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Changer sans agir ?

par A.Khaldi

Une fatalité ! Après chaque rendez-vous électoral, on débouche invariablement sur des assemblées hétéroclites dépourvues du moindre crédit, parce que mal élues et sans aucune profondeur politique, composées le plus souvent de personnes à la limite de l'indigence culturelle.

Rares parmi eux portent un projet de société ou une vision stratégique de développement. Dans la plupart des cas les acteurs les plus virulents de ces joutes se recrutent parmi des vieux canassons de retour, des personnages menacés de poursuites judiciaires ou carrément en bis bis avec la morale à la recherche du refuge qu'offrirait l'immunité parlementaire. D'habiles boursicoteurs de voix et autres jongleurs de sachets noirs bourrés de liasses complètent la caravane de cette faune toujours aux aguets des opportunités les plus juteuses.

La masse dite silencieuse, plutôt autiste, s'est depuis longtemps contentée de se satisfaire des lamentations après coup et se recroqueville sur elle-même jusqu'à complétement indifférer les aléas de l'environnement.

Le peu de cadres intègres qui cultivent encore quelques ambitions de faire partie de la compétition se retrouvent abandonnés sur le quai de la désillusion .L'amertume de la défaite leur fait regretter de s'être prêté aussi naïvement à cette aventure alors qu'ils connaissaient déjà le peu d'enthousiasme et d'engagement de leurs concitoyens sur lesquels ils avaient beaucoup compté .Ils s'aperçoivent qu'ils se sont livrés comme des novices à une meute de loups qui les a juste exploités pour l'effet " vitrine " dont elle avait besoin pour épater la galerie. Devant cette Bérézina à chaque fois répétée on ne peut s'empêcher d'en vouloir à cette stupide inconstance qu'on nous fait adopter malgré nous, parce qu'au bout du compte nous participons délibérément à la catastrophe annoncée.

A l'heure des bilans, on ressort la sempiternelle justification pour nous consoler de notre énième ratage : mettre nos déboires sur le dos du système en criant à la fraude que tous les contrôleurs nationaux et étrangers n'ont pourtant pas pu déceler, et encore moins identifier. Un phénomène insaisissable que tous les perdants dénoncent mais paradoxalement toujours après que leurs représentants, dument mandatés, aient approuvé le bon déroulement et contresigné les PV y afférents. L'accusation est rarement étayée par des preuves solides ! On se décharge quand même sur le compte de malversations imaginaires et d'autres combines machiavéliques et affabulations qu'on apprête pour la circonstance. Il faut ménager son égo tout de même !

Mais la véritable origine de notre catastrophe se résume en deux positions portant en elles-mêmes tous les ingrédients de la déception. Ceux qui sont aptes à la mission ne se portent pas candidats et ceux qui doivent les élire préfèrent aller à la pêche le jour du vote. Et ainsi le profil du candidat potentiel influe sur le pseudo-électeur et vice versa pour aboutir à la paralysie des meilleures occurrences. En fin de compte nous ne récoltons que ce que nous semons ! Mais dans tout cela que deviennent les valeurs sures capables de relever le défi ?

 Notre élite et les meilleurs de notre jeunesse ont fini par chevaucher d'autres rêves et d'autres préoccupations et la responsabilité directe de leur désaffection forcée incombe à tous les décideurs qui ont monopolisé la vie politique dans le pays. A quoi devrons nous nous attendre lorsque nos cadres émérites se résignent à l'exil ou au sous-emploi chronique dans des taches rébarbatives et en dehors de leurs compétences. Par réaction naturelle, la précarité de leur situation les pousse à perdre confiance dans leur avenir et finissent par douter du combat qu'ils s'apprêtaient à livrer .La plus courante des alternatives les éloigne progressivement du terrain politique. Combien parmi eux sont forcés de tourner le dos au pays en choisissant le déracinement vers d'autres latitudes après avoir frappé en vain sur le mur infranchissable de la vie publique nationale. Avons-nous réellement eu un jour la sincère volonté de les associer aux différents projets et de valoriser cet immense potentiel de know how en les impliquant davantage dans la conduite des affaires du pays.

