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Obstination et désamour !

par Ahmed Farrah

«Si l'homme savait pousser l'obstination à son point extrême, lui aussi serait déjà dieu.»

Sommes-nous condamnés à tourner en rond depuis 52 ans ? Sommes-nous incapables, de nous arrimer sur la trajectoire des grandes nations de ce monde ? Pourquoi tant d'efforts demeurent vains, et beaucoup de nos actions restent stériles ?

Pourtant, tout porte à croire que les atouts dont dispose le pays sont inestimables. Position géostratégique, immensité du territoire, richesses naturelles et ressources humaines, que peu de pays possèdent. Cependant, à chaque fenêtre favorable de tir, le décollage se fait reporter. Le lancement n'a pu se faire, ni pour cause de timing ni pour le manque d'opportunités qui se sont offertes à de nombreuses occasions, mais gâchées ou ratées.

Un petit pays de 16 millions d'habitants, comme la Hollande, avec une Superficie de 5 488 km² (un peu moins que la superficie de la wilaya de Mascara)qui s'étend continuellement sur l'atlantique, par des travaux d'extension et de digues de protection, est aujourd'hui la 16eme puissance économique mondiale. Pays aisé avec une économie ouverte, s'appuyant fortement sur le commerce extérieur et les services (banques, assurances, transport aérien, ports?). Bien que seulement 4 % de la population active du pays soit employée dans le secteur de l'agriculture et les cultures maraîchères, les quantités de production destinées à l'industrie agro-alimentaire et à l'exportation sont énormes. Les Pays-Bas sont le troisième pays exportateur dans le domaine des produits agricoles et maraîchers derrière les États-Unis et la France. Son PIB par habitant est de 47172 (dix fois celui de l'Algérie 4365) exporte pour 397.6 milliards $ (Algérie : 65.91 milliards $), le taux de chômage est l'un des plus bas en Europe. Ces chiffres sont très éloquents pour décrire l'état de déliquescence de l'Algérie, qui importe tout et qui n'exporte que du fossile.

Faute de savoir faire, l'Algérie reste à la traine du monde développé, à cause des politiques de ''développement'' importées clé en main et expérimentées dès l'indépendance par des théoriciens en manque de laboratoire (du socialisme scientifique, du socialisme spécifique, des trois révolutions, de l'état providence, de l'oligarchie, etc..).

 Le temps n'est-il pas venu pour réaliser les rêves brisés ? Permettre à chaque génération de prendre en main son devenir. Aux compétences d'aujourd'hui, marginalisées ou expatriées, de gérer leur propre présent en accord avec leur époque, selon leurs besoins et en toute liberté. Chose pas du tout aisée, vu la toile tissée des milieux clientélistes qui tiennent encore sous leur contrôle, tous les leviers de décisions. La génération qui a libéré le pays, était très jeune en son temps, mais maintenant en fin de cycle, a pris les affaires au nom de la légitimité historique et les a gardées sans aucun partage. Elle n'a pas voulu, n'a pas su ou n'avait pas confiance en les générations postindépendance, pour leur remettre les clés de la maison, au temps opportun. Elle s'est appuyée pour gérer le pays sur une frange de la population souvent opportuniste, égoïste et égocentrique. Cette catégorie de lettrés a fait partie de toutes les ''réformes'' et a lesté le pays par l'immobilisme et le conservatisme. Ce n'est pas à cause de la fatalité si nous sommes, parmi les derniers dans tous les classements de gouvernance économique, scientifique, culturelle etc.?Bien que le président de la République l'ait rappelé à maintes fois, la légitimité démocratique se fait encore désirer. Lui qui est venu aux commandes dans une situation très difficile pour les Algériens, a gagné le défit sur plusieurs fronts, vitaux pour le pays. Comme par sa présence et le soutien d'une large proportion de la population (Quoi qu'on dise), il a pu empêcher les déstabilisations et l'effritement préparés dans les cabinets d'ici et d'ailleurs. Cependant ce qui est pressant et attendu de lui aujourd'hui, c'est de doter le pays d'institutions qui survivront aux crises et aux conjonctures, comme l'avait fait De Gaule pour la France. Le lourd fardeau de la responsabilité ne devrait pas reposer sur une seule personne, quelle qu'elle soit ! Mais partagé par tous. Un État est fort, par la cohésion de sa société, la participation de toutes ses composantes à son édification et la fierté qu'elles le lui rendent. Le développement, la prospérité, le rayonnement d'un pays et son influence dans le monde ne se décrètent pas, ils sont le fruit du travail et des efforts de tous.

Si la Hollande est aujourd'hui prospère, c'est dû particulièrement à son école, à l'indépendance de sa justice, à la liberté de sa presse, à l'alternance aux affaires de ses élites et au savoir faire de ses agriculteurs, de ses industriels, de ses traders, de ses économistes et ses financiers etc.?La Hollande ne repose pas sur Guillaume-Alexandre, devenu Roi suite à l'abdication de sa mère, la reine Béatrix, pour rajeunir le trône et le mettre en phase avec son temps.

Le temps use et le siège enivre, comme l'a si bien dit le Président Bouteflika. L'obstination du père à s'accrocher à son temps et ne pas affranchir ses enfants devenus adultes et majeurs, engendre le désamour, crée le malaise, l'incompréhension et l'indifférence. La nature n'aime pas la redondance pour se pérenniser. A chaque génération son temps et ses hommes. La vie est un cycle perpétuel de mouvement créatif et innovant, ce qui était valable hier ne l'est forcément pas aujourd'hui, sinon on serait restés encore hominidés dans les grottes de Palikao.