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Le «conflit israélo-palestinien» et sa couverture médiatique en «démocratie avancée» entre droit au mensonge et devoir de manipulation

par Mourad Benachenhou

Dans les médias des «démocraties avancées» où les citoyens sont censés jouir de tous les privilèges de la démocratie, dont l'axe central est la liberté d'expression et sa conséquence logique, le droit à l'information objective et non censurée, la couverture des «évènements du Moyen-Orient» et plus spécifiquement de ce qui est appelé par un euphémisme aussi cynique que mensonger, «le conflit israélo-palestinien» (comme si le reste du monde était un simple spectateur comptant les points d'un match de football entre deux équipes adverses, aussi fortes l'une que l'autre, et soumises l'une et l'autre aux mêmes règles de jeu) ressortit plus de la propagande de guerre, soumise à censure et à l'unité de la ligne éditoriale imposée par les autorités politiques, que de la présentation informée et neutre, ayant pour seul souci de rendre compte et de faire comprendre, de manière professionnelle, sans biais et honnêtement, l'auditeur, le téléspectateur ou le lecteur.

La ligne rédactionnelle des médias des «pays civilisés» : «laissez Israël «génocider» en paix le peuple palestinien»

Hélas ! La réalité de la présentation des informations de manière exclusivement biaisée en faveur d'une seule partie à ce «conflit» ne peut être cachée par la répétition «ad libitum» de principes aussi nobles que le droit sacré à l'expression libre et sans freins ou «le devoir pour les médias de présenter de manière équilibrée et complète les évènements qu'ils couvrent, pour fournir à ceux qui leur font confiance les données destinées à leur permettre de se faire une opinion aussi proche que possible des réalités telles que perçues par les acteurs ou les victimes de ces évènements«

On peut donner des exemples «à la pelle» du caractère partisan de cette couverture qui présente systématiquement les Palestiniens, comme les pays et les peuples qui soutiennent leur juste cause, comme des «antisémites» assoiffés du sang des Juifs, ayant une haine inexplicable et sans justification contre un groupe religieux et ethnique «disposé à vivre pacifiquement, parmi les peuples de la région» mais victime de cette «haine» qu'il ne mériterait pas car, même lorsqu'il est violent «il ne fait que se défendre»

Il suffit de regarder les bulletins de la télévision gérée par le ministère des Affaires étrangères de l'ex-puissance coloniale pour constater, sans avoir jamais fait «sciences po» ou être un spécialiste de l'analyse de contenu, de quel côté se trouve le cœur de ceux qui dictent la ligne rédactionnelle de cette télévision de propagande dans ce conflit, où l'hypocrisie de l'équilibre dans la couverture est une insulte à l'intelligence du spectateur le moins apte à comprendre qu'on ne veut pas l'informer, mais le manipuler.

Ce sont les Palestiniens qui sont privés du droit de vivre et c'est Israël qui est présentée comme menacée dans son existence !

A travers cette couverture, les maîtres de cérémonie veulent enfoncer dans la tête du téléspectateur qu'Israël serait menacée de disparition soudaine et que toute la violence barbare qu'elle déploie contre «les Arabes» serait une réaction de défense largement justifiable par l'histoire triste de la façon dont le peuple juif aurait été traité, de manière exclusive, dans l'histoire du monde. Ainsi, la siège de Gaza, déjà en partie détruite par deux guerres meurtrières menée par Israël contre elle, qui réduit à la pauvreté extrême et à la sous-alimentation des millions de Palestiniens, (même l'importation des lentilles sèches y est interdite : quelle utilisation militaire cette légumineuse a-t-elle ? Mystère et boule de gomme !)la destruction des habitations des «terroristes arabes» auteurs d'attentats terroristes «contre des civils innocents» la confiscation des terres palestiniennes pour construire des colonies de peuplement, le refus d'Israël de respecter les lois internationales, qu'elle soient ou non soutenues par des résolutions des instances internationales, la construction de routes au profit exclusif des Juifs, etc. etc. tout cela ne tiendrait pas à la nature maléfique du sionisme, mais simplement à une réaction «justifiée» «de peur panique d'un peuple constamment menacé d'un nouvel Holocauste»