Cette question est sans aucun doute celle qui a fini par s'imposer dans l'esprit de chacun de nous. En effet la réalité laisse plutôt penser qu'on fait tout pour les pousser inexorablement vers le toboggan de la fuite en avant ou de l'enfermement névrotique.

Personne ne doute que ceux qui s'accrochent comme des morpions aux mamelles de la vache Algérie veillent jalousement à protéger leur pré carré par différents artifices. L'objectif n'est-il pas de dissuader les éventuels trublions de s'approcher trop près de cette manne qu'ils considèrent comme un héritage inaliénable. Personne n'attendait la naissance et encore moins la croissance foudroyante de classes sociales antagoniques au pays des Chouhada. On ressent cependant de plus en plus la désagréable impression de nous retrouver, contrairement aux vœux des pères fondateurs de cette Nation, face à une impitoyable société ou le statut de l'indigène retrouve sa place mais avec de nouveaux colons .La seule différence sera uniquement celle des patronymes !...

Si les rentiers de carrière ne voient pas de bon œil leur inévitable remise en cause par cette dangereuse concurrence qu'ils poussent à l'exile et à la marginalisation, les trabendistes craignent eux, le tarissement des sources d'enrichissement que provoquera une gouvernance rationnelle. Et c'est ce qui oblige les deux parties, à l'origine de tous nos malheurs, à sceller leur alliance sacrée

Tacitement on se partage les rôles pour conjurer le péril que pourrait représenter l'émergence de cette population d'un autre type au sein d'une société qu'ils ont modelée selon leurs attentes : La seule façon de pérenniser la situation consiste donc à dégouter profondément cette élite et la maintenir aussi loin et aussi longtemps que possible de la tarte que les insatiables prédateurs sont en train de dévorer. Il suffit de leur fermer les portes par la multiplication des embuches bureaucratiques d'un côté et de l'autre, les bombarder quotidiennement d'informations angoissantes tout en leur suggérant insidieusement des solutions aventureuses conduisant vers de fausses cibles. Les relais de la propagande distillent à plein régime les appels au désespoir en peignant les tableaux les plus apocalyptiques pour les dissuader de se lancer dans les batailles de l'existence. Le but inavoué est de les détourner de toute velléité de prise de conscience de leurs droits et de leurs devoirs dans ce pays. Qu'ils intègrent leur dimension de " pseudo-apatrides " et demeurent loin des centres de décisions pour prétendre à des fonctions politiques.

Pendant que nous avons l'attention plombée sur les faux problèmes le trabendo prospère et des fortunes colossales se bâtissent .On nous focalise sur les épouvantails du?système auquel eux s'accommodent parfaitement pour bâtir leurs empires en nous prédisant qu'il va bientôt s'écrouler de lui-même, atteint par une hypothétique auto péremption ! Cependant, dès que la température s'élève dangereusement dans la chaudière, Ils hurlent les premiers au " fameux changements " et miroitent des pseudo- réformes pour apaiser les tensions et relancer l'espoir. Les spécialistes de l'arnaque nous abreuvent d'ergotage sur la morale qui entoure l'opération électorale .Comme rien ne marche dans ce pays disent-ils, la meilleure recette préconisent-t-ils de nous débarrasser de cette fange d'individus qui décident de notre vécu consiste à leur faire " la gueule " et?. leur laisser le champ libre, donc boycottons les élections !. Bien, mais et après. Bien rien, comme d'habitude, la réaction se limite à quelques gesticulations ridicules après la raclée inévitable et des appels au secours à des renforts qui ne viendront jamais .On remise cette arme redoutable pour la réutiliser la prochaine fois avec les mêmes résultats attendus !.... Il faut donc se décider à sortir de ce cercle vicieux, agir efficacement et en masse et ne plus laisser le champ libre aux autres pour qu'ils décident à notre place. Adopter le retrait volontaire et s'auto marginaliser ont montré leurs limites et leurs retombées désastreuses dans la mesure où cette politique permet toujours aux mêmes de se remettre en selle ou de se reproduire à l'infini ! Cela devient complétement absurde de se croire plus malin en se "distinguant du ghachi" et de ne pas participer aux différents votes. Certains veulent nous faire admettre qu'il est possible de récolter autre chose que ce l'on a semé ! Ils croient détenir l'arme efficace en s'acharnant sur tout ce qui veut bouger jusqu'à lui fourguer de vilains complexes d'arriéré indécrottable ou de lèche bottes du pouvoir pour la moindre des tentatives de participer à la vie politique et sociale de son pays.

