l'aid-el -kebir.

La gestion en co-propreté d'une ville n'est pas seulement un camion d'enlèvement d'ordures, un balais ou un simple et furtif lifting. C'est d'abord toute une culture de citadinité dosée d'une passion à outrance pour la chose naturelle, la beauté et le bon vivre. La tâche quant à cette protection n'est pas une aisance managériale. L'existence de CET (centre d'enfouissement technique), dans chaque localité érigé en entreprise à caractère industriel et commercial, dépendant du secteur public et fonctionnant en conseil d'administration dont le wali en assure la présidence est aussi une réponse adéquate et spontanée à une forte demande en la matière.

Les EIE (études d'impact de l'environnement) ont trouvé toute leur substantialité légale dans les dispositions de la loi cadre no 83-03 du 5 février sur la protection de l'environnement. Le détail applicatif s'est cependant mis en évidence subséquemment par un texte à valeur réglementaire le 27 février 1990. (Décret exécutif 90-78). En matière de texte, l'Algérie a commencé à se doter des 1974 de tout un panel juridique. Le conseil national de l'environnement crée cette année a vu, après sa dissolution 3 années plutard, le transfert de ses attributions au profit du Secrétariat d'Etat aux forets et à la mise en valeur des terres.

Une Agence Nationale pour la Protection de l'Environnement (ANPE) fut créée en soubassement à ces missions en 1983. C'est dire que l'effort ne s'est point figé. Le souci de cet aspect d'environnement a fait de multiples migrations d'un ministère à un autre. Il fallait rajouter à tout cet arsenal juridique encore balbutiant toute une batterie de mesures allant de la protection de l'environnement au développement durable. Le ballotage de rattachement missionnaire se faisait du ministère de l'intérieur, à celui de l'éducation nationale, aux universités, à la recherche scientifique, jusqu'en 2007 où il fut institué organiquement un ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement. La législation nationale rentrait en droite symbiose avec les exigences universelles en la matière et se mouvait dans une flexibilité apte à satisfaire le besoin factuel.

Vivre mieux, sous un climat sain tend à devenir un slogan que revendique l'entièreté de la composante sociétale. Il ne reste que ce devoir participatif afin d'améliorer sans répit le cadre de vie du citoyen qui par ricochet ne manquera pas de s'inscrire dans une mission économique, mais aussi dans un objectif de réduction et d'élimination de tout effet néfaste et négatif sur le milieu environnemental.

Il est unanimement connu et reconnu que la dégradation du milieu naturel au sens écologique reste invariablement sous une culpabilité humaine. Voire à son activité. Cette détérioration, selon certaines normes établies se mesure essentiellement par les pollutions apparentes, les traces de composés synthétisés par l'homme dans les sols, l'air et l'eau, la raréfaction des ressources naturelles, renouvelables ou pas ainsi que par la perte de la biodiversité. C'est dans ce cadre que mon interlocuteur s'évertue à me clamer « il faudrait assurer la protection des terres, des eaux et de l'air, ce qui nous permettra de ne pas mettre en situation d'otages les futures générations. On ne doit pas les étouffer, les affamer ou les assoiffer » à faire cette similitude ô combien symbolique entre l'objet à protéger et l'effet à éviter.

Pourtant l'Etat et ses collectivités locales dont les missions en la matière sont clairement définies ne lésinent aucunement sur les moyens.

Ils pilotent d'innombrables opérations, toutes peu être paraissant anodines, mais contribuent grandement à l'éco-équilibre des systèmes. Faire des pelouses, de l'espace vert, des jardins est un acte de suivi quotidien et son principal point fort. Cette démarche classique qui est dévolue pratiquement à toutes les communes devra dépasser l'usuelle collecte pour mettre en position de haute responsabilité le citoyen quant à la préservation des actions d'appui à l'hygiène collective. « L'espace vert est devenu maintenant une requête citoyenne » m'affirmera mon ami d'un instant le fonctionnaire retraité des chemins de fer El hadj Azzouz.

Les yeux hébétés, le soupir incessant mon ami me dit s'être fortement lié d'amitié avec les agents municipaux qui peinent quotidiennement à rendre la beauté à la vie et la vie dans la beauté des lieux. Ainsi pour lui « la grève des éboueurs » demeure plus fatale que celle de l'ordre des architectes, des pharmaciens ou autres corporations.

Plus importante qu'une marche usant les gosiers que les godasses. Ils constituent en fait, ces nettoyeurs matinaux, la plus noble espèce du fonctionnariat. Pas la peine donc, de refuser de leur tendre la main, en susurrant en catimini « qu'ils ont les mains sales ». Cela pourrait être bien vrai, que ces mains soient entachées de malpropreté, mais elles ne sont cependant souillées que par la saleté des autres. Ceux qui sont censés les écouter. Ceux à qui on en demande audience. Ainsi nous aurions su que toute notre culture s'exprime aussi à travers le contenu de nos poubelles. Si le débit labial (parler trop) égalisait le produit fécal ( ?), nos communes auraient à être assimilées à une benne à ordures neuves et saines. Mettez une nature dans vos mains et vivez peinard votre séjour sur cette terre si généreuse et si belle.