Cette thèse, qu'on retrouve exprimée de manière directe ou en filigrane de la couverture du «conflit israélo-palestinien» et dont nul n'oserait s'écarter ou même critiquer s'il tient à survivre dans les milieux médiatiques des «pays civilisés, constitue non seulement une représentation mensongère de la réalité, mais également une tentative d'effacer de l'analyse et de l'esprit de l'opinion publique que le problème n'est pas dans «la haine inextinguible» des «Arabes» des «Palestiniens» ou même des «musulmans» contre «le peuple juif», mais dans l'idéologie sioniste fondée sur le droit des Juifs au génocide du peuple palestinien, en obéissance à un ordre divin donnant le territoire historique de la Palestine aux Juifs, et leur ordonnant de «tuer sans pitié tous ceux qui adorent un autre Dieu que Jehovah, le Dieu qui a donné aux Juifs le droit exclusif de l'adorer en contrepartie de leur désignation par lui comme «peuple élu».

Du «bon Français» Gilad Shalit au «bon Français» Elor Azaria

Un récent évènement : la condamnation par un tribunal militaire israélien d'un Français d'origine membre des «forces de défense israéliennes» qui avait exécuté, au vu et au su du monde entier, un Palestinien blessé en territoire occupé, vient d'apporter une nouvelle preuve du manque totale d'objectivité dans la couverture des informations en provenance d'Israël. Ce caporal, selon les médias, un infirmier militaire, c'est-à-dire un soldat chargé de donner les premiers soins aux blessés, de quelque côté qu'ils soient, a achevé, le 24 mars 2016, à El Khalil, en territoire palestinien, le Palestinien Abed El Fatah El Charif, à terre, en lui tirant une balle à la tête. Avant de l'achever, cet «infirmier» israélien a dit : « Il doit mourir ! » donnant la preuve qu'il avait prémédité son meurtre et ne l'avait pas commis sous l'effet de la peur ou par réflexe d'autodéfense.

Il faut souligner que ce meurtre est entièrement filmé au moment où il a été exécuté, c'est-à-dire qu'il n'y a aucun doute sur ses circonstances, mais qu'en plus, il a eu pour théâtre un lieu situé dans les «territoires occupés» par Israël et dans lesquels s'applique la 4ème Convention de Genève (1949) dont la stricte application est du ressort des autorités militaires israéliennes.

Il ne s'agit pas de se demander pourquoi ces autorités ont décidé de faire passer en tribunal militaire, -et ce n'est sans doute pas par volonté de garder à l'armée israélienne le titre «d'armée la plus morale du monde» que lui a attribué unilatéralement un «islamophobe professionnel» -alors que cet acte d'exécution de Palestiniens blessés n'a rien d'exceptionnel, et qui est, selon le quotidien israélien Haaretz, «la norme». Voici ce qu'écrit Amira Hass dans ce quotidien daté du 5 janvier 2017 sous le titre «Elor Azaria, le Tireur de Hebron, est en fait la norme » : «Au cours de l'année et demie passée, des douzaines de Palestiniens : hommes, femmes et enfants ont été tués, bien qu'ils auraient pu être restreints alors qu'ils étaient encore en vie. La différence entre ces exécutions sommaires et celle commise par Elor Azaria (le caporal français assassin, nda) est qu'il a été filmé».

Il est a souligner qu'une association de défense des droits de l'homme en France a porté plainte en pénal contre ce criminel auprès des tribunaux français, et sur la base d'un article du code pénal de ce pays qui décrète l'application de ce code aux crimes commis par des Français à l'étranger. (voir sur l'internet le texte de la plainte déposée par Maître Jean-Baptiste Jacquenet-Poillot et Maitre Karim Achoui). Les détails de cette affaire peuvent être retrouvés sur la Toile.