Comment comptent-ils influer sur une situation sans s'y engager à fond pour lui imprimer des objectifs bien clairs et bien décantés dans l'esprit afin de la modeler ou de la transformer selon une vision réaliste . De l'extérieur on ne peut avoir aucune influence sur les rouages et les mécanismes de la grande machine à moins de compter sur un miracle ou l'intervention brutale du? Nato !

Escomptent-ils que les bénéficiaires de la curée générale veuillent, sur un coup de tête ou par philanthropie subite, abandonner leurs confortables positions ? La meilleure façon de les déloger ou de les réduire à leurs véritables dimensions est d'occuper massivement et en permanence les positions qui devraient revenir de droit aux plus qualifiés des enfants de cette nation. Cet objectif vital pour l'avenir du pays en entier ne peut être atteint que par la contribution sereine à la vie politique et non par le rejet systématique de toute participation aux élections. La recette éculée de tourner le dos pour manifester son eternel désaccord a montré ses limites et sa vanité. Les tenants du pouvoir s'en foutent de cette forme de bouderie comme de l'an 40 et lui souhaitent même une longue vie. Ils ne peuvent pas espérer mieux ! Du reste ce comportement suicidaire a fini par avoir l'allure d''une immense fumisterie qui a obéré combien de projets de développement et qui continue à enfoncer le pays dans la médiocrité .Ce qui n'empêche pas les adeptes du boycott systématique de s'obstiner contre toute logique à le perpétuer indéfiniment. Le paradoxe c'est qu'ils font tout pour bloquer le mouvement et ensuite ils dénoncent l'inertie à grands fracas et certains poussent le ridicule jusqu'à jubiler du gâchis qu'ils ont eux-mêmes provoqué.

Les gens qui occupent les lieux n'ont aucune raison pour céder gracieusement leurs places et encore moins leurs avantages. Ce n'est pas d'une très grande probité intellectuelle de reprocher au vainqueur de l'emporter par forfait lorsqu'on fuit le combat et qu'on déserte le champ de bataille.Les grands défenseurs de cette curieuse conduite s'allongent pitoyablement avant de monter sur le ring. Pour justifier leur forfaiture, à chaque fois remise au gout du jour, ils lancent des pronostics savants sur les résultats et déclarent sans la moindre honte qu'en grands devins ils savaient déjà que les jeux étaient faits avant même la plantation du décor. Quand on accepte un tel postulat ils ont bien sur raison dans la mesure où aucun prétendant sérieux ne se présente à la ligne de départ. Quelqu'en soit la forme de la victoire, l'adversaire tant stigmatisé a tous les droits de s'offrir le trophée mis en jeu. Ne dit-on pas " que les absents ont toujours tort ! " Ce comportement est le meilleur moyen pour ?pérenniser le système et apporter de l'eau au moulin de ce que l'on qualifie d'"indus occupants". Au point que ces derniers formulent les meilleurs vœux de réussite dans la poursuite de cette stratégie complètement farfelue de l'abstention.

Ils ne peuvent s'empêcher de rire sous cape de la dérision des prétentions de transformer le monde tout juste par le fait de cancaner toute la journée sans quitter la touche.