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Signes visibles de turbulences estivales

par Salim Metref

Plus caniculaire que jamais, l'été 2012 aura été surtout meurtrier, nos routes ne cessant de provoquer une véritable hécatombe parmi des conducteurs de moins en moins enclins à la prudence mais aussi et souvent victimes des nouveaux gladiateurs de l'asphalte.

La violence gagne le réseau routier et ces chauffards-assassins ne prêtent même plus assistance aux victimes des accidents qu'ils provoquent et n'hésitent pas le plus souvent à fuir, aggravant ainsi les délits qu'ils commettent.

D'autres victimes meurent aussi cet été et ce de mort lente. Ainsi nos arbres qui ne demandent qu'à pousser en paix voient leur nombre se réduire et deviennent les victimes silencieuses de foyers d'incendies ravageurs qui se propagent dans de nombreuses régions du pays et qui sont provoqués par on ne sait qui mais certainement par de dangereux et fous pyromanes. Nos espaces protégés et des pans entiers de nos parcs nationaux se consument et sonnent l'hallali pour nos espaces verts, invitent à la désolation et, associés à l'érosion des sols, engendreront certainement la désertification. Nos arbres centenaires partent en fumée parce que plus rien ne se fait et que rien ne fonctionne plus. Jadis la saison estivale se préparait à l'avance et de nombreux travaux préventifs étaient conduits à proximité des forêts pour les prémunir des feux et endiguer, le cas échéant, leur propagation. Les accotements des chaussées étaient également nettoyés de tout élément susceptible de constituer une amorce de départ de feu. Les campagnes de sensibilisation étaient régulières et tout était fait pour expliquer aux plus jeunes que la forêt est un bien commun qui nous est extrêmement utile, qu'il faut protéger comme la prunelle de nos yeux et qui nous est indispensable pour vivre.

Il suffit maintenant de sillonner les routes qui longent nos forêts, également envahies de détritus et défigurées à la tronçonneuse, pour s'apercevoir que peu d'actions sont réalisées. Mais est-ce à cause de la chaleur que ces travaux ne s'effectuent plus, alors qu'ils doivent l'être normalement au printemps et sous des températures plus clémentes, où s'agit-il là aussi et encore une fois de plus de la propagation du vide qui n'épargne plus aucun secteur ? De plus, maintenant que nos braves forestiers, issus de l'ancienne école, celle qui vouait amour et respect à la nature, partent à la retraite les uns après les autres, le pire est à craindre et nos courageux pompiers, sans guides et sans connaisseurs, auront la tâche de plus en plus ardue pour accéder à des lieux, forêts et autres maquis, réputés difficiles et aux parcours inextricables.

Autre danger ayant plané sur cet été virevoltant, l'obscurité qui nous a régulièrement accompagnés pendant ces jours de Ramadhan. Que peut-on faire sans énergie et particulièrement sans électricité ? Rien. Tout s'arrête et même les entités les plus utiles peuvent ne plus fonctionner sans omettre de mentionner ces précieuses quantités de médicaments et autres produits alimentaires qui, faute parfois de générateurs électriques de secours trop coûteux, périssent du fait de la rupture de la chaîne du froid et de l'absence de possibilités de conservation.

Ainsi à cause de l'absence de gestion prévisionnelle déployée par des responsables d'un secteur plus que névralgique que de celle de la canicule ou de l'utilisation dite de confort et excessive d'énergie électrique, cet été a plongé dans le noir de nombreuses régions du pays et beaucoup de nos concitoyens se sont résignés à sortir dans les rues pour exprimer leur mécontentement. Nous sommes certes en surconsommation estivale d'énergie électrique mais il faudra éclairer notre lanterne en nous expliquant la fatalité de l'état de sous-production énergétique. Encore une fois, nous sommes rattrapés par nos propres travers et par les effets d'une gestion approximative et hasardeuse de la chose publique qui devient une véritable pandémie et de surcroit récurrente.

Autre danger mortel, la flambée des prix qui a été encore une fois au rendez-vous. Ainsi, la saignée des ménages a bel et bien eu lieu sans que personne ne réagisse. Il est vrai que cette flambée est désormais devenue une tradition.

D'autres morts ont aussi eu lieu cet été. Comme celles implosives et de recomposition de nouvelles structures politiques partisanes qui nous ont démontré que l'ingratitude, les convictions volatiles et la quête effrénée du confort et de la vie facile, aux frais des contribuables que nous sommes, gagnent du terrain et seraient devenues, semble-t-il, le substitut à la noblesse, à la mission de service public et au devouement pour les autres qui doivent toujours caractérisé l'action politique. Mais à l'aube des véritables défis dont nous devinons déjà les premiers signes précurseurs, la scène politique nationale a besoin de bien plus que d'un lifting. Ces défis à venir que nous n'avons encore jamais vécu et qui ont plus que jamais besoin, ceux-là, de compétence, d'intégrité et de dévouement et de tous ces compatriotes d'ici où établis ailleurs, en France, en Suisse, au Qatar, aux Etats-Unis, en Malaisie, en Grande-Bretagne, en Egypte et dans bien d'autres contrées encore et dont le retour est plus que jamais nécessaire tant les chantiers de la renaissance seront fastidieux, exaltants et auront besoin de toutes les intelligences.

Au milieu de toutes « ces morts annoncées », une naissance qui fait beaucoup de bien, celle d'une nouvelle légende du demi-fond. Elle nous réchauffe le cœur et nous fait oublier l'inqualifiable participation qu'a été notre symbolique mais néanmoins très coûteuse présence aux Jeux de Londres. Cette inespérée médaille olympique qui permet à l'Algérie de relever la tête et qui nous est offerte par ce vaillant et brave jeune athlète natif de Souk-Ahras, ville légendaire où naquit Saint-Augustin qui y planta son célèbre olivier. Armé de son seul courage et de sa seule détermination, cet athléte de haut niveau a prouvé encore une fois et si besoin est et à tous ceux qui ne cessent de malmener ce pays que ce dernier, malgré les écueils et autres obstacles qu'ils érigent ici et là, continue d'être porté par le courage de ceux qui réussissent toujours là où on ne les attend jamais! Les justes continuent d'exister, de tenir la route et accomplissent, contre vents et marées, leurs missions. Pendant ce temps-là, d'autres, sans doute plus intelligents, s'accommodent de la confusion générale et de notre propre décrépitude.

Ce mois de Ramadhan enfin, et c'est la chose la plus importante, aura malgré toutes les péripéties d'un été rocambolesque, tenu toutes ses promesses. Jamais ferveur religieuse n'a été aussi forte. Jamais communion si présente. Une véritable cure de désintoxication. Une période incontournable pour le repentir, l'expiation des péchés et la quête du pardon. En attendant la rentrée !