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2017 : l'inquiétude

par El Yazid Dib

Malgré tout l'espoir restera de mise. L'inquiétude est devenue un excès de précaution. On s'inquiète des lendemains sans pour autant avoir complètement consommé son jour ci-présent.

Une année qui a vu d'innombrables soubresauts, des sautes d'humeur et des fâcheries va encore partir pour garnir l'histoire contemporaine d'un pays toujours en quête de son projet. En allant sur un pas pressé de se finir, elle lègue toute une angoisse investie d'inquiétudes et de conditions non encore complètement subies. Le problème ne se résume pas en ces taxes ou en ces prix qui, crise ou pas ont tout le temps eu le mérite d'arriver là où il ne le fallait pas. Certes les gens se logent, voyagent, fêtent Noël, le Mouloud, le réveillon et la saint Sylvestre, sans pour autant que le cœur y est. L'important c'est que même dans ces fêtes la joie n'existe plus. Juste après l'euphorie d'un enivrement aviné ou d'une boulimie de chakhchoukha ; la réalité se dresse là, vive pour rattraper les uns et les autres.

L'échéance d'une année peut s'arranger pour devenir une halte évaluative si l'on se force à ouvrir en le recentrant le débat de projet. Il n'est pas dangereux pour quiconque de permette l'expression franche sur les thématiques, les couacs, les zizanies et autres forfaitures mais aussi de bienfaits, des réalisations, des lueurs d'espoir qui ont emmaillé la douzaine de mois. La caractéristique la plus expresse de l'année a été cette passion dévorante d'exercer le pouvoir et l'ardeur d'y mettre le peuple à ses tendances. Le pays a connu de l'émerveillement et de la joie mêlée à cette maladie chronique qui n'arrive plus à se découdre. Le fossé n'est plus entre un Etat et un peuple. Il se creuse au vu de tout le monde au sein même de l'esprit de l'administration des affaires publiques de haut niveau. Ce niveau gouvernemental.

2016 aurait vu ce qu'aurait vu la quotidienneté citoyenne parfois morose parfois placide. La gouvernance des masses et de leurs intérêts s'est enchevêtrée aux discours parfois plaisants parfois prémonitoires. L'école et les fuites ont fait largement les frais des fausses visions scolaires. L'habitat a vu des décorations et de hautes distinctions se discerner à de potentiels promoteurs empressés uniquement à la livraison sans pour autant y songer à la félicité des cites. Loger ou recaser recèle une grosse différence. Il est vrai que l'Etat algérien demeure le seul Etat logeur. La politique sociale qui se pratique est l'une des rares qui se pratique encore en tous pays. Une certitude se pointe alors qu'il est impossible de satisfaire toute la demande. L'on doit pister dans ce sens d'autres regards. D'autres approches plus rentables et égales. La promotion ne fait que des émules déjà logées. Faudrait-il pour cela aller vers une démarche locative et essayer autant que l'on peut de faire extraire de la mentalité nationale ce sentiment de propriétaire ou rien. L'effort ne pourra se poursuivre à la cadence entamée. L'approvisionnement budgétaire faisant défaut, vers quoi ou qui faudrait-il recourir ?

Devant tant de confusion, tant d'inscription involontaire dans l'incertitude, l'on n'a pas de représentation claire et assainie de pouvoir changer la donne. L'on est enrôlé dans une dynamique sans pouvoir y adhérer. Cette mine d'inquiétude sociale apparait, à voir le regard préoccupé des multitudes populaires, dans la densité de soucis qui s'impose au pays. Tout semble aller de l'avant au même moment où tout s'empêche d'avancer. La société s'est éclatée pour se convertir en un ensemble d'unités d'individuelles chacune cherchant une position confortable sans égard à la précarité de l'autre. Le compter-sur-soi qui était censé fédérer l'effort national s'est mû tacitement dans une situation du chacun pour-soi.

Ce n'est pas par le bitumage d'un tronçon routier que l'on pense avoir réalisé une autoroute. Ce n'est pas au mauvais temps ou à l'afflux pluvial que l'on impute la responsabilité d'un mauvais choix d'entreprise. Si l'eau coulait à flots grâce à un programme conséquent engagé depuis peu, elle n'arrive pas tout de même à s'interdire de se perdre au gré des mauvaises conduites et des rééditions de renouvellement.