Or, les médias du pays d'origine de Elor Azaria, cet infirmier militaire, ont choisi non seulement de cacher le fait que son crime a été commis sur un territoire couvert par la 4ème Convention de Genève, qu'il constitue de ce fait un crime de guerre ressortissant tant des tribunaux français que du Tribunal pénal international et que le jugement du tribunal israélien avait pour objectif, non de dire la loi, ce qu'il n'a jamais pensé à faire pour d'autres exécutions sommaires de Palestiniens, mais de se couvrir d'une accusation de crime de guerre aux preuves irréfrangibles.

Ces médias ont même choisi de défendre l'acte criminel en le présentant comme une exécution au caractère pleinement justifié et dictée par la situation sécuritaire en Israël, alors qu'il s'est déroulé dans un territoire sur lequel Israël n'a aucun droit reconnu par les lois et la communauté internationale.

On s'attendait à ce que ces médias rappellent la plaine portée contre ce Français auprès des tribunaux français, et que les poursuites judiciaires israéliennes ressortissaient plus de l'opportunisme dicté par les circonstances que de la volonté de faire justice. Les autorités israéliennes ne pouvaient que le juger, son crime ayant été filmé, mais leur verdict ne réduit pas la gravité de ce crime, car il a été commis en violation de la 4ème Convention de Genève sur la Protection des civils en temps de guerre (12 août 1949). L'éventuel pardon par Netanyahu de ce criminel n'exclut nullement sa poursuite par la France comme par le Tribunal pénal international.

On se souvient du tollé soulevé par la capture, le 25 juin 2006 et l'emprisonnement de Gilad Shalit, un Français, les armes à la main, et en plus, pilote d'un blindé israélien, qualifié par Sarkozy de «bon Français» désigné «citoyen d'honneur de la ville de Paris» fêté à sa libération le 18 octobre 2011 comme un héros, alors qu'au moment de son arrestation, il portait un uniforme non français et était engagé dans une guerre qui «ne regarde que de loin» les Français.

Ce Français n'était ni en villégiature, ni en mission humanitaire, mais engagé dans une opération militaire aux objectifs certainement non approuvés par les règles de la moralité normale, engagé donc dans des activités contraires à ce qui est attendu d'un touriste en Terre Sainte. En dépit de cela, il a été transformé en victime d'une «violence sans conscience». Il n'était tout de même pas en tenue civile et tenant une canne à pêche en guise d'arme à feu ou au volant d'une voiture de tourisme «haut de gamme ! »

En conclusion

Peut-on s'attendre à ce qu'outrepassant les silences et les mensonges des médias de ce pays qui couvrent le génocide du peuple palestinien comme s'il était l'agresseur, les autorités civiles et judiciaires françaises, soucieuses de leur bonne réputation, et en application de leur volonté de porter haut la réputation internationale de leurs pays, comme elles l'ont fait pour Gilad Shalit, poursuivent Elor Azaria pour meurtre prémédité et demandent son extradition au gouvernement israélien, et qu'ensuite, elles le livrent au Tribunal pénal international pour qu'il reçoive la punition prévue pour les criminels de guerre ? On en doute, mais on attend avec curiosité de voir comment la «Patrie des Droits de l'Homme» et un des co-auteurs des Conventions de Genève sur les lois de la guerre va réagir.

Ce dont on est sûr, c'est que la victime palestinienne de cette exécution ne va pas être nommée, même à titre posthume «citoyen d'honneur de Paris». Paris a organisé une semaine «Tel-Aviv sur Seine». On attend vainement qu'elle organise une semaine «Gaza sur Seine». Et on attendra sans doute encore plus longtemps avant que Abed El Fatah soit honoré à titre posthume de «citoyen d'honneur» de la ville à la devise «fluctuat nec mergitur». Il ne faut certainement pas s'attendre à un flottement quelconque des autorités de cette ville pour le cas de ce Palestinien assassiné ou pour la cause du peuple palestinien de manière générale. Sombrent-elles dans la mauvaise foi ? C'est sans doute le cas ici !