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Algérie : délire estival sous 42 degrés à l'ombre

par M'hammedi Bouzina Med

Cet été est particulièrement chaud. Le soleil agressif pousse certains jusqu'au délire politique et les hallucinations visuelles et auditives. Attention à l'insolation!

Le risque d'insolation est grand en été et ça n'a pas raté encore cette fois-ci avec les incendies de forêts en sus. Les corps et les esprits s'échauffent, la vue se brouille et le cerveau comme liquéfié tente de sauver ce qui reste de lucidité. A peine le mois de ramadhan terminé que les premiers étonnements inondèrent les rues et chaumières du pays : Cession spéciale pour les retardataires du bac, promotion d'un nouveau premier ministre, «assainissement» du corps des walis et autres corps constitués, promesse d'une saison estivale débarrassée de la surenchère et du racket des «homme aux gourdins» ...Tout portait à croire à un brusque sursaut national annonçant la prochaine rentrée sociale sous de meilleurs espoirs. Pui vint l'autre étonnement: plus de 75 % de «boycott» de ces mêmes retardataires de l'examen du bac, les racketteurs des plages ont redoublé de férocité dans les prix, ceux des parkings sont toujours là et le ministre de l'intérieur qui dit ne pas comprendre que l'on ( les autorités locales) n'appliquent pas ses directives. Plus haut, le nouveau premier ministre se trouve malgré lui dans une situation aussi cocasse que risquée pour lui et nous. « Libérer la politique du pouvoir de l'argent» a -t-il dit et cru dans un élan aussi naïf que suicidaire dans un pays comme le nôtre qui a les yeux rivés sur le prix du baril de pétrole. D'ailleurs même dans les pays les plus démocratiques et développés c'est toujours celui qui dépense le plus d'argent dans sa campagne électorale qui gagne à la fin l'élection. Macron en France, Trump aux Usa pour ne prendre que les plus récent exemples. Ne dit-on pas que «l'argent est le nerf de la guerre?» Et la guerre aurait pu éclater entre le porte parole de l'argent, Mr Ali Haddad et sa confrérie des patrons auxquels, l'effet des 42 degrés à l'ombre de cet été aidant, s'est allié au nom des travailleurs- sans leur demander leur avis- , Mr Sidi Saïd saint patron ( lui aussi) de l'Ugta. Cet épisode connu une chute inattendue comme dans les polars noirs américains: un cimetière. El Allia, le plus connu des cimetières d'Algérie qui accueillait un illustre patriote qui servit son pays avant, pendant et après l'indépendance. Rédha Malek un intellectuel engagé et qui ne s'est pas fait patron alors même qu'il occupa , entre autre, le poste de 1er ministre de son pays. Au cimetière d'El Allia eut lieu une scène autour de laquelle se déchirent les internautes, les analystes, journalistes et autre citoyen lambda: que signifie le regard en dessous et appuyé du frère et conseiller du président Bouteflika envers le premier ministre Tebboune qui, lui avait le regard fixé vers la tombe du patriote qu'on enterrait?

 Et puis ces rires entre le frère et conseiller du président de la république et le patron des patron, Mr Haddad? Et la tête basse et le regard caché par la visière d'une casquette du patron de l'Ugta qui collait aux deux premiers? Et enfin, cette invitation du frère et conseiller du président à Mr Haddad pour qu'il prenne place à ses côté dans sa voiture officielle. Certains y voient un message qui rappelle au 1er ministre la maxime selon laquelle « l'argent est le nerf de la guerre», d'autre de simples retrouvailles entre «la politique et l'argent», d'autre encore y voient un «mariage de raison entre le pouvoir et l'argent» et enfin d'autres, comme moi, n'y voient rien. C'est que le soleil de cet été particulièrement chaud agresse et terrasse tout effort de discernement entre les mirages et la réalité d'une oasis si recherchée depuis des lustres dans cette terre d'Algérie brûlée par le soleil qui pousse jusqu'aux hallucinations auditives: « lutte contre la maffia politico- financière, assainissement des institutions de l'Etat, fin des montages industriels importés de complaisance, lutte conte le marché informel, fin des gourdins de parkings, fin des squatteur et racketeurs de plages, pas d'inquiétude sur les comptes publics etc. Jusqu'à devenir sourd tant la répétition de ces mots d'ordre - slogans nous poursuit partout dans les médias, les discours politiques et jusque sur les terrasses de cafés. Oui, les hallucinations auditives peuvent rendre sourd même un renard ou un dauphin , créatures qui se distinguent par une ouïe fantastique. Regarder par exemple la querelle de ces derniers jours entre deux ex -leader politiques qui ont longtemps occupés la scène nationale: Mms Boukrouh et Saïd Saadi. Tous deux rédigent, disent-ils, leurs mémoires. Et bien là aussi l'un évoque une rencontre qui eut lieu chez lui à la veille d'un moment politique capitale pour le pays ( l'élection présidentielle) et l'autre dément. Boukrouh dit avoir des témoins et Saadi le met au défi de les faire témoigner. Puis, plus rien. Non pas que la dispute des ces deux messieurs nous intéresse ou apprendra des souvenir oubliés de notre passé récent marqué par la violence politique, mais parce ce que satané soleil de cet été incendiaire ne nous laisse guère le choix que celui de subir des manifestations auditives et visuelles qui nous balancent entre le réel et le fantasmé, entre hier et aujourd'hui, entre eux et nous comme dans une immense scène de théâtre où les acteurs jouent chacun son rôle avec maestria et art. 42 degrés et plus à l'ombre n'est pas un été chaud. C'est un été qui ne se fera pas oublié de sitôt. « Un été 42».