Il n'est de nul besoin de tirer les conclusions de l'année qui s'écoule, tant que toutes ses péripéties ont été vécues et persévèrent à s'étendre davantage sur celle à venir pour la compliquer davantage. Si l'espoir reste de mise, il n'est pas question d'éluder que 2017 va être une année où les ceintures vont se serrer de plus en plus, jusqu'au dernier cran. Le souci ne sera pas dans la perduration de la crise qui d'ailleurs dès sa survenance s'était annoncée pour son installation durable. Il se confinera cependant dans la manière assez insuffisante de pouvoir résorber voire réduire ses effets rédhibitoires. Vaincre le défaut de fonds est possible, si seulement l'on arrive à vaincre aussi sa cupidité et sa partialité en privilégiant la vertu de l'égalité. C'est outrageant de voir des gens s'enrichir en pleine crise et ne point pointer un doigt accusateur sur eux et sur ceux qui en profitent allégrement. Il y aura moins d'impact dans la collecte de l'impôt. Celui-ci étant prélevé l'année précédant celle d'activité et eu égard que les entreprise n'ont pas assez réalisé de la valeur ajouté de par le gel de bon nombre de projets ; les recettes fiscales ordinaires ne seront pas conséquentes.

2017, va connaitre une échéance électorale. Elle sera cette fois-ci d'une importance capitale, du moins en principe et ce de par les avancements législatifs introduits récemment. Le gouvernement sera issu de la majorité parlementaire et c'est à cette échéance de la produire. Donc c'est en fonction des listes que l'on aura des gabarits ou des mauviettes. Certes l'Etat a consenti beaucoup de garantie quant à la transparence et le libre choix. De la haute instance indépendante de surveillance au droit d'accès au fichier électoral, le candidat ou l'électeur, par principe n'a pas à rougir. Mais là où le bât blesse, là où le pli coutumier aurait à prendre le dessus comme un galop chassé qui revient au naturel ; c'est quand les parti en lice auront à confectionner leur menu. L'on verra des filous, des sans identité idéologique, des perclus politiciens, des carriéristes, des répétiteurs de rôles venir gaillardement investir les listes et les têtes de listes. 2017, sur ce plan va conforter la nullité des partis et exacerber à leur égard le sentiment de rejet que ne cesse de manifester le corps électoral. L'argent politique fera encore et en « mieux » des siennes. Déjà l'on voit des mains se frotter de nulle part, se préparant toute honte bue à mener pour l'avoir cette « affaire ». « J'ai bien envie de voter, d'exercer ce droit sacré à l'expression, de choisir mes représentants, d'être écouté, de participer à la démocratie, de voir mon quartier fleuri, mes enfants souriants?mais Allah ghaleb, on nous propose toujours le contraire de ce qu'on veut » m'affirme un ami sexagénaire dépité et qui n'a jamais mis une enveloppe dans l'urne, depuis l'ère de Boumediene. Au moins me rappelle-t-il qu'à cette époque on pouvait choisir des noms et pas d'autres inscrits dans une unique et longue liste. Le choix était personnel et uninominal. On élisait une personne nommée et prénommée et pas une liste hétérogène et au kilo.

2017 ; sur le plan social va connaitre un engagement sans précédent de l'effort étatique. Cet effort quelles que soient les diverses natures qu'il prendra viendra alléger le fardeau pris par la masse. Il ne sera possible que grâce à l'application sans faille du principe sacro-saint tant rappelé de l'égalité sociale. L'Etat n'abandonne pas ses citoyens même si ses gouverneurs n'arrivent pas à se découdre de ce besoin irrésistible de plaire et d'éblouir les auditoires. L'on verra plusieurs actions se concrétiser par certains secteurs opérant dans la périphérie citoyenne. La bureaucratie ne semble pas selon l'élan amorcé avoir beaucoup de jours à survivre. L'administration à domicile fait son p'tit bout de chemin. La biométrie gagne les portables et les esprits encore résistants à la nouveauté. Elle s'impose comme un trajet obligatoire à peine de rater le coche. C'est dire aussi que ces services pratiquement ne vont pas consommer énormément de crédits.

Au niveau international, une chose est sure et certaine, c'est que la Palestine ne sera pas libérée. La Syrie et la Libye continueront à souffrir le martyr. Le grand dilemme proviendra du territoire de l'oncle Sam. Avec un Trump tout frais et rafraichi la géopolitique moyen-orientale plus particulièrement ira vers un remodelage plus accentué que le GMO. Enfin pourvue que tous ces calculs, cette hégémonie transversale, cette boulimie néo-expansionniste évite cet s'évite de s'introduire dans le climat assez complexe de notre le pays. Le danger s'il est permanent et menace la stabilité, il n'est pas cependant agissant devant la mobilisation et la prise de conscience des masses populaires qui comprennent bien le système de fonctionnement des faux « printemps arabes ». Juste pour avoir lourdement payé à prix fort la décennie noire, l'Algérie n'a pas besoin des affres de ce « printemps ». Malgré l'automne qui sévit le long des années ; le soleil brillera toujours dans les cœurs et nonobstant leur meurtrissure. Bonne et heureuse année.