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Déficit d'autorité en France ?

par Abed Charef

La France ronronne, la France n'est pas présidée avec l'énergie nécessaire, selon l'opposition de droite, qui parle d'un déficit de pouvoir.

La France est mal dirigée. François Hollande manque de charisme, d'autorité, de présence, dit-on dans les milieux de l'opposition française, où il est déjà de mode de taper sur le nouveau chef de l'Etat, qui hérite pourtant d'un pays laminé par l'ancien pouvoir de droite. La droite se délecte de la chute de François Hollande dans les sondages, une chute qui concerne aussi son premier ministre Jean-Marc Ayrault, dont la sérénité ne semble plus faire recette.

Il n'est plus reproché au président François Hollande d'être un chef d'état « normal », mais d'être trop normal dans une situation exceptionnelle. En effet, les crises s'accumulent, les défis prennent de l'ampleur, mais le chauffeur de pédalo continue tranquillement son chemin, à un rythme très lent, alors qu'il faudrait une grosse cylindrée pour faire face à la situation.

De tous les côtés, les défis s'accumulent. Au plan interne, le chômage a franchi, cette semaine, la barre symbolique des dix pour cent, un chiffre que la France n'avait pas connu depuis une quinzaine d'années. Et quand les chiffres du chômage plongent, ce sont tous les chiffres de l'économie française qui virent au rouge. Les collectes d'impôts baissent, les déficits des caisses sociales s'aggravent, l'équilibre budgétaire devient une douce chimère, le moral des entreprises et des ménages s'effondre, la consommation chute, entrainant avec elle la production, etc. C'est alors que le pays s'engage dans un engrenage infernal bien connu des économistes, et dont il devient difficile, voire impossible de sortir. Dans une telle conjoncture, la solution pourrait venir d'un rebond de la croissance. Elle est le moteur de tout l'édifice. Mais François Hollande a fait des promesses pour être élu.

Et ces promesses vont l'amener à taxer davantage ceux qui ont de l'argent, ce qui aura pour conséquence de décourager l'investissement et de retarder d'autant le redémarrage de l'économie.

A l'étranger, d'un point de vue français, le ciel s'assombrit également, sans que le gouvernement puisse y remédier. Le Mali, pays de la docile Françafrique, s'enlise, avec une partie du territoire passée sous contrôle d'islamistes jihadistes et d'organisations terroristes qui pratiquent le rapt et ont fait de la rançon une véritable industrie. Des Français sont détenus en otages, certains depuis deux ans, mais la France ne peut strictement rien pour eux, à part négocier et se plier aux conditions des ravisseurs, en leur payant éventuellement des rançons.

En Syrie, autre pays traditionnellement lié à la France, une guerre civile meurtrière se poursuit depuis dix-huit mois. La France s'est résolument engagée derrière la rébellion syrienne, mais elle n'arrive pas à faire pencher la balance comme l'avait fait Nicolas Sarkozy lorsqu'il avait décidé d'éliminer Maammar Kadhafi. Elle n'arrive pas non plus à peser sur la situation en Iran, dont elle dénonce régulièrement le programme nucléaire. Le Hezbollah libanais, autre bête noire de la France, continue de garder une position centrale dans le pays, alors que la France essaie, depuis des années, de l'affaiblir, à défaut d'obtenir son démantèlement.

Que reproche-t-on à François Hollande ? A-t-il pris de mauvaises décisions ? Ce n'est pas évident. A-t-il fait de mauvais choix ? Rien ne le prouve. L'homme a tenté des formules parfois originales, comme cette idée d'engager un vrai dialogue social pour associer les syndicats aux mesures d'austérité éventuelles. Il s'est refusé de prendre les travailleurs de haut, et cherche des solutions innovantes pour l'industrie et l'emploi. Il a érigé la concertation en mode de gouvernance, tout en établissant progressivement de nouvelles règles qui contrastent avec le volontarisme et la confusion qui s'étaient instaurées sous Nicolas Sarkozy.

Que reproche-t-on finalement à François Hollande ? Pas sa politique, car il a été élu pour l'appliquer. Ses choix sont connus, ses amitiés et ses préférences aussi. Il a promis d'établir une nouvelle relation avec l'Allemagne, et il semble tenir parole. Il a affirmé une conception de l'Europe, et il y tient, malgré les concessions qu'il est obligé de faire à cause de la crise.

Au final, François Hollande est donc critiqué pour son manque d'énergie, son absence d'audace. On lui reproche de ne pas être assez présent, de ne pas cracher le feu au moment des crises, et de ne pas faire preuve de cet entrain qui avait été la marque de son prédécesseur. Il est allé à la tribune des Nations-Unies faire un discours, mais si les Français ont trouvé que ses propos étaient plutôt satisfaisants, il a mis trop de temps pour les dire, et ne les a pas accompagnés de la mobilisation nécessaire et de l'action diplomatiques nécessaires. François Hollande manque de présence, et la France est un pays qui manque de leadership, lui a-t-on reproché.

Que dire alors de l'Algérie ?